Il est tout à fait ordinaire qu’un parti idéologique inocule dans l’imaginaire de ses membres et de ses sympathisants le virus de l’ABSOLU… Sans «nous autres», c’est le déluge… La Vérité, la Pureté, l’Honnêteté, l’Amour du Peuple et de ses Traditions, la Moralité, etc. se confondent, dans l’esprit des partisans idéologisés et parfois fanatisés, avec leur chef et leur Parti ou leur Mouvement… Ennahdha n’échappe pas à cette logique d’endoctrinement et en cela il fera mieux que le RCD…
Les sorties fréquentes de ses partisans contre les citoyens qui manifestent pour un droit quelconque ou contre une action gouvernementale jugée anti démocratique dénotent cette stratégie de masse adoptée par Ennahdha… ``Notre Rue contre leur Rue`` m’écrivait un partisan de ce mouvement, car, dit-il, ``nous avons la vérité et les urnes avec nous``… Les urnes !
N’en déplaise à mon correspondant nahdhiste, les urnes qu’il utilise pour argument «moderniste» afin de cloîtrer toutes les critiques et protéger par là même tout dérapage anti-démocratique de la part du gouvernement de transition, ont déjà accouché d’un monstre le 13 mars 1932, Hitler…
Noureddine Bourougaa Mnasri
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Liberté de la presse : Ennahdha dans les pas du RCD de Ben Ali
Des journalistes manifestent à la Kasbah contre les nominations dans le service public, le 9 janvier 2012 (Thierry Brésillon)
Ennahdha vient de perdre une belle occasion de démontrer son respect de l'indépendance des médias. Samedi soir, une dépêche annonçait que le Premier ministre Hamadi Jbali avait nommé, sans aucune concertation préalable, les nouveaux directeurs des médias publics :
- agence de presse TAP, Tunis-Afrique-Presse : Mohamed Taïeb Youssefi ;
- Snipe – Société nouvelle d'impression, de presse et d'édition –, les quotidiens La Presse et Essahafa : Mohamed Néjib Ouerghi ;
- Télévision tunisienne : Adnane Kheder ;
- Télévision Tunisienne 1 : Sadok Bouabbène ;
- Télévision Tunisienne 2 : Imène Bahroun.
Les rédacteurs en chef des deux quotidiens publics :
- La Presse : Faouzia Mezzi et Mongi Gharbi ;
- Essahafa : Néji Abbassi.
Le directeur de l'information de la Télévision tunisienne : Saïd Khezami.
« Un oukaze politique »
La décision a immédiatement soulevé un tollé et, lundi matin, plusieurs centaines de personnes ont manifesté devant le siège du Premier ministre à la Kasbah, à l'appel du Syndicat national des journalistes tunisiens, le SNJT.
Kamel Laabidi, président de l'Instance nationale de réforme de l'information et de la communication (Inric), formée après le 14 janvier, conteste d'abord la méthode :
« Le gouvernement a procédé exactement comme à l'époque du RCD [l'ancien parti au pouvoir, ndlr] : une décision politique annoncée par une dépêche d'agence ! Nous n'avons ni été consultés, ni informés.
Hamadi Jbeli est même allé plus loin que le RCD en nommant les rédacteurs en chef et le directeur de l'information de la télévision nationale, alors que ce genre de décisions relève en principe des rédactions et non d'un oukaze politique.
C'est d'autant plus regrettable que nous avions émis la semaine dernièrequatorze recommandations pour des mesures d'urgence en faveur de l'indépendance des médias, dont la nécessité de décider des nominations en concertation avec le président de la République, le président de la Constituante, et les organisations professionnelles. Le gouvernement n'en a pas tenu aucun compte. »
« Des agents de la propagande de Ben Ali »
Le plus surprenant est que parmi les nouveaux responsables choisis par Ennahdha, plusieurs ont joué un rôle majeur dans l'appareil d'Etat de l'époque de Ben Ali, comme le relève Ridha Kéfi, membre de l'Inric :
« C'est un retour à la case départ. Ennahdha fait appel à des agents de la propagande de Ben Ali. S'ils ont choisi les mêmes, c'est qu'ils attendent d'eux qu'ils accomplissent la même mission, dans le même mépris des règles d'éthique et de professionnalisme. »
Nejib Ouerghi, nouveau directeur des deux quotidiens publics, La Presse et Essahafa, a été le rédacteur en chef de l'organe du RCD, Le Renouveau, de 2003 à 2010, avant de prendre la tête de la TAP.
Mohamed Taïeb Youssefi, nouveau directeur de la TAP, a été l'attaché de presse de différents ministères depuis 1989, avant d'être nommé chef de cabinet du Premier ministre en février 2010.
Ridha Kéfi commente :
« Nous avons désormais à la tête de l'agence de presse tunisienne quelqu'un qui était connu pour son sens du verrouillage de l'information. »
Les deux nouveaux rédacteurs en chef de La Presse, Mongi Gharbi et Fawzia Mezzi, ont eux aussi payé de leur personne pour vanter les mérites des dirigeants éclairés qui ont gouverné la Tunisie jusqu'au 14 janvier 2011.
Dans un texte rédigé dans une langue de bois inimitable de la plus belle facture, Mongi Gharbi exposait ses sept raisons de voter Ben Alien 2009. Extrait :
« Par-delà le concept temporel en soi, c'est bel et bien d'un style de gouvernance dont le chef de l'Etat ne s'est à aucun moment départi depuis qu'il veille aux destinées de la Tunisie. Un style qui consiste à adopter systématiquement la démarche graduelle, cumulative et constructiviste pour l'émergence d'un ordre nouveau, fût-t-il secondaire, et de s'en servir comme levier pour l'étape suivante, suscitant de la sorte une dynamique, d'une rare efficience d'accumulation et de pérennisation quali-quantitative des acquis. »
Quant à Fawzia Mezzi, elle a présidé l'Association des journalistes tunisiens qui avait remis à Ben Ali en 2003 la Plume d'or de la liberté de la presse. A l'époque, elle plaidait la nécessité de militer de l'intérieur pour les droits des journalistes.
Les autres responsables choisis par Hamadi Jbeli soulèvent moins d'objections. Adnane Kheder, directeur-général de la télévision nationale et Saïd Khezami (passé par Al Jazeera et Abu Dhabi TV), directeur de l'information, ont même plutôt une bonne réputation professionnelle.
« Les médias, au service de la gauche »
Comme c'est désormais l'usage, chaque manifestation critique à l'encontre du pouvoir suscite une contre-manifestation de militants particulièrement virulents, contenus derrière un cordon de policiers, pour clamer « nous sommes le peuple ».
Un homme qui se dit menuisier argumente :
« Nous sommes contre les arrivistes ! Moi je suis pour la liberté de le presse, mais nous n'avons pas confiance dans les médias. Ils sont au service de la gauche, ils ne parlent pas des vrais problèmes du peuple. »
Une professeure de l'Institut de formation des sciences de l'information qui forme les journalistes renchérit :
« Je les connais les gens d'en face, ces journalistes étaient vendus à Ben Ali. »
L'argument joue sur l'ambiguité qu'entretient la présence dans les manifestations de l'opposition, de personnalités qui ont prospéré sous l'ancien régime. Mais quand on objecte que ce sont précisément ceux que le gouvernement vient de nommer qui ont servi Ben Ali, un troisième manifestant coupe court à la discussion :
« L'Etat a tous les droits. Il peut nommer qui il veut ! »
D'une manière générale, ces contre-manifestations expriment un point de vue assez répandu qui voit dans la critique des décisions d'Ennahdha, l'affront d'une d'une élite gauche compromise avec Ben Ali, à un pouvoir censé incarner la volonté populaire. Les contre-manifestants scandent, comme dans un stade de foot :
« Avec notre sang, avec notre âme, nous défendrons ce gouvernement ! »
Abdelnaceur Aouini, avocat que l'on peut difficilement suspecter de complaisance avec l'ancien régime (il est devenu célèbre pour avoir été le premier à annoncer dans les rue de Tunis le départ de Ben Ali), du côté de la manifestation des journalistes, déplore cette tournure du débat politique :
« En défendant le pouvoir, ces gens ne sont pas conscients qu'ils défendent la possibilité d'une nouvelle dictature. Les gens de la société civile ou des syndicats qui ont lutté contre Ben Ali sont de ce côté. En face, ce sont des inconnus, des gens qui ne se sont jamais mobilisés. »
Depuis les élections du 23 octobre, dans les rangs d'Ennahdha, les médias publics sont régulièrement mis en cause parce qu'ils seraient investis par la gauche et les RCDistes, et ne représenteraient pas la réalité du peuple.
Kamel Laabidi, de l'Inric, réfute l'idée que les médias doivent être à l'image du parti majoritaire :
« Les sympathisants d'Ennahdha nous disent que les médias ne reflètent pas la nouvelle réalité, mais le rôle d'une presse libre n'est pas d'être le porte-parole d'une majorité ou d'un pouvoir. C'est d'informer l'opinion de manière professionnelle. »
Un pilier de la dictature
Certes, depuis le 14 janvier, les médias publics étaient considérés, avec la police et la justice, comme l'un des piliers de la dictature encore en place, et au cœur de toutes les protestations. Kamel Laabidi, à la tête d'une commission chargée justement de démocratiser le secteur des médias, le reconnaît :
« Les journalistes sont conscients des limites des médias publics. On ne peut avoir été empêchés de travailler normalement pendant vingt ans, sans que cela ne laisse des traces. Mais ces derniers mois, ils ont suivi des sessions de formation, ils commencent à acquérir de nouvelles habitudes.
Le problème doit être abordé de manière concertée, pas avec une décision aussi hâtive digne d'un régime autoritaire. Le contrôle des médias publics ne doit plus relever du gouvernement, mais du pouvoir législatif. »
Maladresse ou volonté hégémonique ?
Comment comprendre une décision aussi manifestement contraire au projet de rupture avec le régime de Ben Ali ?
Les partis politiques d'opposition y voit clairement une dérive et le signe d'une volonté de se couler dans le moule du RCD et de prendre le contrôle de l'Etat.
Ahmed Brahim, secrétaire général d'Ettajdid (social-démocrate), estime que :
» Les journalistes ont raison de voir dans cette décision le début d'une domestication des médias. «
L'affaire accroît encore la tension au sein de la coalition entre Ennahdha et ses deux alliés, qui n'ont pas été consultés sur ce dossier.
Khemais Ksila, député d'Ettakatol (social-démocrate), s'indigne :
“Ennahdha a révélé sa volonté d'hégémonie. Cette décision est une faute stratégique.”
Le CPR a publié un communiqué lundi soir pour dénoncer d'une part :
“le choix de personnalités impliquées dans la désinformation et la propagande de la dictature et la corruption dans l'ancien régime.”
... et d'autre part, une décision contraire à :
“la nécessité d'une révolution de l'information pour rompre avec la tutelle de l'Etat sur la presse”.
Côté Ennahdha, on plaide la bonne foi et la nécessité de procéder rapidement à des nominations après des démissions à la tête de la Snipe, de la télévision nationale et de la TAP. Samir Dilou, Ministre des droits de l'Homme et porte parole du gouvernement a même salué la vigilance de la société civile.
Des rédacteurs en chef élus
Nejiba Hamrouni, présidente du syndicat des journalistes, a été reçue pendant la manifestation par Abderazk Kilani, le ministre chargé des Relations avec l'Assemblée constituante, et le chargé de l'information et de la communication au Premier ministre, Ridha Kazdoghli.
Au terme de cette rencontre, le gouvernement a annoncé qu'il adopterait le principe de l'élection des rédacteurs en chef par des conseils d'administration constitués au sein des établissements médiatiques, composés de représentants des journalistes, des agents et de l'administration ainsi que de représentants des organisations et des institutions concernées par le secteur.
En attendant ces élections, toutes les nominations sont maintenues.
La réforme des médias publics, dont tout le monde s'accorde à reconnaître qu'elle est nécessaire, méritait sans doute mieux que ces décisions précipitées qui ont encore accru le malentendu et les tensions.
source rue89
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Bras de fer entre le gouvernement et les médias
A l'appel de leur syndicat, des centaines de journalistes tunisiens se sont rassemblés lundi devant le palais du gouvernement, place de la Kasbah de Tunis, pour protester contre ce qu'ils considèrent comme une "volonté de mainmise sur les médias", a constaté un journaliste de l'Associated Press.
De récentes nominations à la tête d'établissements médiatiques publics, y compris des rédacteurs en chef, ont soulevé un tollé auprès des organisations professionnelles.
Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a affiché sa "profonde déception" après ces décisions "arbitraires" prises "sans concertation préalable avec les structures professionnelles spécialisées".
Il a mis en garde contre "les graves incidences sur la profession" que ces nominations risquent d'engendrer, accusant certains responsables désignés d'avoir été "des serviteurs dévoués sous le régime despotique de Ben Ali et d'autres d'être impliqués dans des affaires de corruption".
De son côté, l'Instance nationale pour la réforme de l'information et de la communication (INRIC) a "vivement dénoncé" ces nouvelles nominations qui sont "en contradiction avec le processus de transition qui rompt avec l'information publique inféodée pour passer à une information publique, démocratique, pluraliste et indépendante".
Selon l'INRIC, les décisions annoncées "sont diamétralement opposées aux pratiques en vigueur dans les démocraties" et consacrent "un retour à l'exercice du contrôle et de la censure et à la soumission au diktat politique".
Figure de proue de la scène médiatique, Raouf Najjar, s'est joint à la manifestation pour "soutenir les journalistes tunisiens dans leur combat pour une presse libre et indépendante".
Il a accusé le pouvoir exécutif de "vouloir reprendre les mêmes habitudes que le régime déchu de Ben Ali pour mettre au pas les médias". "La mère des libertés est, à côté de la justice, bien celle de la presse qui représente la vraie démocratie", a-t-il martelé.
Le porte-parole du parti "Ettakatol", qui s'est joint à la coalition gouvernementale dirigée par le mouvement islamiste "Ennahdha", Mohamed Bennour, était également présent, considérant que "la liberté de la presse était effectivement menacée" avec ces "nominations verticales".
"En entrant dans la coalition, on a bien dit qu'il y avait des lignes rouges à ne pas franchir, en l'occurrence les principes démocratiques", a-t-il tenu à rappeler.
"Qui n'est pas inquiet ? La liberté de la presse, c'est le premier indicateur de la bonne santé d'une démocratie", a lancé la représentante de Reporters sans frontières (RSF), Olivia Gré.
"Il ne faut pas que la parenthèse de la liberté se referme très vite", a renchéri le journaliste Ridha Kéfi, patron du journal en ligne "Kapitalis".
Des sympathisants d'Ennahdha étaient venus haranguer les journalistes dans une tentative de casser leur mouvement de protestation en les accusant de "mercenaires".
Des manifestations de protestations ont également eu lieu à l'agence officielle TAP, à Sfax (sud) et Gafsa (centre) pour dénoncer "les tentatives de mise sous tutelle des médias".
Sous la pression, le gouvernement a dû lâcher du lest. Selon la présidente du SNJT, Néjiba Hamrouni, qui a été reçue au premier ministère en compagnie d'autres membres du bureau du syndicat, un accord a été convenu sur l'annulation des nominations récentes de certains rédacteurs en chef et d'un directeur de l'information à la chaîne nationale.
L'accord prévoit en outre d'instaurer le principe d'élection au sein des établissements médiatiques en ce qui concerne ces fonctions.
La présidente du SNJT a, par ailleurs, obtenu un engagement du gouvernement à ouvrir une enquête sur de récentes agressions de journalistes.
source tempsreel.nouvelobs
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Les journalistes à la Kasbah font face aux sympathisants d’Ennahdha
À l’appel du Syndicat national des journalistes tunisiens, un sit-in a eu lieu, aujourd’hui 9 janvier 2012, à la Place de La Kasbah devant le siège du Premier ministère. Des centaines de journalistes et de citoyens se sont rassemblés en réaction aux récentes nominations des directeurs, rédacteurs en chef ou encore directeur de l’information des médias publics, mais aussi pour condamner les agressions physiques à l’encontre des journalistes et des intimidations dont ils font l’objet.
Depuis que le gouvernement provisoire est en place, Ennahdha n’a eu de cesse de critiquer ces mêmes médias qu’ils jugent non conformes à la volonté du peuple. Leurs « menaces » sont rapidement mises à exécution et le chef du gouvernement provisoire a nommé, samedi 7 janvier 2011, les personnes qu’il juge aptes à diriger les médias publics, allant jusqu’à désigner les rédacteurs en chef.
Ces nominations ont été vivement condamnées par l’INRIC et le SNJT dont plusieurs représentants étaient présents lors de la manifestation. Nejiba Hamrouni, présidente du Syndicat des journalistes, s’est entretenue, dans la matinée, avec Abderrazak Kilani, ministre chargé des relations avec l’Assemblée Constituante (indépendant) et Ridha Kazdaghli, chargé de l’information et de la communication au sein du Premier ministère, et affirmé qu’un accord a été trouvé avec ses interlocuteurs pour revenir sur ces nominations. Cependant, Nejiba Hamrouni affirme que cette décision revient, au final, au Premier ministre provisoire à qui le conseiller et le ministre feront part de ces accords. Nejiba Hamrouni ajoute que « si cet accord n’était pas accepté par Hamadi Jebali, il devra en assumer les conséquences et que les mouvements de protestations se poursuivront ». La présidente du Syndicat précise en outre que, s’agissant des agressions des journalistes, le problème avait été relayé lors de l’entretien et qu’ils attendaient que des actions concrètes soient menées pour identifier les responsables de ces dépassements.
Ainsi, les manifestants ont scandé des slogans en faveur de l’indépendance des médias et contre la mainmise exercée par le pouvoir. « Nous voulons des médias publics, pas des médias gouvernementaux », pouvait-on lire sur les pancartes, ou encore « Nous voulons la renaissance (en arabe « ennahdha ») de la presse, pas la presse de la Renaissance (Ennahdha) ».
Par ailleurs, comme cela s’est produit lors du sit-in du Bardo, plusieurs dizaines de sympathisants d’Ennahdha se sont également réunis à la Kasbah pour une « contre-manifestation ». Une scène cocasse devenue une exception tunisienne, où à chaque manifestation contre le gouvernement, il faudra s’attendre à ce que les défenseurs du pouvoir viennent jouer les empêcheurs de tourner en rond, en guise d’allégeance à leurs gouvernants et à leur parti.
« C’est normal que Jebali nomme les directeurs des médias publics, affirment-ils, c’est la volonté du peuple » ! « De toute façon, tous les journalistes sont des vendus, et qui sont-ils eux pour venir manifester contre le gouvernement, cette manifestation ne respecte pas le résultat des urnes ». Ils affirment également que les médias, la Télévision tunisienne notamment, manquaient de respect au président de la République provisoire et aux membres du gouvernement, notamment pour le choix des sujets d’information. « Les actions du gouvernement sont le sujet essentiel et doivent passer avant tout le reste », crient certains, pendant que d’autres ne comprenaient pas comment on pouvait critiquer dans une télévision privée, le président de la République en l’appelant « Marzougui » au lieu de « Monsieur le président ». « Le président représente le peuple et tout le monde lui doit le respect, les journalistes devraient être obligés de l’appeler Monsieur le président », disent-ils.
Nous n’avons pas pu nous éterniser du côté des « contre manifestants », car la tension commençait légèrement à monter. « Pourquoi restez-vous ici ? Allez de votre côté ! Par qui vous êtes envoyés ? Vous n’avez pas honte de rester ici alors que vous n’êtes pas avec nous ? », nous interpellent-t-ils. « Vous êtes des sionistes, serviteurs de Ben Ali et je jure sur Dieu tout puissant que ces médias qui ne respectent pas la volonté du peuple n’existeront bientôt plus », achève l’un de nos « interlocuteurs ».
Le fait de voir des « contre-manifestants » essayer de casser les manifestations contre le principal parti au pouvoir (toujours quelques barbus et quelques jeunes qui chantent des chansons de stade de football) est-il spontané de la part des sympathisants d’Ennahdha ou commandité ? La question se pose…
par Monia Hamadi
source businessnews
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Le coup d’État médiatique de Hamadi Jebali
M. Jebali, nous sommes-nous trompés sur vos intentions ? Où voulez-vous mener la Tunisie ? Le coup d’Etat médiatique qui a lieu devant nos yeux est une grave erreur.
par Jamel Dridi
On aurait pu croire à une plaisanterie… de mauvais goût bien sûr. Il a fallu relire trois fois le laconique communiqué officiel sur les dernières nominations à la tête des médias publics tunisiens pour se rendre compte que ce n’en n’était pas une.
Mais de quoi s’agit-il au fait ?
Les méthodes du passé ressurgissent !
Un samedi ! Dans le dos de tout le monde, sans que l’Instance nationale pour la réforme de l’information et de la communication (Inric), composée de journalistes honnêtes qui travaillent depuis un an sur la question de la réforme du secteur de l’information, et sans que le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), ne soient informés, le gouvernement a décidé seul de la nomination de postes clefs dans le secteur de l’information publique.
Une question vient ici immédiatement à l’esprit. Pourquoi ce gouvernement, qui a dit qu’il allait rompre avec les méthodes du passé, qui a déclaré qu’il allait gérer ce dossier sensible de l’information en toute transparence, a-t-il décidé dans l’urgence, sans concertation, d’agir de la sorte ? N’y a-t-il pas d’autres urgences à gérer actuellement en Tunisie et pourquoi cette façon étonnante de faire ? Y a-t-il un agenda secret avec d’autres étapes ultérieures liberticides qui nécessitent, dans l’urgence, la mise en place de la première phase qui est le verrouillage de l’information ?
Pour que l’on comprenne bien la mesure de l’enjeu qui est en question, il s’agit ni plus ni moins de désigner ceux qui vont faire une grande partie de l’opinion publique tunisienne. Car l’opinion de beaucoup de Tunisiens se fait notamment par la voie des médias officiels comme le journal télévisé de la chaîne nationale.
Mais au-delà de la forme, il y a plus grave !
La véracité de l’information dépend de la crédibilité du journaliste.
Car au-delà de la forme, il y a le fond qui est choquant et vraiment révoltant. En effet, qui sont les heureux nominés de ces postes ?
Beaucoup des nominés faisaient partie de l’ancien système. Certains mêmes ont occupé des postes administratifs importants durant le règne de Ben Ali. Bien évidemment, cela est critiquable mais à la rigueur ça peut passer car beaucoup de journalistes ont exercé sous Ben Ali mais ne lui étaient pas favorables (et rares sont ceux qui n’ont pas travaillé sous Ben Ali).
Non le malaise pour ne pas dire l’insulte est ailleurs. Effectivement, parmi les nominés à ces postes clefs de l’information, certains sont allés très loin dans leur soutien à Ben Ali. Hélas pour eux, si les paroles s’envolent, les écrits restent. Et leur écrits sont nauséabonds, scandaleux !
Certains ont en effet rédigé, tenez-vous bien, des «articles déclarations d’amour» adressés à Ben Ali pour qu’il se représente aux élections de 2009 !
Et pour d’autres, ce fut encore pire. Alors que des journalistes se faisaient briser les jambes dans les caves du ministère de l’Intérieur pour avoir dit des vérités sur Ben Ali, d’autres ont offert «la Plume d’or à Ben Ali» pour son respect pour la liberté d’expression !
Incroyable mais vrai ! Comment penser que l’information qui sera transmise sera honnête quand ceux qui vont la transmettre n’ont pas hésité à trahir la déontologie journalistique et à travestir la réalité sous Ben Ali ?
M. Jebali, vous venez de commettre une grave erreur en nommant ces personnes. Peut-être vous a-t-on mal conseillé ? Vous ne pouvez pas tout savoir dans le détail. Peut-être ne vous a-t-on pas tout dit par rapport aux Cv de certaines des personnes ? Peut être avez-vous été victime d’un coup d’Etat médiatique ? Ce qui vient de se passer est tellement «énorme» que c’est incroyable à croire !
Une trahison de la révolution et de ceux qui vous ont fait confiance
Tout juste après le 14 janvier 2011, alors que beaucoup d’entre vous étaient en exil à l’étranger et qu’ils ne s’imaginaient sans doute pas qu’un an plus tard ils auraient le pouvoir entre leur main, beaucoup de journalistes, dont moi, ont défendu le fait que vous deviez, pour le bien de la démocratie et pour qu’une partie du peuple ne soit pas ignorée, participer au jeu politique.
Début février (et les écrits peuvent en témoigner), à contre-courant de tout ce qui s’écrivait et se disait parce que personne, même pas vous-mêmes (et je sais de quoi je parle) ne saviez que vous alliez avoir la place d’aujourd’hui, certains vous ont défendu risquant insultes et critiques…
Nous sommes-nous trompés à ce point ?
Rappelez-vous comment vous avanciez prudent, mi peureux mi surpris de la rapidité des événements. Vous ne devez pas insulter l’avenir et vous croire «arrivé».
Si vous avez incontestablement la légitimité des urnes, vous devez vous méfier des retournements de l’Histoire dus aux mécontentements populaires en raison du retour des mauvaises pratiques. Et ce type de nominations tant dans sa forme que sur le fond est une mauvaise pratique.
Le temps de la connivence entre les médias et le pouvoir est fini. Les Tunisiens sont dégoûtés de cela. Ils ne font plus confiance aux journalistes tunisiens qui les ont trahis tant de fois. Plus aucun journaliste ne peut, s’il veut que son pays avance, taire les zones d’ombres qui entourent le pouvoir.
Il est donc nécessaire de vous dire que par ces nominations vous vous êtes trompé et que vous participez à étendre les zones d’ombres.
Monsieur le Premier ministre, pour être fidèle aux valeurs que vous défendez et pour le bien de la Tunisie, vous devez d’urgence revenir sur ces nominations.
A défaut, vous sèmeriez dans l’esprit de beaucoup de Tunisiens un doute concernant la sincérité de vos objectifs et votre volonté à maintenir la Tunisie dans le chemin qui mène à la démocratie.
kapitalis