par Khaled Yacoub Oweis
AMMAN (Reuters) - Des affrontements ont éclaté dans la nuit entre des agents des services de renseignement militaires et des habitants de la ville de Daïr az Zour, dans l'est de la Syrie, après la mort de cinq manifestants, ont rapporté vendredi matin des témoins.
Daïr az Zour, ville d'environ 130.000 habitants située dans la vallée de l'Euphrate, a été le théâtre de grandes manifestations contre le régime du président Bachar Al-Assad ces dernières semaines.
Lancé dans le sillage des révolutions tunisienne et égyptienne, le mouvement de contestation a pris en Syrie une dimension religieuse en mettant aux prises des manifestants à majorité sunnite à la minorité alaouite (branche du chiisme) du chef de l'Etat.
Les services de renseignement syriens, chargés de la sécurité au sein de l'armée dont les cadres sont alaouites, ont lancé un vaste mouvement de répression dans l'Est à majorité sunnite, une région riche en pétrole limitrophe de l'Irak.
"Les combats se concentrent dans le nord-ouest de Daïr az Zour. Ils se poursuivent sans interruption depuis 02h00 heure locale (23h00 GMT jeudi)", a indiqué à Reuters un habitant qui a requis l'anonymat. "Les blindés sont entrés dans la ville dans la nuit mais des rumeurs circulent sur la défection d'unités de l'armée. L'électricité et le réseau de télécommunications ont été coupés", a-t-il ajouté.
Des habitants avaient fait état un peu plus tôt de tirs de tanks.
Les informations sur la situation en Syrie sont difficiles à vérifier depuis l'expulsion de la quasi-totalité des journalistes étrangers par les autorités syriennes.
"SABOTAGE" D'UN OLEODUC
La province de Daïr az Zour, où est produite la quasi-totalité des 380.000 barils de pétrole par jour de Syrie, compte parmi les plus pauvres du pays.
L'agence de presse officielle syrienne Sana rapporte de son côté, sans donner de précisions, que des "saboteurs" ont fait exploser un oléoduc dans les environs de Homs, métropole de plus d'un million d'habitants dans le centre-ouest du pays.
L'une des deux raffineries de pétrole que compte la Syrie se trouve à Homs, où ont eu lieu de grandes manifestations contre Assad et où le régime baassiste a déployé des chars pour mater la contestation.
Dimanche, le président syrien a remplacé le gouverneur de la province orientale de Daïr az Zour au surlendemain des plus grandes manifestations dans la région en faveur d'une démission du chef de l'Etat.
La semaine dernière, l'armée a encerclé la ville de Bou Kamal, située à l'est de la province de Daïr az Zour après la défection de 30 soldats dans le camp des manifestants, ont rapporté des habitants.
Selon un récent rapport de l'ONG Avaaz, 1.634 personnes ont été tuées par les forces de sécurité et 2.918 personnes sont portées diparues depuis le début du mouvement de répression. Près de 26.000 personnes ont été arrêtées et 12.617 sont toujours derrière les barreaux.
La Syrie impute les violences à des "groupes terroristes armés" et fait état de plus de 500 soldats et forces de sécurité tués.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, quelque 2.000 membres de la garde républicaine se sont déployés en divers points de Damas avant la grande prière du vendredi, selon des témoins.
A Madaya, près de la capitale syrienne, deux civils ont été tués au cours d'une opération des forces de sécurité, ont rapporté à Reuters des habitants.
Khaled Yacoub Oweis, Eric Faye et Marine Pennetier pour le service français