Les salafistes égyptiens soutiennent Abdel Moneim Aboul Foutouh
Le principal parti fondamentaliste salafiste égyptien, Al-Nour, a décidé de soutenirun islamiste modéré dissident des Frères musulmans, pour l'élection présidentielle prévue fin mai, a annoncé samedi cette formation.
Le groupe parlementaire du parti "a décidé de soutenir le candidat Abdel MoneimAboul Foutouh pour la présidence de la république", selon un communiqué de Al-Nour.
M. Aboul Foutouh est un ancien haut dirigeant des Frères musulmans en conflit avec la ligne conservatrice de la confrérie, qui l'a exclu de ses rangs l'an dernier après qu'il a annoncé son intention de se lancer dans la course à la présidence.
Le parti Nour s'est classé deuxième derrière les Frères musulmans lors des élections législatives de cet hiver. La décision du parti salafiste, qui détient environ 20 % des sièges de députés, va constituer un handicap pour le candidat officiel des Frères musulmans, Mohammed Morsi, qui risque de perdre une partie importante de l'électorat islamistes au profit de M. Aboul Foutouh. M. Morsi est le chef du Parti de la justice et de la liberté, issu de la confrérie et première formationpolitique d'Egypte.
Le premier tour de la première élection présidentielle depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011 est prévu les 23 et 24 mai. L'armée, au pouvoir depuis le départ de M. Moubarak, doit rendre le pouvoir aux civils en juin une fois le nouveau président élu. Les principaux autres candidats sont l'ancien chef de la Ligue arabeAmr Moussa, ainsi que le dernier Premier ministre de M. Moubarak, Ahmad Chafiq. Treize candidats au total sont en lice. lemonde
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« Candidat du régime », Amr Moussa, contre islamistes et non-islamistes en rang dispersés
Trois poids-lourds de la présidentielle égyptienne. De gauche à droite : Aboul Foutouh, Moussa et Morsi
L’invalidation des candidatures d’Omar Souleymane et d’Ahmed Chafik a réduit le camp de l’ancien régime à un seul candidat, Amr Moussa, qui cultive l’image d’un homme rassurant promettant une « douce transition ». Après l’élimination du salafiste Hazem Abou Ismail, les islamistes sont représentés par Mohamed Morsi, des Frères musulmans, et Abdel Mounêem Aboul Foutouh qui, bien qu’ancien dirigeant de cette confrérie, se veut ouvert sur les forces démocratiques et la gauche et, socialement, plus « radical ». Le camp non islamiste est, quant à lui, encore plus éclaté entre plusieurs candidatures.
La carte des présidentielles égyptiennes, dont le premier tour est prévu pour les 23 et 24 mai prochains, s’est beaucoup simplifiée suite au rejet des candidatures de deux figures du régime de Moubarak, Omar Souleymane et Ahmed Chafik, et de deux leaders islamistes, le Frère musulman Khayrat El Chater et le salafiste Hazem Abou Ismaïl.
La candidature de l’ancien patron des services secrets égyptiens a été refusée parce qu’il n’a pas réussi à rassembler le nombre de signatures nécessaire pour la faire valider par la Commission électorale. Celle de l’ultime Chef du gouvernement de la dictature moubarakienne a été invalidée après que le pouvoir militaire eut été contraint de promulguer une loi adoptée par le Parlement empêchant de briguer la Présidence toute personne ayant assumé de hautes charges durant la décennie qui a précédé la chute de Hosni Moubarak.
La candidature de Khayrat El Chater, adjoint du guide de la confrérie des Frères musulmans, a été rejetée parce que la justice égyptienne a estimé que sa condamnation par un tribunal martial, en 2008, le privait toujours de ses droits civiques. Le prédicateur salafiste Hazem Abou Ismail a fait, lui, les frais d’un article du Code électoral qui interdit d’élire à la tête de l’Etat tout Egyptien dont un des ascendants porte une nationalité étrangère.
Un ancien et un actuel « Frères musulmans »
Après ce tri sévère, le camp de l’ancien régime - et de son héritier, le pouvoir militaire - aura un seul candidat de poids, issu de l’establishment moubarakien bien que ses rapports au président déchu n’aient pas toujours été de pure allégeance. Il s’agit d’Amr Moussa, ex-chef de la diplomatie égyptienne et secrétaire général de la Ligue arabe de 2001 à 2011.
Si l’on fait abstraction de la candidature de l’avocat Salim El Awwa, peu susceptible de devenir une icône populaire d’ici le premier tour du scrutin, le camp islamiste sera représenté par deux importantes personnalités. La première est Mohamed Morsi, président du Parti de la liberté et de la Justice (PJL), le bras politique des Frères musulmans. « Candidat de rechange » après l’élimination de Khayrat El Chater, il a été affublé par les activistes de l’opposition non islamiste du sobriquet de « Monsieur Roue de secours » et figuré, sur les réseaux sociaux, en « Homme Michelin » (barbu pour respecter la vraisemblance).
La seconde personnalité islamiste en lice est Abdel Mounêem Aboul Foutouh, exclu des rangs des Frères musulmans pour s’être présenté aux présidentielles du temps où ils refusaient encore d’y participer sous leur propre bannière et affirmaient qu’ils soutiendraient le « candidat le plus consensuel ».
Quant à l’opposition non islamiste, elle reste très divisée. Ses candidats les plus connus sont Hamdine Sabahi, le leader des nassériens radicaux (Hizb El Karama), le magistrat Hichem el Bastawissi, un militant de l’indépendance de la justice qui se présente sous les couleurs d’Al Tagamoê, un parti de la « gauche institutionnelle », et, enfin, Aboul Izz El Hariri, une figure de la Coalition populaire socialiste.
Abdel Mounêem Aboul Foutouh, un islamiste qui ratisse large
Le candidat du Parti de la liberté et de la justice, Mohamed Morsi, bénéficiera certainement des capacités de mobilisation considérables des Frères musulmans. Bien qu’il soit moins apte que Khayrat El Chater à rallier à lui les salafistes, il n’est pas exclu qu’il obtienne une partie de leurs votes. Il n’en paiera pas moins le prix de la bienveillance de son organisation envers les militaires rompue, avec fracas, qu’il y a quelques semaines. Une partie de la base électorale islamiste pourrait lui préférer Abdel Mounêem Aboul Foutouh.
Critique envers le pouvoir intérimaire en place et défendant des propositions socio-économiques radicales (impôt sur la fortune, taxation des revenus spéculatifs, etc.), Abdel Mounêem Aboul Foutouh se présente comme le vrai « candidat du changement » et voudrait capter les suffrages d’une partie de l’opposition non islamiste hostile aux militaires. En réduisant les références religieuses dans son discours à leur plus simple expression et en mettant l’accent sur la protection des libertés religieuses, il entend rassurer les laïcs et la minorité chrétienne, notamment ses franges radicalisées contre l’armée depuis la répression sanglante d’une manifestation copte au Caire, le 9 octobre 2011.
Amr Moussa, la « douce transition » ?
L’élimination de la candidature d’Ahmed Chafik, proche collaborateur de Hosni Moubarak au moment même où les sit-in de l’opposition étaient sauvagement dispersés, a amélioré les chances d’Amr Moussa de séduire l’électorat de la « thawra al moudadha » (la « contre-révolution »). Au-delà de cet électorat, il a déjà obtenu le soutien d’El Wafd, un des partis de l’opposition démocratique traditionnelle et compte conquérir les franges de la population égyptiennes redoutant un changement brutal qui prendrait la forme d’un affrontement avec l’armée.
L’ancien secrétaire général de la Ligue arabe se définit comme un candidat centriste. Il évite soigneusement de s’en prendre au pouvoir militaire mais rend régulièrement hommage aux organisations révolutionnaires juvéniles, célébrant leur courage et leur abnégation. S’il promet de « revoir » les relations avec Israël, il cultive l’image d’un homme rassurant, proposant une rassurante transition à un pays qui a peur de sombrer dans l’inconnu. Il ne manque aucune opportunité de rappeler son expérience de diplomate, familier des arcanes de la politique mondiale, promettant de mettre ses « réseaux » et connaissances au service de la relance de l’économie de l’Egypte.
Ainsi, en résumé, la bataille principale des présidentielles égyptiennes pourrait se dérouler entre Abdel Mounêem Aboul Foutouh et Amr Moussa. Tous deux ratissent plus large que leurs camps initiaux respectifs et, tout en prenant leurs distances avec leurs anciennes appartenances, espèrent en tirer profit électoralement. Il s’agit là d’un retour au scénario de la « polarisation entre deux candidats modérés » : un islamiste et un non-islamiste soutenu par le régime qui aurait pour mission de redorer son blason.
Les Frères musulmans : une radicalisation tardive ?
La décision des Frères musulmans de présenter leur propre candidat à la Présidence a été leur réponse à la propension des militaires à limiter les prérogatives réelles du Parlement. Ils en attendent qu’elle empêche l’implosion de leur organisation, où l’exclusion d’Abdel Mounêem Aboul Foutouh et la multiplication de leurs accointances avec l’armée ont provoqué une inquiétante saignée.
La confrérie a nettement radicalisé son discours ces dernières semaines. Cependant, elle entame ce bras de fer avec les militaires isolée des autres forces politiques dont elle n’a pas réellement tenté, depuis la chute de Hosni Moubarak, de gagner la sympathie. Elle s’est aliéné les groupes révolutionnaires radicaux en les dénonçant parfois avec virulence. Son désir d’assurer son hégémonie sur la commission de rédaction de la Constitution l’a coupée des partis libéraux modérés (El Wafd, Hizb El Ghad, etc.) qui ont démissionné, laissant ses délégués dans un inconfortable tête-à-tête les salafistes et amenant, plus tard, la dissolution de cette instance par la justice.
Au vu de ce passif, il ne sera pas aisé, pour les Frères musulmans, de transformer un homme comme Mohamed Morsi, connu pour son extrême modération, en un symbole de rupture radicale. Après avoir longtemps défendu une transition graduelle sous la houlette des militaires, ils pourront difficilement axer leur campagne sur la « poursuite de la Révolution ». maghrebemergent
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Le réformiste Mohamed El-Baradei lance un nouveau parti politique en Égypte
Le leader réformiste Mohamed El-Baradei a lancé samedi un nouveau parti politique qui, dit-il, vise à unifier les Égyptiens et sauver la révolution du pays face à une transition démocratique complexe.
Le Parti de la Constitution marque le retour à la vie publique pour M. El-Baradei, qui a déclaré en janvier qui ne se présenterait pas à la présidence et qu'un vote juste serait impossible pendant la transition troublée.
Son retrait à quatre mois avant le début de l'élection présidentielle a porté un coup aux groupes libéraux et gauchistes derrière les révoltes du 25 janvier qui ont mené à la chute d'Hosni Moubarak, l'an dernier. Ces groupes, dont plusieurs avaient trouvé en M. El-Baradei une figure de ralliement pour leurs appels à la démocratie en Égypte, ont subi une puissante défaite aux urnes lors des premières élections parlementaires après la chute de M. Moubarak.
Ce sont plutôt les groupes islamistes, incluant les influents Frères musulmans et les groupes salafistes ultraconservateurs, qui sont sortis vainqueurs de ces élections, remportant près de 70 pour cent des sièges.
Selon M. El-Baradei, qui a reçu le Prix Nobel de la paix pour son travail comme dirigeant de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), a déclaré qu'un nouveau groupe politique organisé était nécessaire pour unir les Égyptiens et préparer la jeunesse à un avenir politique au-delà de la révolution.
Quatorze mois après le départ de l'ex-président Moubarak, les généraux qui ont hérité de la régence du pouvoir sont impliqués dans une lutte de pouvoirs avec les islamistes. Ceux-ci dominent le Parlement mais se plaignent que les généraux font de l'obstruction. Plusieurs rivaux des islamistes soutiennent que ceux-ci vont au-delà de leurs prérogatives.
M. El-Baradei a précisé que son parti, qui n'a pas encore été officiellement enregistré, vise à représenter une Égypte modérée, et devrait être prêt à fonctionner dans deux à trois mois.
L'ancien dirigeant de l'AIEA a souvent été blâmé par ses partisans pour être trop distant, et pour son approche modérée envers le domaine politique. Son absence des manifestations dans les rues, sa préférence pour les négociations politiques discrètes et son retrait de la course présidentielle en ont frustré plusieurs. 985fm
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L'armée au pouvoir promet un remaniement ministériel
Le maréchal Hussein Tantaoui, le chef d'Etat de fait de l'Egypte, a indiqué au président du Parlement Saad el-Katatni qu'il allait remanier le gouvernement, ont annoncé les Frères musulmans sur leur site internet.
Cette annonce intervient au terme d'un bras de fer entre les généraux au pouvoir et les Frères musulmans, qui réclament depuis plusieurs semaines le limogeage du gouvernement mais se heurtent au refus des militaires.
L'Assemblée du peuple égyptienne, présidée par M. Katatni, avait un peu plus tôt dimanche décidé de suspendre ses séances pendant une semaine, jusqu'au 6 mai, pour protester contre la position du pouvoir militaire.
"Le maréchal Tantaoui informe Katatni qu'il va remanier le gouvernement d'ici quelques heures", affirme le site internet de la confrérie islamiste, sans plus de précisions.
Cité par l'agence officielle égyptienne Mena, M. Katatni a affirmé que le Conseil suprême des forces armées (CSFA), au pouvoir depuis la démission de Hosni Moubarak le 11 février 2011, allait "annoncer ce remaniement d'ici 48 heures".
"Saad el-Katatni a indiqué que le Conseil militaire se dirigeait vers un remaniement ministériel au sein du gouvernement de Kamal Ganzouri", a ajouté la Mena. M. Ganzouri, un septuagénaire nommé Premier ministre fin novembre, a été chef de gouvernement sous Hosni Moubarak entre 1996 et 1999.
Le président du Parlement a reçu un appel du CSFA dans lequel ce dernier souligne "son respect pour l'Assemblée du peuple et ses députés", selon l'agence, qui précise que M. Katatni a jugé la communication "satisfaisante et rendant sa dignité à l'Assemblée".
Depuis son entrée en force au Parlement, le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), issu des Frères musulmans, met la pression sur le pouvoir militaire, à la tête de l'Etat depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011, pour qu'il limoge le gouvernement et nomme le PLJ à la tête d'un nouveau cabinet.
Mais le Conseil suprême des forces armées a jusqu'ici continué à soutenir le gouvernement de Kamal Ganzouri.
Les Frères musulmans, qui ont remporté les dernières législatives, avaient accusé le gouvernement le mois dernier d'avoir échoué dans sa mission, évoquant pêle-mêle les violences, les ingérences dans les affaires judiciaires, la lenteur des réformes, la pénurie de carburant et la baisse des réserves de change.
"Si quelqu'un a l'intention de recréer l'ancien régime corrompu avec de nouveaux visages, le peuple est prêt à agir afin de raviver sa révolution et d'empêcher le navire de couler aux mains de gens sans aucun sens des responsabilités", avaient-ils prévenu dans un communiqué au ton inhabituellement dur.
La confrérie s'était d'abord engagée à travailler pendant une période transitoire avec le gouvernement en place, nommé par l'armée. Mais dès février, elle avait dit souhaiter voir le gouvernement d'intérim limogé et remplacé par un cabinet formé par les Frères musulmans.
Les Frères musulmans ont parfois coopéré avec les généraux au pouvoir et parfois lutté contre eux, notamment au sujet de la place accordée à l'armée dans la rédaction de la nouvelle Constitution. tempsreel.nouvelobs
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