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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 19:32

Sous la présidence de Bourguiba, j’ai été torturé, emprisonné de nombreuses fois dont la dernière en 1972 (2 ans 3 mois) et enfin écarté de toutes les universités de la Tunisie … Toujours, pour des raisons politiques.  

Depuis (1975) je vis dans l’exil, en France puis au Canada… Tout ce parcours ne m’a jamais cependant conduit à mépriser ou à détester Bourguiba… Je pense encore que ce personnage fut une Lumière pour la Tunisie…

 Écouter maintenant son analyse du triptyque « savoir-citoyenneté-nationalisme »… C’est majestueux !     Noureddine Mansri Bourougaa 

 

Archives 

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... Et son point de vue sur la question palestienne
 
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5 septembre 2012 3 05 /09 /septembre /2012 04:51
 http://www.france24.com/fr/20120904-

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16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 02:52

La révolution tunisienne n'est pas achevée

 

«Si le processus révolutionnaire en Tunisie tâtonne et paraît se chercher encore, son succès dépendra incontestablement de la capacité des groupes politiques à résister à la force de la contre-révolution sous toutes ses formes, à mettre en place une dynamique de justice transitionnelle efficace et surtout à donner une traduction politique, sociale et économique claire à son premier axe programmatique: "Le peuple veut la chute du régime"» 


La révolution tunisienne semble être, une fois de plus, à un tournant décisif. Depuis l’élection de l’Assemblée constituante le 23 octobre dernier, le torchon brûle entre le parti islamiste Ennahda et une partie de l’opposition médiatisée sous le terme « démocrate », laquelle a refusé d’entrer au gouvernement. L’affrontement est monté d’un cran au début du mois d’avril 2012, à la suite de la répression féroce par les forces de l’ordre de manifestations réclamant le droit au travail et la liberté d’expression. Récemment, des réunions publiques initiées par des opposants au gouvernement ont été empêchées ou perturbées par des groupuscules dont on ignore l’identité exacte, sans que ce dernier ne prenne position. La réaction de la plupart des partis d’opposition ne s’est pas fait attendre : nous serions entrés dans la dictature théocratique et les libertés individuelles seraient plus que jamais en danger depuis l’arrivée au pouvoir de ceux dont le rêve, à peine refoulé, serait d’instaurer un « Tunistan ».


S’il faut légitimement s’indigner des menaces réelles proférées contre les libertés d’opinion et de croyance, et s’inquiéter du fait que celles-ci pèsent moins sur les courants dits « salafistes » que sur les « démocrates », il ne s’agit pas non plus de prendre des vessies pour des lanternes. Car à quoi assiste-t-on depuis la fuite de Ben Ali sinon à la reconduite, sous d’autres termes, de la même structure de débats et d’opposition entre « modernistes », « progressistes » et autres « démocrates » d’un côté, et « théocrates » et « islamistes » de l’autre ?

Ce clivage a atteint son apogée le 1er mai 2012 lors de la manifestation qui devait rappeler les enjeux sociaux et économiques de la révolution. Le slogan phare « Travail, liberté, dignité » a été noyé dans la cacophonie orchestrée d’un côté par les partisans d’Ennahda qui scandaient « Par notre âme et notre sang, nous te défendrons, ô gouvernement ! » (« Bil-rûh wa al-dam nifdîk yâ hukûma »), de l’autre par leurs pourfendeurs qui répliquaient « Que chute le gouvernement de la honte ! » (« Tasqut hukûmat al-‘âr »).


Cette lutte apparemment sans merci semble être l’unique jeu auquel islamistes et modernistes soient en mesure de jouer. Elle a pour effet de chasser les questions socio-économiques de l’agenda politique au profit d’une opposition fondamentalistes contre défenseurs de l’Etat moderne, et de reléguer ainsi la question sociale au second plan en bloquant le désir d’un grand nombre de Tunisiens de rompre avec le mode de gouvernement qu’ils connaissent depuis plus d’un demi-siècle.

 

En effet, les stratégies de l’opposition portée essentiellement par le Parti Républicain (émanation du Parti démocrate progressiste) et la Voie sociale et démocratique (recomposition de la gauche moderniste) mais aussi, en coulisses, par une partie des « fulûl » (résidus de l’ancien régime) se réclamant de l’héritage bourguibiste, ne visent aucunement la remise en question du régime politique ni du modèle économique qui prévalaient avant la révolution. La plupart des leaders de l’opposition au gouvernement actuel n’ont jamais rechigné à faire alliance avec l’ancien régime recomposé au soir du 14 janvier 2011 ni à prêter main forte aux trois gouvernements provisoires – non issus d’élections – conduits successivement par Mohammed Ghannouchi et Béji Caïd Essebssi.

 

Les exactions commises – ordonnées, devrait-on dire – par ces gouvernements à l’encontre des mouvements révolutionnaires ont provoqué, y compris après la fuite de l’ex-Président, des centaines de morts et de blessés, sans qu’aucun de ces opposants « démocrates » ne s’en émeuve ni ne s’en inquiète réellement. Leur appel à la « résistance », dans les circonstances d’aujourd’hui, sonne d’autant plus faux que les revendications populaires pour une véritable justice transitionnelle, l’assainissement des appareils judiciaire et sécuritaire, l’emploi des chômeurs et le développement des régions défavorisées n’ont trouvé jusqu’ici aucun écho dans leur programme pourtant « démocratique » et « progressiste ». Celui-ci se contente, bon an mal an, de revendiquer la liberté d’opinion, de croyance et d’entreprise pour les fractions supérieures des classes moyennes, dont une large partie se serait contentée des promesses de Ben Ali le 13 janvier 2011 aux dépens des revendications de justiceet d’équité socio-économiques portées par les groupes les plus défavorisés.


 

C’est dire que dans ces conditions les protestations de l’opposition, tout entières ordonnées autour de la liberté d’expression, ne gênent en rien l’actuel gouvernement provisoire issu de la coalition entre Ennahda, le Congrès pour la République et le Forum démocratique pour le travail et les libertés, vainqueurs aux élections. Au contraire, ces récriminations régulières permettent de détourner utilement l’attention médiatique de tractations autrement plus inquiétantes, comme la volonté à peine voilée de nombreux cadres islamistes de s’accaparer les rouages de l’Etat ou de donner un second souffle au modèle économique néolibéral qui s’accommode de la charité individuelle et rogne toujours plus sur la solidarité nationale.

C’est ainsi que l’enjeu de la justice transitionnelle, seule garantie de rupture véritable, a été sacrifié face à l’impératif de sceller des alliances avec certains symboles de l’ancien régime pour se maintenir au pouvoir. Vue sous cet angle, la stigmatisation mutuelle des deux camps a in fine pour effet délétère de contraindre les Tunisiens à réduire leur choix, comme sous Bourguiba et plus encore sous Ben Ali, entre dictature « islamiste » et dictature « éclairée », entre Charybde et Scylla. Les enjeux de la transition politique se réduiraient ainsi à une lutte entre les deux camps pour la conquête du pouvoir, laquelle conditionnerait la redistribution de la rente entre anciennes et nouvelles élites.

 

On comprend, dès lors, que la lutte à laquelle on assiste aujourd’hui n’est nullement celle qui, en Tunisie comme en France, nous est donnée à voir : elle réside plutôt entre les tenants d’un ancien régime rénové, débarrassé de ses références les plus encombrantes, et les partisans d’une rupture franche et large avec les fondements et les pratiques d’un pouvoir dont les Tunisiens ne veulent plus. Sa caractéristique est qu’elle traverse les partis d’opposition tout autant que les partis au pouvoir : ces derniers sont divisés entre d’un côté un courant autoritaire et partisan du « retour à l’ordre », y compris en s’alliant avec les anciens du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, ex-parti-Etat au pouvoir), et de l’autre un courant favorable à la rupture radicale avec l’ancien régime et le jugement de ses figures tutélaires.

Cette tension est d’autant plus accentuée que les benalistes reconvertis récemment à la démocratie tentent d’achever leur refondation, drapés qu’ils sont de la légitimité historique (« Bourguiba, libérateur de la femme et bâtisseur de la nation »), à défaut de pouvoir revendiquer une légitimité électorale. Détenteurs des compétences d’Etat, mais surtout de baronnies solidement établies dans les ministères-clés – Intérieur, Justice et Finances en tête –, ils sont tentés de faire chanter islamistes et démocrates pour monnayer leur retour sur la scène politique.

 

L’issue des prochaines semaines et des prochains mois est donc moins dans les mains de ceux qui agitent, d’un côté comme de l’autre, le perpétuel « chiffon vert » – la crainte de l’islamisme radical –, que dans celles, plus agiles et plus efficaces, des tenants du retour à l’ordre ancien. Le peuple tunisien reste à tout le moins l’otage de ces stratégies politiques d’un temps dépassé que la révolution du 17 Décembre 2010 a largement invalidées.

La contestation tous azimuts à laquelle on assiste, portée notamment par les diplômés chômeurs et les familles des martyrs et des blessés de la révolution, remet au centre de la vie politique les premières victimes de ce régime qu’il s’agit de faire tomber.

Si le processus révolutionnaire en Tunisie tâtonne et paraît se chercher encore, son succès dépendra incontestablement de la capacité des groupes politiques à résister à la force de la contre-révolution sous toutes ses formes, à mettre en place une dynamique de justice transitionnelle efficace et surtout à donner une traduction politique, sociale et économique claire à son premier axe programmatique : « Le peuple veut la chute du régime » (« Al-sha‘b yurîd isqât al-nidhâm »). mediapart

 

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En quoi Rached Ghannouchi est un homme dangereux


L’un des résultats les plus absurdes de la révolution du 14 janvier 2011, c’est l’émergence sur la scène politique tunisienne d’un personnage atypique, le président du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi.

 

Cet homme n’a pas fait grand-chose pour la chute de la dictature et se comporte depuis son retour d’exil comme le sauveur du peuple tunisien et le bienfaiteur de l’humanité. La folie des grandeurs dont il semble être atteint se lit dans ses déclarations farfelues du genre: «Le prochain congrès d’Ennahdha constituera un tournant non seulement dans l’histoire de la Tunisie, mais aussi dans l’histoire de l’humanité».


Embrassade et salamalecs entre les deux cheikhs pro-qataris.

 

Cette affirmation nous amène à poser une grave question: ‘‘Si’’ Rached a-t-il perdu totalement les pédales au point de considérer que le congrès d’un parti pratiquement inconnu à l’étranger et sans grande influence en Tunisie avant les élections du 23 octobre dernier constituera «un tournant dans l’histoire de l’humanité»? La réponse ne souffre aucun doute. Le type est atteint d’une intense folie des grandeurs et son état nécessite un traitement d’urgence.

 

Des choix politiques désastreux

 

Qu’a fait Ghannouchi pour son pays depuis son entrée en politique en tant que dirigeant du Mouvement de la tendance islamique (Mti), devenu plus tard Ennahdha ou la Renaissance? Il a grandement contribué aux crises politiques aiguës qu’a connues la Tunisie aux dernières années de Bourguiba en décidant de prendre le pouvoir par la force au risque d’engager le pays dans une guerre civile. Abdelfattah Mourou, qui le connaît très bien pour avoir été l’un des fondateurs et le père spirituel d’Ennahdha, lui fait assumer la responsabilité de l’emprisonnement de milliers de militants par ses choix politiques désastreux.

En effet, des milliers de citoyens ont subi un lavage de cerveau en règle par ‘‘Si’’ Rached qui, utilisant la religion comme tremplin, faisait miroiter à ceux qui ont bien voulu le suivre les délices du pouvoir de ce bas-monde et le paradis dans l’au-delà. Résultat: des années de prison, plus qu’il ne faut pour détruire la vie d’un homme, et aucune assurance de gagner l’au-delà.


Le baiser du cheikh Rached sur le front de son mentor.

Dans sa vie politique, Si Rached a accumulé et continue d’accumuler des quantités effrayantes d’hypocrisie. Il n’a pas toujours été un homme de principe. Rappelons-nous le ton mesquinement flagorneur qu’il avait adopté en 1988 pour parler de l’ancien président: «ma confiance est pour Dieu d’abord, et pour Ben Ali ensuite»

 

Oui, ‘‘Si’’ Rached n’a jamais été un homme de principe. Sans personnalité stable et encore moins d’amour propre, il mange à tous les râteliers. Il se sent à l’aise aussi bien avec les Américains que les Français, les Anglais, les Israéliens, les Saoudiens que les Qataris. Là où se trouve son intérêt personnel, il se forge un «un principe» et engage l’action que commande la situation.

 

Un fervent défenseur du wahhabisme

 

Les intérêts bassement matériels qu’il a avec les Saoudiens et les Qataris ont fait de lui un fervent défenseur du wahhabisme, une hérésie farouchement rejetée par nos ancêtres. Il est utile de rappeler ici qu’au début du XIXe siècle, vers 1810, les Wahhabites avaient tenté d’exporter leurs idées obscurantistes en Tunisie. Le Bey Hammouda Pacha avait chargé les autorités religieuses de la mosquée Zitouna de se prononcer sur la question wahhabite. Leur réponse était sans appel: non à cette doctrine. Celle-ci fut combattue, à cette époque, par les Ottomans jusqu’à son extinction. Son réveil, pour la deuxième fois, ne fut possible que grâce au couple formé par Abdelaziz Ibn Saoud, qui s’acoquina avec l’espion anglais, le colonel Thomas Edward Lawrence dit Lawrence d’Arabie, au début du XXe siècle. Leur objectif commun était de miner l’Etat ottoman d’une part, et d’autre part permettre à Ibn Saoud de reconquérir avec le glaive et le poignard le Najd (1902), royaume de ses ancêtres, et d’étendre ses conquêtes aux provinces voisines: Assir (1920), Chamman (1921) et le Hijaz (1925). L’Arabie Saoudite fut crée donc en 1925 avec la bannière wahhabite, après avoir chassé le roi Hussein de Médine.

 

Ghannouchi et l'émir du Qatar

 

De nos jours, l’Arabie Saoudite est une entité juridique privée, propriété de la famille Al Saoud; la famille Abdelwahhab bénéficiant de grands égards. C’est une monarchie absolue. Le roi cumule tous les pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires. Il exerce les fonctions de chef d’Etat et de Premier ministre. Le royaume ne dispose pas de budget public, mais est administré comme un domaine privé. Le roi n’a de compte à rendre à personne. Signalons l’accord d’alliance du roi Abdelaziz Ibn Saoud avec le président américain Franklin D. Roosevelt, en février 1945, qui aliéna les richesses saoudiennes dont le pétrole fut «offert» aux USA contre la protection du trône du roi.

 

Plus de deux siècles plus tard, ‘‘Si’’ Rached et ses «frères» salafistes tentent de reconvertir la Tunisie au courant religieux prôné par les prédicateurs saoudiens dont le plus célèbre est Ibn Baz.

 

‘‘Si’’ Rached est un inconditionnel de ce cheikh obtus. Il ne rate pas une occasion pour prier Dieu de lui accorder son Infinie Miséricorde, chose qu’il a obstinément refusée de faire pour Bourguiba décédé, malgré l’insistance du journaliste qui le lui demandait sur une chaîne de télévision.

 

Il convient de rappeler ici que la différence entre Bourguiba et Ibn Baz est à peu près équivalente à la différence entre l’obscurité et la lumière. Bourguiba a bâti l’Etat tunisien et a créé les conditions favorables pour que les Tunisiens, y compris ‘‘Si’’ Rached, puissent fréquenter l’école; quant à Ibn Baz, il traitait de mécréant quiconque ne pensait pas comme lui, que la terre était plate…


L'Ayatollah Ghannouchi par le peintre Hanafi.

 

La plupart des salafistes, «frères» de ‘‘Si’’ Rached et qui, selon lui, lui rappelaient sa jeunesse, sont des gens ignares qui ne savent ni ce qu’ils disent ni ce qu’ils font. On leur a présenté le wahhabisme comme la «voie juste» qui leur assure une place au paradis et ils ont fini par y croire sans réelle connaissance de ses fondements, compte tenu de leur niveau d’instruction à peu près nul.

 

La religion lui sert d’écran, son but est le pouvoir

 

Ce n’est pas le cas de ‘‘Si’’ Rached. Ce dirigeant islamiste, bien qu'il ait écrit quelques livres, connaît les bases et les fondements du wahhabisme et ceux des autres rites. Mais sa culture est purement religieuse, et s’arrête aux écrits et aux dogmes hérités de Abou Houraira, Moslem et El Boukari…, une culture valable durant les siècles de ces grands théologiens, mais plus aujourd’hui. A notre époque on peut comprendre l’islam bien mieux que nos ancêtres parce que les diverses disciplines scientifiques nous donnent un éclairage nouveau et adaptable à notre société actuelle.

 

Que connait ‘‘Si’’ Rached de l’astronomie, de la physique, de l’électronique, des sciences humaines, du droit, des finances… pour pouvoir se prévaloir d’introduire la renaissance de l’islam au sens moderne et non celui de l’obscurantisme et du banditisme au nom de la religion où il veut nous plonger et la monocratie où il voudrait nous amener! La religion lui sert d’écran; son but est le pouvoir. Il crée des problèmes mineurs et puérils pour détourner l’attention du Tunisien et instaurer un climat d’insécurité et de panique, et gagner du temps. La renaissance se fait non dans des caboches vides et les livres de ‘‘Si’’ Rached, mais dans les laboratoires les plus performants et des esprits les plus éclairés.

 

La compromission du chef d’Ennahdha avec le wahhabisme n’est sûrement pas basée sur un engagement de principe, mais sur la même motivation bassement matérielle que celle des prédicateurs qui défilent dans notre pays et qui, à l’instar de Wajdi Ghanim, viennent semer la discorde en s’attaquant à la femme tunisienne et en traitant de mécréants les démocrates.

 

Le dernier d’entre eux à fouler le sol tunisien est Youssef Qaradhaoui, un Egyptien qui a quitté son pays vers le Golfe non pas pour prêcher la bonne parole, mais pour s’enrichir. Et il s’est enrichi grâce aux relations privilégiées qu’il a pu tisser avec la famille régnante à Qatar et qui a mis à sa disposition Al-Jazira, une chaîne très influente auprès des téléspectateurs arabes. Atteint d’une sénilité avancée, c’est une girouette qui ânonne ce que ses maîtres américano-israélo-qataris lui dictent en faisant taire sa conscience et sa raison.

 

Un musulman n’incite jamais les peuples à la haine, ni à la violence et encore moins au meurtre. Pourtant, Qaradhaoui a su franchir le rubican lors des soulèvements populaires en Libye et en Syrie. Un cheikh ne prêche que la fraternité, le respect mutuel et la paix. Dans la sourate ‘‘La table servie’’ (V.2) il est énoncé : «Aidez-vous plutôt les uns et les autres à faire le bien, à vous rendre plus pieux envers le Seigneur, et non à commettre le mal et perpétrer l’iniquité! Et craignez Dieu».

 

L’accueil extraordinaire que lui a fait ‘‘Si’’ Rached en dit long sur l’intimité qui lie les deux hommes. Le chef d’Ennahdha a mobilisé les cadres – on se demande de quel droit il peut disposer des fonctionnaires de l’Etat – et les militants de son parti pour aller accueillir à l’aéroport le prédicateur le plus catholique du monde arabe. Même les membres nahdhaouis de l’Assemblée constituante, qui n’ont pas encore trouvé un moment pour écrire ne serait-ce qu’un article de la Constitution que le peuple attend depuis des mois, ont trouvé tout de même le temps d’aller en masse souhaiter la bienvenue à Qaradhaoui et contempler avec tendresse le baiser que leur chef a posé sur le front de son mentor comme s’il était un héros.


Rached Ghannouchi, Calife ou Ayatollah, par le peintre Hanafi.

 

Et de fait, Qaradhaoui s’est proclamé héros puisqu’il a affirmé le plus sérieusement du monde que les révolutions arabes étaient sorties de sa djellaba… Sans doute a-t-il oublié qu’en 2009, il était venu en Tunisie, mais cette fois c’était pour s’acoquiner avec le régime pourri de Ben Ali qu’il a traité carrément de «protecteur de l’islam».

 

Oubliant les flagorneries du prédicateur cathodique envers le dictateur, ‘‘Si’’ Rached était plus loin encore en affirmant sans ciller que la «la révolution tunisienne était sortie des aisselles de Qaradhaoui». Une affirmation nauséabonde et irrespectueuse du peuple tunisien qui voit sa glorieuse révolution réduite par le chef d’Ennahdha à une odeur malsaine dégagée par les aisselles de Youssef Qaradhaoui.

 

Dans les années 1980-90, Si Rached était dangereux pour les jeunes tunisiens qui, par milliers, avaient connu la prison et la torture suite à des choix politiques irréfléchis. Aujourd’hui, il s’avère plus dangereux encore, car il risque de provoquer non pas le malheur de milliers de Tunisiens, mais de millions.

 

L’Etat tunisien: un butin de guerre d’Ennahdha

 

A n’en pas douter, il joue le rôle de «guide» et exerce une influence indiscutable sur le gouvernement et sur tous les membres nahdhaouis de l’Assemblée constituante pour qui l’Etat tunisien n’est rien d’autre qu’un butin à partager entre les «gagnants». Il a le dernier mot sur la nomination des ministres et des hauts responsables et trace la politique à suivre. C’est lui qui tire les ficelles de ses «frères» salafistes qu’il lâche quand il veut contre ceux qu’il estime être les ennemis d’Ennahdha, et leur intime ordre de se terrer quand il estime que le rapport de forces est en leur défaveur et qu’ils risquent d’être écrasés, comme ce fut le cas le 1er mai où aucun barbu ne s’était approché de l’Avenue Bourguiba.

 

C’est encore ‘‘Si’’ Rached qui est derrière la politique des deux poids et deux mesures qui consiste pour les forces de l’ordre à regarder ailleurs quand les salafistes saccagent, agressent les artistes, les universitaires, les journalistes, rendent la vie des étudiants de l’université de la Manouba infernale, confisquent les mosquées, etc., mais ces mêmes forces de l’ordre sévissent quand de simples citoyens manifestent contre la politique d’Ennahdha.

 

Une telle politique risque de conduire le pays vers la guerre civile et si, à Dieu ne plaise, une telle éventualité se produise, c’est ‘‘Si’’ Rached qui en sera le premier responsable. Et c’est dans ce sens que l’on est en droit de dire que cet homme est dangereux, qu’il faut absolument le raisonner avant qu’il ne fasse subir aujourd’hui au pays le désastre qu’il a fait subir à son parti dans les années 1980-90.

 

Actuellement ce parti serait entré en transaction avec les grandes sociétés et les riches hommes d’affaires pour les racketter en contrepartie du blanchiment des dossiers concernant leur corruption du temps de Ben Ali. Les chiffres, en millions de dinars, seraient, dit-on, conséquents. Il est à craindre que ces pénalités ne seraient pas versées aux caisses de l’Etat, mais à celles du parti au pouvoir; lequel pourrait alors mener à bien les prochaines élections et ainsi pouvoir monnayer ou acheter les voix de la frange de la population la plus fragile et la plus nombreuse, à savoir les démunis, les illettrés, les chômeurs…  exactement le même scénario adopté lors du vote du 23 octobre dernier.


Le Guide suprême sur un nuage...

 

Le plan de ‘‘Si Rached’’ comporte cependant le germe de l’échec. Un tsunami déferlera sur les Nahdhaouis pour les balayer à jamais.

 

Avec le parti Ennahdha, il n’y aura plus de république, plus d’Etat, plus d’autorité légale… mais une autocratie. Ce n’est pas la renaissance, mais la décadence! Voulez-vous un exemple. En voici: le 22 avril, on annonce la levée des scellés des anciens locaux de la Zitouna et son prochain rétablissement. C’est un fait qui paraît banal, mais qui renferme de multiples poisons. La reprise des cours aura lieu très prochainement avec la séparation des sexes d’une part et d’autre part le programme de l’enseignement teinté du courant salafiste d’Ibn Taymiya (mort en 1328) ne sera pas visé par le ministère de l’Education et celui de l’Enseignement supérieur. Ainsi l’Etat perd son contrôle sur l’enseignement religieux.

 

Le dernier verset de la sourate “Les Poètes’’ se termine par cette terrible semonce: «Ceux qui commettent l’iniquité sauront bientôt quel funeste volte-face sera le leur».

 

* Ingénieur en détection électromagnétique (radar), breveté de l’Ecole d’Etat Major de Paris. Auteur de ‘‘Ben Ali le ripou’’ et ‘‘Eclairage sur les recoins sombres de l’ère bourguibienne’’.    

Par Béchir Turki, kapitalis

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6 mars 2012 2 06 /03 /mars /2012 07:11

A propos de « Frère Tariq », de Caroline Fourest

 

par Alain Gérard 

 

Entre ignorance, mensonges et amateurisme journalistique, le livre encensé par Bernard Henri-Lévy est loin de « clore le débat »...

 

Ainsi donc, le débat serait clos. Car le livre « s’il est lu, devrait, en bonne logique, mettre un terme à une polémique que seules la confusion et l’ignorance ont pu entretenir aussi longtemps ». Bernard-Henri Lévy, dans une tribune du Point du 28 octobre 2004, salue l’ouvrage de Caroline Fourest, Frère Tariq, sur Tariq Ramadan. Que Bernard-Henri Lévy, auteur de chez Grasset, qui prospère grâce à son réseau de connivences, salue sur une pleine page une auteure de chez Grasset n’étonnera que ceux qui ont encore quelques illusions sur le « grand intellectuel ». En tous les cas, une chose est sûre, BHL n’a pas lu le livre dont il parle, car s’il l’avait lu de manière approfondie, comme le nécessite un commentaire si élogieux, il aurait pu voir que cet ouvrage est un résumé d’amateurisme journalistique et de mensonges ordinaires, que ne relie qu’un ingrédient, la haine, la haine des Autres, une haine au moins que Caroline Fourest partage avec BHL.

Il faudrait un long travail, fastidieux, pour recenser les mensonges et les approximations du livre de Fourest. Sous une forme souple de chroniques (numérotées), au fil de la plume, nous tenterons de donner un aperçu de la « bonne foi » de l’auteure.

 

 

CHRONIQUE 1

Mensonge ordinaire

Comment le terme islamophobie a été introduit en France ? Dans son livre, Fourest revient dans un long développement sur la transmission du terme « islamophobie » (pages 354 et suivantes) : « Début 1997, Gordon Conway fait paraître le rapport dans lequel l’association préconise 60 moyens de lutter contre l’islamophobie. Il est vivement critiqué, dès sa sortie, et par les journalistes progressistes et par les musulmans progressistes. En France, il est passé inaperçu sauf dans les pages du Monde diplomatique, où il est salué par Tariq Ramadan. Grâce à lui, ce mot vient de traverser la Manche et va rapidement gagner les cercles islamistes aussi bien que les cercles progressistes. »(p. 356). Cette accusation avait déjà été formulée par Fourest et Vienner dans Tirs croisés. On avait déjà démontré qu’elle était mensongère, rien n’y fait. Alors, précisons encore une fois : c’est Soheib Bencheikh, « mufti de Marseille » et porte-parole de l’islam « modéré » qui a popularisé ce concept en France dès 1997 (lire, par exemple, sa déclaration, au Monde diplomatique, juillet 1997) ; il y consacre même un chapitre de son livre Marianne et le Prophète. Selon la base du Monde, le terme n’a été utilisé que deux fois par le quotidien entre 1987 et le 11-Septembre : la première fois en 1994 par Emile Mallet, directeur de la revue Passages, peu soupçonnable d’être un agent de l’intégrisme ; la seconde fois dans un compte-rendu d’un colloque à Stockholm, en février 2001 (lire Alain Gresh, L’Islam, la République et le monde, Fayard, pages 41 et 42) 
Caroline Fourest ne l’ignore évidemment pas, puisque cette critique avait déjà été faite à son précédent livre. Mais, évidemment, le reconnaître reviendrait à « diminuer » le rôle de Ramadan, ce qui est contraire à son objectif, mais conforme à la vérité. Mais Fourest s’intéresse-t-elle à la vérité ?

 

Amateurisme journalistique

La règle première de tout travail d’investigation est de « recouper » les informations, d’entendre les différents points de vue. Intronisée par son éditeur de « spécialiste de l’intégrisme » – ce qui ne veut rien dire mais ne mange pas de pain et donne une aura de « sérieux » –, Fourest est au-dessus de ces considérations. Un seul son de cloche lui suffit, surtout s’il conforte ses a priori. Elle revient ainsi longuement sur l’histoire de la Commission « islam et laïcité » et sa « liquidation » par la Ligue de l’enseignement. A l’époque, en 2000, Jacqueline Costa-Lascoux, présidente de la Ligue de l’enseignement, décide d’en finir avec cette commission, qui serait trop influencée par Tariq Ramadan. Fourest mène un entretien avec Jacqueline Costa-Lascoux qui lui donne son interprétation. Mais la « spécialiste de l’intégrisme » a-t-elle essayé de joindre les autres protagonistes de la commission ? Ceux de la Ligue de l’enseignement qui ne partageaient pas le point de vue de la présidente ? Non. Ceux qui, à la Ligue, ont été les piliers de la commission sont qualifiés de marxistes et de mystiques ; les autres protagonistes aussi. Le sous-chapitre se termine par cette déclaration de Costa-Lascoux à Tubiana, président de la Ligue des droits de l’homme (qui a accepté de reprendre le parrainage de la commission avec Le Monde diplomatique) : « OK. On te refile la patate chaude, mais je te préviens, il (sic ! la patate ? Ramadan ?) coûte plus cher qu’une danseuse. » et Fourest ajoute : « Ce n’est pas un problème. Alain Gresh, au nom du Monde diplomatique, s’engage à parrainer la commission. » Une « danseuse » ? De l’argent dilapidé ? Cela aurait mérité une enquête. 

 
Mais Caroline Fourest n’a pas besoin de vérifier. Si elle l’avait fait, elle aurait su que la commission « islam et laïcité » fonctionne avec un budget minimum et sur du travail militant (voici une tâche pour une journaliste d’investigation : trouver le montant du budget).


 

CHRONIQUE 2

Nous avons écrit, lors de notre précédente chronique, que le travail de Caroline Fourest était un mélange d’amateurisme journalistique et de mensonges ordinaires, que relie l’ingrédient de la haine. Nous avions oublié de souligner un autre aspect, l’ignorance pure et simple de cette « spécialiste de l’intégrisme ».

 

Ignorance

Caroline Fourest explique ainsi que Saïd Ramadan, le père de Tariq et l’un des dirigeants des Frères musulmans, s’est réfugié en Arabie saoudite. En 1962, selon elle, il supervise la création de la Ligue islamique mondiale. Celle-ci est encouragée que les Etats-Unis comptent sur l’Arabie saoudite « pour combattre le Pacte de Bagdad conclu entre Nasser et les Soviétiques » (p. 73).

Que d’âneries ! Le pacte de Bagdad est un pacte suscité par la Grande-Bretagne et les Etats-Unis contre l’Union soviétique en 1955. Le roi d’Irak en est une des chevilles ouvrières. Mais il est renversé en… 1958 et le pacte perd alors l’essentiel de sa substance.

D’autre part, elle affirme la parenté entre l’idéologie des Frères et celle de l’Arabie saoudite. Si l’Arabie saoudite a accueilli à bras ouverts, dans les années 1950, les Frères musulmans en exil, c’était bien sûr pour lutter contre le communisme et le nationalisme arabe. Mais c’était surtout parce que l’idéologie du royaume, le wahhabisme, était bien incapable de le faire : c’était une doctrine de « soumission » au souverain, une doctrine apolitique. La hiérarchie wahhabite était bien incapable de répondre aux arguments de Nasser et à la contestation, elle avait besoin des Frères pour cela. La fusion entre le wahhabisme et l’idéologie développée par les Frères allait donner naissance à une pensée beaucoup plus radicale, qui marquera les années 1970 et suivantes. Mais on ne peut demander à Caroline Fourest de distinguer ces « subtilités ».

 

Mensonge et amateurisme

De longues pages concernent le procès intenté par Tariq Ramadan contre Lyon Mag et Antoine Sfeir. Elle y note le rôle d’Alain Gresh, aux côtés de Tariq Ramadan dans cette affaire. Mais elle n’a pris ses informations qu’à Lyon Mag et chez Antoine Sfeir, donnant leur version, mais ne cherchant ni à contacter l’avocat de Ramadan, ni Ramadan lui-même, ni Alain Gresh. Comme ce parti pris ne suffit pas, elle déforme le texte du jugement, qui condamne Lyon Mag mais « blanchit » Sfeir, qui, selon elle, « est reconnu comme ayant tenu des propos conformes à une certaine vérité. Le verdict est très dur pour Ramadan. Dans son jugement du 22 mai 2003, la cour d’appel de Lyon estime que les discours de prédicateurs comme Tariq Ramadan “peuvent exercer une influence sur les jeunes islamistes et constituer un facteur incitatif pouvant les conduire à rejoindre les partisans d’actions violentes“. » (p. 419).

Or le jugement ne dit pas du tout cela, mais simplement « qu’il ressort seulement des propos d’Antoine Sfeir que les discours de la partie civile [c’est-à-dire Tariq Ramadan]peuvent exercer une influence sur les jeunes islamistes et constituer un facteur incitatif pouvant les conduire à rejoindre les partisans d’actions violentes » En ayant coupé la première partie de la phrase, elle attribue au tribunal ce qui est une simple citation de Sfeir.

En revanche, sur le fond. l’arrêt du 22 mai 2003 dit textuellement ceci : « Attendu que laisser entendre que, par ses discours Tariq Ramdan peut porter une responsabilité, peut-être morale, en faisant naître dans certains esprits une vocation terroriste ou en confortant d’autres dans leur résolution à suivre une telle ligne de conduite, correspond à l’expression naturelle et admissible dans une démocratie, d’une critique des prises de positions publiques de la partie civile sur des sujets et des faits de société ». 

 
Ainsi la cour dit simplement que le propos de Sfeir entre dans le cadre d’une critique légitime, mais n’avalise nullement ces propos.. Qu’importe la vérité à Caroline Fourest.


 

La Croisade de Caroline Fourest

Article paru dans la revue Hommes et Libertés, mars-avril 2005.

« Un jour, parodiant un spécialiste allemand d’histoire littéraire, il avait écrit : “Heine était tout à fait dénué de talent. Mais ce juif était un tel mystificateur qu’il avait écrit plus de cent poèmes excellents, uniquement pour faire croire aux Allemands crédules et naïfs qu’il savait faire des vers” . » [1]

Tariq Ramadan est un homme dangereux. Comme Heine, ce juif qui essayait de faire croire aux Allemands crédules qu’il écrivait de beaux poèmes, Tariq Ramadan cherche à convaincre les Français naïfs que les musulmans peuvent être des citoyens européens comme les autres. Heureusement, une chevalière blanche a détecté tous les mensonges de ce petit-fils du fondateur des Frères musulmans. Dans un livre dense, Frère Tariq, elle met au jour le caractère fourbe du personnage, dont le prénom même aurait dû nous alerter : Tariq, écrit-elle, « fait écho au nom de Tariq Ibn Zyad, le premier conquérant musulman à avoir foulé la terre chrétienne d’Espagne » (p. 79). Et elle ajoute : « Peut-on croire sérieusement que [ses parents] (…) ont choisi le prénom de leur fils par hasard ? Cela paraît peu probable quand on sait à quel point le chemin de chaque membre de cette famille est tracé d’avance. » Les prénoms des frères et sœurs de Tariq (Aymen, Bilal, Yasser, Hani, Arwa) leur fixent sans aucun doute un destin, mais l’auteure n’a pas le temps de nous préciser lequel. En revanche, le fait qu’un grand nombre de garçons musulmans se prénomment Mohammed, le prénom du prophète de l’islam, constitue une preuve indiscutable de revanchisme du monde islamique qui veut partir à la conquête de l’Occident. Et ces musulmans visent en premier lieu « nos » femmes. Caroline Fourest révèle ainsi que la femme de Ramadan est une catholique convertie à l’islam : « En islam, précise-t-elle, les hommes sont encouragés à répandre la foi en prenant pour épouses des femmes issues des deux autres confessions monothéistes » (p. 80).

D’autre part, l’auteure dévoile les multiples complicités dont Ramadan dispose à l’extrême gauche. Ainsi de Pierre Tévanian, animateur du site Les Mots sont importants,« un allié objectif idéal ». Caroline Fourest a découvert qu’un des textes de Tévanian, « le féminisme à visage inhumain », avait été reproduit sur le site de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) (p. 367). Il est vrai que Pierre Tévanian, comble de sa duplicité, prétend que ce texte a été reproduit sans son accord et qu’il a été retiré à la suite d’une protestation de l’auteur [2] . Mais Caroline Fourest ne se laisse pas prendre à ces dénégations. Elle sait détecter le Mal, même quand il est invisible. Et surtout que l’on n’aille pas lui reprocher la reproduction de ses propres textes sur des sites d’extrême droite ou de Campus Watch, un site maccarthyste animé par Daniel Pipes aux Etats-Unis et qui dénonce tous les universitaires considérés comme trop critiques à l’égard d’Israël : Caroline Fourest est insoupçonnable, elle lutte contre l’intégrisme.

« La complicité d’Alain Gresh » (p. 328), rédacteur en chef du Monde diplomatique, n’est plus à démontrer. Tout le monde le sait, il a ouvert à Ramadan les colonnes du mensuel qui est devenu « le journal du prédicateur, toujours prêt à relayer ses concepts, à lui donner la parole » (p. 333). Bien sûr, Tariq Ramadan n’a écrit dans Le Monde diplomatique que deux fois, en avril 1998 et en juin 2000… Mais cela ne peut affaiblir la démonstration de l’auteure qui, de plus, a découvert que Le Monde diplomatique était responsable de l’usage du terme islamophobie en France. Ce terme, dit-elle, serait passé « inaperçu, sauf dans les pages du Monde diplomatique, où il est salué par Tariq Ramadan. Grâce à lui, ce mot vient de traverser la Manche et va rapidement gagner les cercles islamistes aussi bien que les cercles progressistes » (p. 356). 

 
Là, on se permettra une légère critique de notre « spécialiste de l’intégrisme ». Avant même Le Monde diplomatique et Tariq Ramadan, Soheib Bencheikh, mufti de Marseille, considéré comme un porte-parole de l’islam « modéré », qui a le premier popularisé ce concept d’islamophobie en France – c’est même le titre d’un chapitre de Marianne et le Prophète [3] , dans lequel il écrit que l’islam suscite en France « un sentiment de rejet quasi unanime, implicite dans les discours, et assez catégorique dans l’imaginaire collectif des Français ». Nul doute que dans un prochain ouvrage, Caroline Fourest dénoncera Soheib Bencheikh…

Courageuse, Caroline Fourest ne se plie pas aux règles surannées du journalisme traditionnel, comme celle de recouper ses informations. N’oublions pas que nous sommes en croisade, et comme l’expliquait un théologien chrétien, Guibert de Nogent, au début du XIIe siècle à propos de Mahomet : « Et celui qui discuterait de la fausseté ou de la vérité des faits perdrait son temps ; car l’on ne doit prêter son attention qu’à l’importance d’un tel maître, qui fut l’inspirateur de tant de forfaits si tristement fameux. On ne court aucun risque à mal chanter d’un homme dont la malignité surpasse de loin tout ce qu’on dira de plus mauvais. » 

 
Armée de cette vision, Caroline Fourest ne s’embarrasse ni des détails ni des faits. Elle consacre de longues pages au procès intenté par Tariq Ramadan contre Lyon Mag et Antoine Sfeir. Reprenant la version de ce dernier, elle cite le verdict du tribunal. Celui-ci condamne Lyon Mag et « blanchit » Sfeir ; et Fourest d’expliquer : « Le verdict est très dur pour Ramadan. Dans son jugement du 22 mai 2003, la cour d’appel de Lyon estime que les discours de prédicateurs comme Tariq Ramadan “peuvent exercer une influence sur les jeunes islamistes et constituer un facteur incitatif pouvant les conduire à rejoindre les partisans d’actions violentes” » (p. 419). 

 
Certes, le jugement ne dit pas du tout cela, mais simplement qu’il ressort « des propos d’Antoine Sfeir que les discours de la partie civile [c’est-à-dire Tariq Ramadan] peuvent exercer une influence sur les jeunes islamistes et constituer un facteur incitatif pouvant les conduire à rejoindre les partisans d’actions violentes ». En ayant coupé la première partie de la phrase, elle attribue au tribunal ce qui est une simple citation de Sfeir. Qu’importe, Ramadan est coupable. 

 
Et qu’importe le texte de l’arrêt du 22 mai 2003, qui dit textuellement : « Attendu que laisser entendre que, par ses discours, Tariq Ramdan peut porter une responsabilité, peut-être morale, en faisant naître dans certains esprits une vocation terroriste ou en confortant d’autres dans leur résolution à suivre une telle ligne de conduite, correspond à l’expression naturelle et admissible dans une démocratie, d’une critique des prises de positions publiques de la partie civile sur des sujets et des faits de société . » » [4]. Ainsi la cour prétend que le propos de Sfeir entre dans le cadre d’une critique légitime, mais n’avalise nullement ces propos, ce qui est sans doute une preuve de collusion des magistrats avec les islamistes et l’une des raisons pour lesquelles Caroline Fourest « oublie » de citer ce passage.

 

Musulman ou citoyen ?

Dans le chapitre intitulé « Musulman et citoyen, mais musulman d’abord ! », Caroline Fourest fait part d’une trouvaille majeure : Tariq Ramadan appellerait à respecter les constitutions européennes à condition qu’elles ne s’opposent pas à un principe islamique. Elle affirme que, dans un premier temps, « il semble marteler le même refrain que dans ses livres : “Comme résident de ce pays ou comme citoyen, je respecte la Constitution. C’est un principe islamique.” Mais une précision de taille vient donner un tout autre sens à cette déclaration d’intention. Il précise en effet qu’il faut respecter la Constitution et la loi à partir du moment où “tout ce qui dans ce pays, d’un point de vue social, culturel et économique et légal, ne s’oppose pas à un principe islamique (…) devient islamique”. Ce complément d’information est évidemment décisif. Jusqu’ici on pouvait comprendre que l’appartenance citoyenne et l’appartenance religieuse n’étaient pas incompatibles, mais l’on se demandait encore qui devait l’emporter en cas de conflit. La réponse de Tariq Ramadan est claire : un musulman respecte les lois d’un pays tant que ce cadre ne s’oppose pas à un principe islamique ! Toujours dans cette cassette, il insiste : “Tout ce qui dans la culture dans laquelle nous vivons ne s’oppose pas à l’islam, on peut le prendre.” Ce qui exclut le reste » (pp. 222-223). 

 
Cette accusation, et c’est son intérêt, a été largement reprise aussi bien par Philippe Bernard dans Le Monde que par Bernard Cassen dans une tribune de Politis. Elle serait la preuve à la fois du double langage du prédicateur et du fait qu’il veut « islamiser l’Occident ». On sera reconnaissant à notre investigatrice d’avoir, dans les milliers de pages écrites par Ramadan, dans les dizaines d’heures de conférences données par lui, trouvé une citation, une seule, qui épaule ses thèses : c’est cela l’investigation, trouver une aiguille dans une botte de foin. Ramadan cache bien son jeu, mais rien n’échappe à l’Inquisition. 

 
Tariq Ramadan, dans cette conférence « en direct » dénoncée par Fourest, y explique, dans un style parlé, que les musulmans connaissent mal le pays dans lequel ils vivent et qu’il faut qu’ils connaissent l’environnement dans lequel ils vivent. Il affirme aux gens auxquels il s’adresse qu’ils sont intégrés, qu’ils font partie de la culture française, et il ajoute (le texte est reproduit ci-après intégralement, y compris les approximations d’expression) : « [t]out ce qui en France, dans la culture française, dans la société française, dans l’économie française, dans la législation française, à partir du moment où j’ai considéré une chose et il faut être clair là-dessus, comme résident de ce pays ou comme citoyen, je respecte la Constitution, c’est un principe islamique, je respecte la Constitution, j’ai un accord un contrat moral avec le pays dans lequel je suis. Donc, je respecte cette Constitution. A partir du moment où je respecte ce cadre-là, tout ce qui dans ce pays d’un point de vue social, culturel, économique et légal ne s’oppose pas à un principe islamique ça devient islamique. » Certains pourraient comprendre la phrase « à partir du moment où je respecte ce cadre-là » comme une affirmation claire du respect de la constitution, mais Caroline Fourest ne s’y trompe pas : ce que Ramadan pense est le contraire de ce qu’il dit… La journaliste Mona Chollet (qui essaie aussi de tromper son monde en critiquant Ramadan) conclut ainsi son analyse du livre de Caroline Fourest : « On envie Caroline Fourest de vivre dans un monde aussi idyllique : à la lire, s’il n’y avait pas la menace islamique, tout irait bien en France. Page 246, elle concède quand même du bout des lèvres que, parmi les musulmans, “certains sont victimes de l’exclusion économique, sociale et raciste”. Page 357, elle mentionne un “contexte de regain de racisme antimusulman”. Ce qui fait, en tout et pour tout, trois lignes sur 425 pages. Et cela, c’est impardonnable . » [5] Il n’y a rien à ajouter.

 

[1] Manès Sperber, Et le buisson devint cendre, Odile Jacob, 1990, p. 351.

[2] Pierre Tevanian, « Sœur Caroline est de retour », 25 octobre 2004, le site Les Mots sont importants.

[3] Soheib Bencheikh, Marianne et le Prophète, Grasset, 1998, p. 171

[4] Lire Alain Gérard, Politis, 25 novembre 2004

[5] Mona Chollet, « Tariq Ramadan, Caroline Fourest et l’islamisation de la France », www.inventaire-invention.com

source islamlaicite

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27 février 2012 1 27 /02 /février /2012 03:52
Tariq Ramadan : les Etats-Unis misent tout sur la Tunisie
Tariq Ramadan, islamologue et universitaire suisse, est de passage en Tunisie pour promouvoir son dernier livre sur le « Printemps arabe ». Lors d’une conférence de presse, hier 25 février 2012, il est revenu sur son analyse des révolutions arabes, qu’il préfère appeler « des soulèvements » et déclaré qu’il ne s’agissait pas là d’un réel printemps arabe, car l’exemple tunisien, pour lequel les observateurs étrangers disent être optimistes, n’a pas été transposé sur les autres pays arabes. « Les Etats-Unis ne sont bien sûr pas étrangers à ces soulèvements populaires et pour le monde occidental, le monde arabe est un jeu d’échec dans lequel il s’agit de bien placer ses pions. C’est pour cela que les Etats-Unis aujourd’hui misent tout sur la Tunisie et sur la réussite démocratique de ce pays, comme exemple à suivre, car il est le seul à être sur la bonne voie, à condition d’être vigilant et de faire les bons choix. Dans les autres pays qui ont connu un renversement du pouvoir, d’autres éléments entrent en jeu et ils sont victimes de multiples manipulations, ce qui tend à les faire régresser plus qu’avancer. C’est pour cela que l’on ne peut pas parler d’effet domino, ni de printemps arabe, la Tunisie fait, pour le moment, figure d’exception ». 


À la Villa-Didon, un des hôtels les plus branchés de la banlieue nord, vue sur mer, un ciel bleu et un soleil de plomb, Tariq Ramadan saura se faire attendre, le temps de remplir convenablement la salle transformée en salle de conférence. Une visite éclair de deux jours, et un emploi du temps de ministre, Tariq Ramadan n’aura pas beaucoup de temps à accorder aux journalistes, il doit aller débattre entre intellectuels tunisiens à quelques mètres de là, à Beit El Hikma et surtout rencontrer le président provisoire de la République, toujours dans les environs, pour « lui poser des questions ». 

Tariq Ramadan est connu en France pour être une personnalité controversée. Les intellectuels français ayant du mal à le cerner ou à comprendre ses prises de positions, trop occupés qu’ils sont à être enfermés dans un prisme occidental primaire, ne trouveront rien de mieux que de critiquer un supposé « double discours », ou de le comparer à certains membres de sa famille, affiliés à la mouvance des Frères musulmans en Egypte, mouvance islamiste à laquelle Tariq Ramadan a toujours nié son appartenance, malgré le lourd héritage laissé par son grand-père, Hassan El Banna, fondateur du mouvement. 

Tariq Ramadan ne ratera bien sûr pas l’occasion de faire référence à ces critiques. Citant Jean Daniel ou Bernard Henri Lévy, il critiquera le manque de perception de ces intellectuels qui, selon lui, ne parviennent pas à assimiler les particularités des cultures arabo-musulmanes. Mais Tariq Ramadan est en Tunisie, devant un parterre de journalistes tunisiens, venus écouter ce qu’il a à dire de la situation tunisienne, et, accessoirement, poser des questions. 

« Cela fait 23 ans que je ne suis pas venu en Tunisie », déclare-t-il dans son discours, car selon l’avis de ses conseillers, « un accident est vite arrivé » et sa présence ne semblait pas être désirée du temps de Ben Ali. Malgré cette longue absence et une visite de deux jours, dans les quartiers les plus favorisés de la capitale, avec des invités triés sur le volet à chacune de ses apparitions, Tariq Ramadan sait de quoi il parle. Il renvoie les laïcs et les islamistes dos à dos, critiquant les premiers pour leur référent «occidentalisé» et leur vision faussée de la laïcité, et les seconds pour leurs difficultés à accepter la différence et la diversité culturelle, mettant le doigt sur l’importance de l’économie et de l’éducation, pour la réussite du processus démocratique. 

Concernant la question de la culture, et répondant à la question d’un journaliste lui demandant les raisons pour lesquelles il s’exprime en français, Tariq Ramadan fera justement référence à cette intolérance propre à «certains islamistes», qui, selon lui, doivent apprendre à accepter la différence et la richesse culturelle. « Il faut gérer la pluralité plutôt que rejeter les spécificités et les singularités, à partir d’un référentiel qu’on ne rejette pas (NDLR : faisant référence à l’appartenance à une culture arabo-musulmane de la Tunisie), mais qui ne doit pas être exclusif », affirme-t-il. Sur son choix de s’exprimer en français, M. Ramadan rétorquera qu’il est préférable d’additionner les cultures et d’en assimiler le plus grand nombre possible que de les soustraire les unes aux autres : « Le fait de savoir parler en arabe et en français est préférable au fait de ne savoir parler qu’une seule langue et d’entreprendre un rejet des autres cultures, démarche assimilable à un repli identitaire », souligne-t-il en substance. En outre, abordant le sujet de l’art et de son rejet par certains obscurantistes, Tariq Ramadan affirme que l’Islam favorise la création artistique, donnant une importance à la notion du «beau». 

Tariq Ramadan poursuit sur l’islamisme, affirmant qu’il n’y a pas qu’un seul type d’islamisme et que le mouvement Ennahdha, y compris, est traversé par plusieurs courants. Celui qui défend les valeurs de la démocratie et respecte la pluralité doit être accepté par les laïcs. Abordant cette question de la laïcité, Tariq Ramadan affirme que si on prend en compte la vraie définition de la laïcité, elle ne s’oppose en rien avec l’Islam, au contraire, car dans la religion musulmane il n’y a pas de clergé. Le mot laïcité pouvant avoir une connotation négative, M. Ramadan préfèrera le terme d’Etat civil à celui d’Etat laïc, un Etat dont le but n’est pas d’annihiler l’identité religieuse d’une population, mais qui ne s’inspire pas non plus du religieux pour gérer les spécificités propres aux individus, tout en permettant la pratique religieuse. 


Tariq Ramadan critiquera également les laïcs tunisiens qu’il juge enfermés dans une conception de la laïcité que l’on connaît en France et qui est loin d’être un exemple à suivre, affirmant par ailleurs que la polarisation entre laïcs et islamistes n’est pas souhaitable, et qu’il faut laisser de côté ses émotions pour agir rationnellement et permettre le dialogue entre les différents courants. Il fera à ce sujet référence à la polémique créée par la visite de Wajdi Ghenim, affirmant que si le discours de Wajdi Ghenim est à condamner, notamment sur l’excision, il faut ignorer ce type de polémique stérile qui participe à la polarisation et à la détérioration du dialogue. 
Enfin, concernant les salafistes, Tariq Ramadan déplore leur manque de recul et de discernement, affirmant que « l’Islam n’est pas : tu écoutes et tu répètes, l’Islam est : tu écoutes et tu questionnes », d’où la nécessité de l’éducation, de la culture et de l’encouragement de l’esprit critique qui fait encore défaut. 

 Monia Ben Hamadi   businessnews

 

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111

قدر تونس النجاح لأنها أمل الشعوب في التحول من مفعول بها إلى فاعل 


 

أمريكا لها يد في التغييرات بالمنطقة العربية والإسلامية.. ونيتها في التغيير أعلنت عنها منذ سنة 2003ـ

 

 طارق رمضان من مشاهير المفكّرين العرب والمسلمين بل هو من مشاهير المفكرين المعاصرين في العالم حتى وإن كان معروفا من خلال موقع "اليوتوب" على الإنترنيت...

 

ومن خلال التلفزيونات الغربية أكثر منه من خلال كتبه وذلك وفق ما أكده بنفسه مساء أمس بتونس العاصمة أثناء لقاء إعلامي جمعه بعدد من ممثلي الصحف والمحطات الإذاعية والتلفزيونية بالبلاد. طارق رمضان المفكر الإسلامي المعروف بقوة الحجة وبالقدرة على مقارعة الآراء هو أستاذ الدراسات الإسلامية المعاصرة بجامعة أكسفورد وهو مثقف من أصل مصري (حفيد مؤسس جماعة الإخوان المسلمين بمصر حسن البنّا ) ويحمل الجنسية السويسرية     وهو معروف بالخصوص بأبحاثه حول الإسلام والعصر ومكانة الإسلام في المجتمعات الغربية. حل المفكر ضيفا ببلادنا بدعوة من مكتبة الكتاب بتونس ليومين وهي زيارة يقول أنها تأتي بعد 23 سنة لأن بلده ( سويسرا نبهته إلى أنه قد يكون غير مرغوب فيه في تونس التي كان يحكمها بن علي ). لكنه وإن لم يحل بيننا بعد الثورة مباشرة شدد على أنه ومنذ عام تقريبا يلاحظ ما يجري في تونس باهتمام بالغ خاصة وأن كتابه الجديد"الإسلام والصحوة العربية" الذي صدر في نوفمبر من العام الماضي عن دار شاتلي للنشر مستلهم مما يعرف اليوم بالربيع العربي وأنه خص تونس بالجزء الأول من الكتاب حيث حيّى الانتفاضة التونسية وباركها.

 

شمل برنامج الزيارة في يومها الأول (أمس السبت) وبالإضافة إلى اللقاء الإعلامي مائدة مستديرة بالمجمع التونسي بيت الحكمة حول"التعايش بين الإسلاميين والعلمانيين"بحضور عدد هام من المفكرين من تونس نذكر من بينهم الأساتذة هشام جعيط وحمادي الرديسي ويوسف الصديق وصلاح الدين الجورشي وغيرهم ومقابلة مع رئيس الجمهورية المنصف المرزوقي الذي قال عنه أنه عرفه في فرنسا قبل أن يعتلي هذا المنصب وعرف فيه المدافع عن حقوق الإنسان والمتشيع للديمقراطية. أما برنامج اليوم الثاني للزيارة ( اليوم الأحد ) فيضم بالخصوص ندوة يتولى فيها تقديم كتابه الجديد بقصر المؤتمرات بالعاصمة ويكون اللقاء مشفوعا بحوار مع المؤلف يديره الأستاذ محمد الطالبي.

تناول اللقاء الإعلامي الذي انطلق حوالي الثانية والنصف بعد الزوال بالأساس مواقف المفكر الإسلامي مما يعرف بالربيع العربي وأساسا من الثورة التونسية.

لا يحبذ طارق رمضان الحديث عن ربيع عربي لأنه مثلما أكد على ذلك في مختلف المناسبات وباستثناء تونس التي حدث فيها التغيير السياسي بأخف الأضرار فإن ما حدث في مصر واليمن وليبيا وما يحدث في سوريا لا يمكن أن نسميه ربيعا.  لا يحبذ طارق رمضان كذلك الحديث عن ثورات عربية والمصطلح الذي يراه يعبر عما حدث في تونس بالضبط هوالانتفاضة.

فخ القطبين.. الإسلامي والعلماني

ويشدد في هذا الخصوص على أن الحديث عن انتفاضة في تونس لا يقلل من أهمية الحدث الكبير الذي عاشته بلادنا في 14 جانفي 2011 والذي جعلها محط أنظار العالم بل كل ما في الأمر أنه يسعى لوضع  الخطاب في سياقه الصحيح. فإن كانت بلادنا حسب قوله قد تخلصت من الرئيس بن علي بسرعة فإن عملية البناء ستطول وستكون صعبة.

ومن هذا المنطلق فإن طارق رمضان يدعو التونسيين لتجنب التوجه الذي يحصر الحوار بين قطبين أي بين الإسلاميين والعلمانيين لأن ذلك من شأنه أن يلهي المجتمع التونسي عن طرح الأسئلة الجوهرية والحاسمة كي تتحقق ثورة حقيقية في البلاد. الثورة بالنسبة له يجب أن تكون سياسية واقتصادية وثقافية واجتماعية. هناك أسئلة حسب رأيه أهم     بكثير من حصر الحوار في لباس المرأة المسلمة ومن بينها أي اقتصاد نريد وأي تربية نخص بها أولادنا ومتى نكف عن إرسال أبنائنا إلى الخارج ليحصّلوا تعليما جامعيا عصريا إلخ...

المفكر الإسلامي طارق رمضان يعتبر أن الإنتفاضات العربية التي بدأت في تونس ثم توسّعت إلى عدد آخر من البلدان العربية تمت بشكل تلقائي لكن نيّة التّغيير في المنطقة عند القوى الخارجية وعلى رأسها الولايات المتحدة موجودة من قبل وقد عبرت هذه القوى عن رغبتها في ذلك منذ سنة 2003. من الخطير أن تكون لهذه القوى حسب نفس المتحدث نوايا في المنطقة لكن الأخطر من ذلك أن لا نعرف ماذا تريد هذه القوى في نهاية الأمر ومن هذا المنطلق فإنه يرى أن النموذج التونسي مهم جدا. إنها فرصتنا حسب رأيه كي نأخذ كتونسيين الأمور بأيدينا وأن نصبح فاعلين لا مفعول بنا. فإن كانت رغبة أمريكا مثلا في أن تتحكم في المنطقة العربية والإسلامية   بالدفع نحو التغيير على طريقتها أمر واقع فإن الوعي بذلك قد يقودنا في تونس مثلا إلى أن نمسك زمام الأمور بأنفسنا وأن نستثمر هذه الرغبة لصالحنا ولصالح المنطقة العربية والإسلامية لا لصالح القوى الكلاسيكية كأوروبا وأمريكا أو الفاعلين الجدد كالصين مثلا. 

الإسلام السياسي لم يندثر أبدا

وإذ ينفي المفكر العربي أن تكون الحركات الإسلامية وراء الثورات العربية  فإنه يرى أن وجودها اليوم في تونس وفي مصر مثلا دليل قاطع على أن عديد المنظرين والمحللين السياسيين في العالم من بينهم "جيل كيبيل " الذين تنبأوا بموت الإسلام السياسي كانوا بعيدين عن الحقيقة. الإسلام السياسي لم يندثر ابدا حسب طارق رمضان وهو يقول في هذا الشأن:" الإسلام السياسي كان معذبا ومهجرا واليوم فإنه موجود ويتصدر المشهد السياسي".  وفي تعليقه على الصراعات على الساحة السياسية في تونس اليوم يقول المفكر المصري أنه ليس من المنطقي أن ننازع الإسلاميين شرعيتهم وحقهم في ممارسة السلطة التي وصلوا إليها بشكل ديمقراطي وإن كان لابد من محاسبة فلتكن محاسبة على النتائج والإنجازات.

سئل طارق رمضان في عديد المرات خلال نفس اللقاء عن كيفية حسم الخلاف بين الإسلاميين والعلمانيين. الجواب بالنسبة له يتمثل في إقامة حوار جدي وغير سخيف وغير منفعل ويكون بعيدا عن الإبتذال وهو إن كان قد أعلن أنه ضد السلفيين الذين يرون أنفسهم مسلمين أكثر من غيرهم  فإنه يرى من جهة أخرى أن التعددية الثقافية في تونس وانفتاح التونسيين على الثقافة الغربية والفرنسية منها بالخصوص وإن كانت مصدرا للثراء الثقافي والحضاري فإن النخب التونسية مطالبة بأن تنزع من ذهنها فكرة محاولة إثارة اعجاب الفرنسيين.

الإشكال بالنسبة له يتمثل في وجود نخبة في تونس تحمل جواز سفر تونسي لكن عقلها فرنسي.  دعوة الرجل كانت صريحة إلى ضرورة أن تشعر النخب أن الإسلام لا يعني بالضرورة ان يتعارض مع الديمقراطية وهو يستدل على ذلك بالنموذج التركي وأن العلمانية لا تعني بالضرورة دائما الديمقراطية.

حياة السايب

 

source assabah
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27 janvier 2012 5 27 /01 /janvier /2012 07:59

 
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9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 09:49

par Mouna Alno-Nakhal

« Tout ce que je peux ajouter à tout ce que tu sais déjà, c’est que ces opposants soit disant pacifiques et qui étaient armés depuis le début sont passés aux actes terroristes : tous les jours, des gens sont assassinés à cause de leur confession ou de leur relation avec le pouvoir, des écoliers terrorisés pour les empêcher d’aller à l’école, les trains visés par des explosions et ça va crescendo » .

Tel est le message que j’ai reçu d’un ami d’Alep (le 3 octobre à 00.04 minutes). Je crois ce qu’il me dit ! Comme je crois qu’un nombre non négligeable de prétendus défenseurs des « droits de l’Homme », ou de journalistes et autres ONG, sont, consciemment ou à leur insu, complices de ce drame qui semble devoir être mené à son paroxysme, pour que l’OTAN puisse enfin jouir d’une « zone de responsabilité », une de plus !

Pour chacune de ces zones massacrées ou conquises - c’est selon - le même scénario cauchemardesque ! Nul besoin pour le commun des mortels d’être dans le secret des dieux ; il suffit de lire, de regarder et d’écouter.

Des preuves de ce que je me permets de mettre en doute ? Voici ma revue de presse. Elle est loin d’être exhaustive et ne fait que s’attarder sur deux articles récents.

 

« Syrie : la révolution s’arme et a besoin de l’OTAN », par Bernard Schalscha, La Règle du Jeu, 30 septembre 2011.

Le blog de Bernard Henri-Levy (BHL) « La règle du jeu » en appelle directement à l’OTAN. Mais cette fois-ci, Monsieur BHL s’est choisi un paratonnerre nommé« Bernard Schalscha ».

Allez à l’essentiel de ce qu’il vous dit : « Soyons clairs : en Syrie les jours de la révolution pacifique sont passés… Puisque les Nations unies ne peuvent donc pas se porter au secours du peuple syrien, la seule puissance capable de le faire est l’OTAN. L’idée a fait son chemin en Syrie. Nous la faisons nôtre. Et tant pis si elle est sacrilège pour les hérauts syriens de la fierté nationaliste arabe, que l’on entend d’ailleurs surtout depuis leur exil en Occident. Ceux-là sont prêts à se battre depuis l’étranger jusqu’au dernier révolutionnaire sur le terrain… Refuser l’ingérence étrangère, c’est délivrer un permis de massacrer. »

Et si, par malheur, vous n’étiez pas convaincus de son empathie pour cette entité qu’est censé être «  le peuple syrien », il vous invite à visionner une vidéo d’une tristesse infinie, que vous soyez neutre ou que vous ayez pris parti.

Qui est donc ce preux chevalier qui s’engage pour les hérauts de l’Occident contre ceux de l’Orient (ou l’inverse, je n’ai pas bien compris) reconnaissant que « sa » révolution est armée ? Oui, « sa » révolution ! Je ne me permettrais pas de vous le présenter autrement qu’il ne se décrit lui-même. 

 
- « SHALSHA BERNARD profite bien de la vie et de temps en temps écrit des articles » 
- « Interview de Bernard Schalscha du collectif urgence Darfour  »

Quant à son commanditaire, les vidéos ne manquent pas ! Certains y verront l’indécence ; d’autres, la provocation calculée de celui qui se trouve être du côté des plus forts.

 

Invité Elkrief : Bernard-Henri Levy, 4 juillet 2011.

Invité Ruth Elkrief : Bernard-Henri Levy, 20 avril 2011.


Ai- je le droit de dire tout haut ce que je pense tout bas ?

Citoyenne française, je crois en mon âme et conscience que je dois le dire.

- Le texte évoqué montre le «  rôle militaire » dévolu à certains «  médias sociaux ».

- Il montre aussi que les amis de BHL, si « désintéressés » dans le cas du Darfour, sont maintenant aux avant postes des sauveurs de la Syrie et s’impatientent, puisque « la couverture » de l’ONU n’est toujours pas tissée et le dialogue entre les syriens non encore définitivement exclu.

- Ces images édifiantes, d’où qu’elles viennent, sont utilisées pour convaincre ceux qui ne veulent pas d’intervention de l’OTAN, et ils sont nombreux à l’intérieur comme à l’extérieur de la Syrie !

- Après le Président Obama (prix Nobel de la paix) qui s’est passé du Congrès américain pour s’appuyer sur l’ONU, Monsieur BHL et ses amis comptent se passer de l’ONU pour s’appuyer sur l’OTAN.

 

Programme Télé / Arte/ Mardi prochain 11/10/2011 
Théma 
« Syrie : Permis de tuer » 
Le 11/10 à 20:40 sur Arte 

 

Résumé du programme TV en direct
Bravant les interdits, une journaliste a filmé la révolte syrienne et sa sanglante répression, qui aurait causé 2 200 morts. Un document exceptionnel suivi d’une excellente enquête sur la mainmise de la famille Assad sur le pays. 

 

Exclusif / « Une journaliste a filmé la répression en Syrie », par Marianne Dardard, lavie.fr, 27 septembre 2011. 
« Sofia Amara, 43 ans, est la première journaliste indépendante à avoir pu filmer - en août 2011 - la révolte du peuple syrien et sa sanglante répression. Son documentaire "Syrie, dans l’enfer de la répression", sera diffusé le 11 octobre à 20h40 sur Arte. Pour lavie.fr elle nous raconte son périple à haut risque. »

Madame Amara nous offre ici en avant-première les détails de son odyssée et une séquence vidéo, à laquelle une personne qui vit la réalité du terrain a déjà répondu. Il s’agit de Mère Agnès de la Croix qui n’a cessé depuis le début des « événements » en Syrie de mettre en garde contre les manipulations et la désinformation. Voici sa réponse : « Schizophrénie médiatique, l’interview de Sofia Amara », 1er octobre 2011.

 

Qui est donc cette journaliste qui a bravé tous les dangers ?

On apprend sur Google que c’est une femme qui sait se défendre, qui a déjà un titre de gloire, et un livre à paraître en novembre 2011 intitulé : « La révolution en kit » ! Sur Facebook, parmi la multitude de ses amis figure, depuis peu, une armée qui regrouperait des officiers syriens libres. Le lien est là, en tout cas à l’heure où je vous écris : كتيبة ضباط خالد بن الوليد (brigade Khaled Ben Al-Walid). Il suffit de le suivre. Il n’est pas nécessaire de comprendre l’Arabe pour consulter le mur photos où trône celle d’un certain Sheikh Adnan Aroor الفاضل عدنان العرعور « majestueusement salué et ardemment remercié pour l’éloge qu’il a daigné prodiguer à cette armée » entre autres ! Ce Sheikh déjà évoqué par Mère Agnès-Mariam de la Croix, vous parle. 
Ecoutez-le : 

 

Lisez aussi « LeMonde.fr » qui s’est décidé à ne plus rien nous cacher de ce qui fut « longtemps confiné à l’état de rumeur » ! (sic) 

 
« L’armée libre de Syrie veut armer la rébellion », blog.lemonde.fr, 27 septembre 2011. 
« La ville de Homs abrite la célèbre brigade Khaled Ben Al-Walid du bataillon des Officiers libres. "Nous sommes des officiers libres rejetant l’oppression du peuple et nous protégeons les innocents" … Ces déserteurs assurent pour le moment la protection des manifestants contre les opérations des forces de sécurité et des milices du régime. Ils ne disposent pas encore des capacités nécessaires pour mener de larges opérations. Toutefois, ils ont déjà quelques faits d’armes à leur actif. La première opération remonte au 20 juin... En protégeant une manifestation, ils ont tué au moins six membres des forces de sécurité. "Cela nous touche quand ils sont tués. Ils ne savent pas pourquoi ils se battent", confie Abou Omar. » (Paragraphe : HOMS, FOYER DE LA RÉVOLTE ARMÉE)

Je vous laisse lire et découvrir le dilemme auquel est confronté le peuple syrien et je m’arrête sur « la première opération remonte au 20 juin ». Qui a répondu à cet appel, encore présent sur sept sites web différents ? 

 
« Ce qui se passe en Syrie… - Témoignage d’un médecin syrien »

J’admets que l’on ne trouve que ce que l’on cherche, mais tous ces journalistes de la toile bénéficient, en principe, d’un service de veille d’autant plus précieux qu’on nous disait que les journalistes étaient interdits de séjour en Syrie ! Non ? Ce texte était clair et d’autres témoignages l’ont suivi, non moins crédibles que celui de Monsieur BHL et ses amis. On y apprenait qu’il y avait d’une part aspirations légitimes et manifestations pacifiques, d’autre part sédition et brigades armées. Et c’est maintenant qu’on commence à l’admettre. Pourquoi ? Parce que le mal est fait ? Parce qu’on ne pourrait plus trouver une solution politique, ni engager un dialogue vu le sang versé ? Je suis obligée d’arriver à cette conclusion pour la bonne raison que j’ai moi-même transféré ce lien à trois personnalités politiques. L’ont-elles reçu ?

Maintenant que les langues se délient, peut-on espérer voir les appels répétés des «  innocents » de toutes confessions, de Homs et d’ailleurs, portés par d’aussi gros titres que les appels à la honte du Journal «  Le Monde ». 

 
« Syrie : La situation des chrétiens à Homs - Le curé de Bab Sbah, à Homs, témoigne », 24 septembre 2011. 
Je souligne une phrase inaugurale de ce texte : « Je peux vous dire que l’épreuve renforce notre foi, nous unit entre chrétiens, et entre chrétiens et musulmans et nous détache des choses de ce monde… ».

Je dis « Le Monde » parce que ce journal de référence, qui par le passé a éveillé et nourri mon intérêt à la politique, a préféré traiter cette tragédie sous un angle religieux et moyenâgeux comme si la guerre des religions (traduisez la guerre civile) tardait à venir et par conséquent, la « guerre humanitaire » qu’il nous faut absolument cautionner sans avoir à nous poser de problèmes de conscience, individuellement d’abord, collectivement ensuite. Ne s’est-il pas permis de publier « un brulot communautariste totalement halluciné » (ce n’est pas de moi, mais les mots me paraissent justes) : 

 
« Honte aux chrétiens syriens ! », par Marie Mamarbachi-Seurat, Le Monde, 17 septembre 2011.

Je ne pouvais que répondre et je l’ai fait : 

 
« Droit de réponse à Marie Mammarbachi-Seurat qui jette l’opprobre sur ses coreligionnaires et patriarches les invitant à se taire ! », par Mouna Alno-Nakhal, 24 septembre 2011. 
(http://abonnes.lemonde.fr/idees/chronique/2011/09/25/droit-de-reponse-a-marie-mammarbachi-seurat-qui-jette-l-opprobre-sur-ses-coreligionnaires-et-patriarches-les-invitant-a-se-taire_1575474_3232.html)

Mais peu importe ma réponse, comparée à celles qui viennent de ceux qui vivent l’horreur, et qui l’ont vu venir, qu’ils soient chrétiens ou musulmans. 
- « Syrie : Les Chrétiens d’Orient redoutent la guerre civile - Mère Agnès-Mariam de la Croix répond à Madame Marie Mamarbachi Seurat », 25 septembre 2011. 
- « Lors des funérailles du fils du Grand Mufti de Syrie : “Pas de concessions ni de capitulations” », par Louis Denghien, InfoSyrie, 4 octobre 2011.

A votre avis, qui dit la vérité ?

J’entends déjà les « nous ne savions pas ! » de toutes les « personnes » qui regretteront sincèrement d’avoir ressenti de la fierté là où ils ont laissé semer la désolation, désinformés, manipulés, pris par le temps et les priorités de leur propre survie.


 
 

source : http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=26980

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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 20:54

Al-Jazeera, la chaîne d’information qatariote qui s’est imposée en 15 ans dans le monde arabe comme une source originale d’information, s’est soudainement engagée dans une vaste opération d’intoxication visant à renverser les régimes libyen et syrien par tous les moyens. Ce revirement, démontre Thierry Meyssan, n’est pas le fruit de la conjoncture, mais a été préparé de longue date par des personnalités qui ont su cacher leurs intérêts personnels au grand public. Révélations… 

Wadah Khanfar
Wadah Khanfar
La chaîne qatariote Al-Jazeera a annoncé la démission de son directeur général, Wadah Khanfar, et son remplacement par un membre de la famille royale, cheikh Hamad Ben Jassem Al-Thani, le 20 septembre 2011. 

Cheikh Hamad est un cadre de Qatargas. Il a travaillé pendant un an à Paris-La Défense au siège de Total. Il présidait par le passé le Conseil d’administration d’Al-Jazeera. 

Cette nouvelle est présentée dans la presse atlantiste de trois manières différentes : soit comme une démission forcée et une reprise en main de la chaîne par l’État, soit comme une vengeance de l’Autorité palestinienne après la diffusion des Palestinian Papers, soit enfin comme une conséquence des fuites de Wikileaks exposant certaines des connexions de M. Khanfar avec les États-Unis. 

Si toutes ces interprétations peuvent contenir une part de vérité elles masquent la raison principale : le rôle du Qatar dans la guerre contre la Libye. Ici, un retour en arrière est nécessaire. 

L’origine d’Al-Jazeera : une volonté de dialogue 

Al-Jazeera a été conçu par deux personnalités franco-israéliennes, les frères David et Jean Frydman, après l’assassinat de Yitzhak Rabin, dont ils étaient proches. Selon David Frydman [1], l’objectif était de créer un média où des Israéliens et des Arabes pourraient débattre librement, échanger des arguments, et apprendre à se connaître, alors que ceci était interdit par la situation de guerre et bloquait toute perspective de paix. 

Pour créer la chaîne, les frères Frydman bénéficièrent d’un concours de circonstances : la compagnie saoudienne Orbit avait conclu un accord avec la BBC pour créer un journal télévisé en arabe. Mais les exigences politiques de la monarchie absolue saoudienne se révélèrent vite incompatibles avec la liberté de travail des journalistes britanniques. L’accord fut résilié et la majorité des journalistes arabisants de la BBC se retrouvèrent au chômage. Ils furent donc récupérés pour fonder Al-Jazeera. 

Les frères Frydman tenaient à ce que leur télévision soit perçue comme une chaîne arabe. Ils parvinrent à convaincre le nouvel émir de Qatar, Hamid bin Khalifa al-Thani, qui, avec l’aide de Londres et de Washington, venait de renverser son père —accusé de sentiments pro-Iraniens—. Cheikh Hamad bin-Khalifa comprit rapidement les avantages qu’il pouvait tirer à se trouver au centre des discussions israélo-arabes, qui duraient depuis un demi-siècle déjà et s’annonçaient encore longues. Au passage, il autorisa l’ouverture à Doha d’un bureau du ministère israélien du Commerce, à défaut de pouvoir ouvrir une ambassade. Surtout, il vit l’intérêt pour le Qatar de concurrencer les riches médias saoudiens pan-arabes et de disposer d’un média qui critique tout le monde, sauf lui. 

Le montage financier initial prévoyait à la fois une mise de fonds des frères Frydman et un prêt de l’émir de 150 millions de dollars sur 5 ans. C’est le boycott des annonceurs organisé par l’Arabie saoudite et l’absence de revenus significatifs de la publicité qui a conduit à modifier le schéma initial. En définitive, l’émir est devenu le bailleur de fonds de la chaîne et donc son commanditaire. 

Des journalistes exemplaires 

Durant des années, l’audience d’Al-Jazeera a été tirée par son pluralisme interne. La chaîne s’enorgueillissait de laisser dire une chose et son contraire. Sa prétention n’était pas de dire la vérité, mais de la faire surgir du débat. Son émission phare, le talk show de l’iconoclaste Faisal al-Qassem, intitulé « L’Opinion contraire », se régalait à bousculer les préjugés. Chacun pouvait trouver des motifs de se réjouir de certains programmes et d’en déplorer d’autres. Peu importe, ce bouillonnement interne a eu raison du monolithisme de ses concurrents et a bouleversé le paysage audio-visuel arabe. 

Le rôle héroïque des reporters d’Al-Jazeera en Afghanistan et durant la troisième guerre du Golfe, en 2003, et leur travail exemplaire contrastant avec la propagande des chaînes satellitaires pro-US, transforma l’image de la chaîne d’une station polémique en média de référence. Ses journalistes payèrent au prix fort leur courage : George W. Bush hésita à bombarder les studio de Doha, mais fit assassiner Tareq Ayyoub [2], arrêter Tayseer Alouni [3] et incarcérer Sami el-Hajj à Guantanamo [4]. 

La réorganisation de 2005 

Cependant les meilleures choses ont une fin. En 2004-05, après le décès de David Frydman, l’émir décida de réorganiser complètement Al-Jazeera et de créer de nouveaux canaux, dont Al-Jazeera English, alors que le marché mondial se transformait et que tous les grands États se dotaient de chaînes d’information satellitaires. Il s’agissait clairement d’abandonner l’effervescence et les provocations du début, de capitaliser une audience atteignant désormais les 50 millions de téléspectateurs, pour se positionner comme un acteur du monde globalisé. 

Cheikh Hamad bin-Khalifa fit appel à un cabinet international qui lui avait dispensé une formation personnelle en communication. JTrack s’était spécialisé dans l’entraînement des leaders arabes et d’Asie du Sud-Est pour leur apprendre à parler le langage de Davos : comment donner aux Occidentaux l’image qu’ils ont envie de voir. Du Maroc à Singapour, JTrack a ainsi formé la plupart des responsables politiques soutenus par les États-Unis et Israël —souvent de simples fantoches héréditaires— pour en faire des personnalités médiatiquement respectables. L’important n’est pas qu’ils aient quelque chose à dire, mais qu’ils sachent manier la langue de bois globale. 

Toutefois, le Pdg de JTrack, ayant été appelé à de hautes fonctions gouvernementales en Afrique du Nord, il dût se retirer avant d’avoir achevé la transformation du Al-Jazeera Group. Il confia la suite des opérations à un ancien journaliste de Voice of America qui travaillait depuis plusieurs années déjà pour la chaîne qatariote et appartenait à la même confrérie musulmane que lui : Wadah Khanfar. 

À la fois professionnellement compétent et politiquement sûr, M. Khanfar s’attacha à donner une couleur idéologique à Al-Jazeera. Tout en donnant la parole à Mohamed Hassanein Heikal, l’ancien porte-parole de Nasser, il fit de cheikh Yusuf al-Qaradawi —qui avait été déchu de sa nationalité égyptienne par Nasser— le « conseiller spirituel » de la chaîne. 

Le virage de 2011 


C’est avec les révolutions en Afrique du Nord et dans la péninsule arabique que Wadah Khanfar a brutalement modifié la ligne éditoriale de sa rédaction. Le Groupe a joué un rôle central dans l’accréditation du mythe du « printemps arabe » : les peuples, avides de vivre à l’occidentale, se seraient soulevés pour renverser des dictateurs et adopter des démocraties parlementaires. Rien ne distinguerait les événements de Tunisie et d’Égypte, de ceux de Libye et de Syrie. Quant aux mouvements du Yémen et de Bahreïn, ils n’intéresseraient pas les téléspectateurs.

En réalité, les Anglo-Saxons se sont efforcés de surfer sur des révoltes populaires pour rejouer le vieil air du « printemps arabe » qu’ils avaient organisé dans les années 1920 pour s’emparer des anciennes provinces ottomanes et y installer des démocraties parlementaires fantoches sous contrôle mandataire. Al-Jazeera a donc accompagné les révoltes tunisienne et égyptienne pour écarter la tentation révolutionnaire et légitimer de nouveaux gouvernements favorables aux États-Unis et à Israël. En Égypte, il s’est même agi d’une véritable récupération au profit d’une seule composante de la contestation : les Frères musulmans, représentés par le prêcheur star de la chaîne… cheikh Yusuf al-Qaradawi. 

Indignés par cette nouvelle ligne éditoriale et par le recours de plus en plus fréquent au mensonge [5], certains journalistes comme Ghassan Ben Jedo claquent la porte. 

Qui tire les ficelles de l’info ?
 


Quoi qu’il en soit, il faut attendre l’épisode libyen pour que les masques tombent. En effet, le patron de JTrack et mentor de Wadah Kanfhar n’est autre que Mahmoud Jibril (le "J" de "JTrack", c’est "Jibril"). Ce manager aimable, brillant et creux, avait été conseillé à Mouammar Kadhafi par ses nouveaux amis états-uniens pour piloter l’ouverture économique de la Libye après la normalisation de ses relations diplomatiques. Sous le contrôle de Saif el-Islam Kadhafi, il avait été nommé à la fois ministre du Plan et directeur de l’Autorité de développement, devenant de facto le numéro 2 du gouvernement, et ayant autorité sur les autres ministres. Il mena au pas de charge la dérégulation de cette économie socialiste et la privatisation de ses entreprises publiques. 



Mahmoud Jibril avec son ami et partenaire en affaires Bernard-Henri Lévy, dans Tripoli conquise. 

À travers l’activité de formation de JTrack, Mahmoud Jibril avait noué des relations personnelles avec presque tous les dirigeants arabes et d’Asie du Sud-Est. Il disposait de bureaux à Bahreïn et à Singapour. M. Jibril avait aussi créé des sociétés de négoce, dont une chargée du commerce du bois de Malaisie et d’Australie avec son ami français Bernard-Henri Lévy. 

Mahmoud Jibril avait suivi ses premières études universitaires au Caire. Il y avait fait la connaissance de la fille d’un des ministres de Nasser et l’avait épousée. Il avait poursuivi ses études aux États-Unis, où il avait adopté les thèses libertariennes qu’il essaya d’introduire dans l’idéologie anarchiste d’el-Kadhafi. Surtout, M. Jibril avait rejoint la confrérie des Frères musulmans en Libye. C’est à ce titre qu’il avait placé les Frères Wadah Kanfhar et Yusuf al-Qaradawi à Al-Jazeera. 

Durant le premier semestre 2011, la chaîne qatariote est devenue l’instrument privilégié de la propagande pro-occidentale : elle a nié autant que possible l’aspect anti-impérialiste et anti-sioniste des révolutions arabes et a choisi dans chaque pays les protagonistes qu’elle soutenait et ceux qu’elle conspuait. Sans surprise, elle a soutenu le roi de Bahreïn —un élève de Mahmoud Jibril— qui faisait tirer sur la foule, tandis que cheikh al-Qaradawi appelait à l’antenne au Jihad contre el-Khadafi et el-Assad, accusés mensongèrement de massacrer leur propre peuple. 

M. Jibril étant devenu le Premier ministre du gouvernement rebelle libyen, le sommet de la mauvaise foi aura été atteint avec la construction dans des studios à Doha de répliques de la Place verte et de Bab el-Azizia où furent tournées de fausses images de l’entrée des « rebelles » pro-Us dans Tripoli. Que n’ai-je lu comme insultes lorsque j’ai annoncé cette manipulation dans les colonnes de Voltairenet.org ! Pourtant Al-Jazeera et Sky News diffusèrent ces fausses images le second jour de la bataille de Tripoli, semant le désarroi parmi la population libyenne. Ce ne fut en réalité que trois jours plus tard que les « rebelles » —presque exclusivement les Misrata— entrèrent dans Tripoli dévastée par les bombardements de l’OTAN. 

Il en va de même avec l’annonce par Al-Jazeera de l’arrestation de Saif el-Islam Kadhafi et de la confirmation de cette capture par le procureur de la Cour pénale internationale Luis Moreno-Ocampo. Je fus le premier, sur les ondes de Russia Today, à démentir cette intoxication. Et là encore, je fus l’objet de quolibets dans certains journaux jusqu’à ce que Saif el-Islam vienne réveiller en personne les journalistes enfermés au Rixos et les conduise sur la vraie place Bal el-Azizia. 

Interrogé sur ces mensonges par le canal arabe de France24, le président du Conseil national de transition (CNT), Mustafa Abdul Jalil revendiqua une ruse de guerre et se réjouit d’avoir ainsi accéléré la chute de la Jamahiriya. 

Quel avenir pour Al-Jazeera ? 

Le détournement d’Al-Jazeera en instrument de propagande pour la recolonisation de la Libye ne s’est pas fait à l’insu de l’émir de Qatar, mais sous sa houlette. C’est le Conseil de coopération du Golfe qui, le premier, a appelé une intervention armée en Libye. Le Qatar a été le premier membre arabe du Groupe de contact. Il a acheminé des armes pour les « rebelles » libyens, puis a envoyé son armée au sol, notamment lors de la bataille de Tripoli. En échange, il a obtenu le privilège de contrôler tout le commerce des hydrocarbures effectué au nom du Conseil national de transition. 

Il est encore trop pour savoir si la démission de Wadah Khanfar marque la fin de sa mission au Qatar, ou si elle annonce une volonté de la chaîne de retrouver la crédibilité qu’elle avait mis 15 ans à gagner et 6 mois à perdre. 



[1] Cf. entretiens avec l’auteur. 

[2] « La guerre contre Al-Jazeera », article de Dima Tareq Tahboub résumé dans notre ancienne rubrique « Tribunes et décryptages », Réseau Voltaire, 6 octobre 2003. 

[3] « La presse arabe dans la ligne de tir », Réseau Voltaire, 15 septembre 2003. 

[4] Voir notre dossier Sami el-Hajj. 

[5] Par exemple : « Al-Jazeera met en scène une manifestation monstre à Moscou contre Bachar el-Assad », Réseau Voltaire, 2 mai 2011. 

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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 06:41

Publié il y a cinq mois sur ce site, l’article d’Ignacio Ramonet sur les soulèvements arabes - et en particulier sur la situation en Libye – a suscité des critiques parfois vives dans quelques secteurs se réclamant, en Europe, de la gauche radicale. Il a également fait débat en Amérique latine, comme on a pu le constater lors d’un colloque récemment co-organisé par Mémoire des luttes à Buenos Aires, et dont les principales communications seront prochainement mises en ligne. Pierre Lévy, rédacteur en chef de Bastille République Nation nous a proposé un texte qui reprend à peu près tous les arguments avancés contre nos positions et celles d’autres secteurs progressistes qui ont condamné aussi bien la dictature sanglante du colonel Kadhafi qu’une intervention de l’OTAN sortant du cadre de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU. Nous publions ce texte auquel Ignacio Ramonet répond brièvement. Mémoire des luttes

 

Contre la banalisation et la normalisation de l’ingérence (Pierre Lévy)

 

En avril dernier, Ignacio Ramonet proposait dans ces colonnes un texte intitulé « Libye, le juste et l’injuste ». La guerre avait été lancée quelques semaines plus tôt, inaugurée par des appareils français qui, les premiers, eurent l’honneur de déverser leurs bombes sur Tripoli. Ce 19 mars, « une onde de fierté parcourt l’Elysée » rapportait alors Le Monde  [1]. A ce moment, les experts et commentateurs n’en doutaient pas : en quelques jours, quelques semaines au plus, le pays serait débarrassé du « tyran » grâce à au soulèvement populaire attendu, facilité par le coup de pouce aérien de la coalition, tout cela illuminé par la sage aura de Bernard-Henri Lévy.

 

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Dans son texte, Ignacio Ramonet prenait certes ses distances avec l’OTAN. Il n’en estimait pas moins, dès sa première phrase : « Les insurgés libyens méritent l’aide de tous les démocrates ». Dieu soit loué, certains démocrates n’ont pas lésiné sur l’aide : en cinq mois, plus de 15 000 sorties aériennes ont permis d’offrir quelques milliers de tonnes de bombes, sans parler des missiles dernière génération, des forces spéciales terrestres sous forme d’instructeurs – un cadeau en principe prohibé, mais quand on aime, on ne compte pas. Seule comptait l’issue : victoire Total.


Le jeu de mots est certes facile ; il est cependant inévitable, notamment depuis queLibération [2] a révélé la lettre aux termes de laquelle le Conseil national de transition (CNT) s’était engagé à accorder 35% des concessions du pays au groupe pétrolier « en échange » (c’est le terme employé) de l’engagement militaire français (un document qui a naturellement fait l’objet d’un démenti précipité du Quai d’Orsay). Noble cause que celle du combat pour la liberté des peuples. Au demeurant, cela n’a pas échappé à l’auteur, qui note, à la fin de son article : « L’odeur de pétrole de toute cette affaire empeste ».


Certes. Mais pour autant, il reprend à son compte l’approche d’ensemble des dirigeants occidentaux et des médias qui leur sont liés. En particulier le schéma qui analyse le soulèvement libyen comme partie prenante du « printemps arabe ». Or une telle approche globalisante fait fi de chaque réalité nationale. En l’espèce, elle induit même un contresens.


En Tunisie puis en Egypte, les mouvements populaires, qui n’étaient certes pas réductibles l’un à l’autre, ont cependant revêtu d’importants points communs. Sur le plan intérieur, la mobilisation a vu converger les classes populaires et ce qu’il est convenu d’appeler les « classes moyennes », dans un mouvement dont les exigences sociales étaient inséparables des objectifs démocratiques ; dans chacun de ces deux pays, les luttes et grèves ouvrières des dernières années – durement réprimées – ont constitué un terreau essentiel au développement du mouvement, le tout sur fond d’une pauvreté massive.


Sur le plan extérieur, Zine el-Abidine Ben Ali comme Hosni Moubarak étaient sans conteste des marionnettes du camp occidental, dont ils ont toujours été partie intégrante, tant géopolitiquement, économiquement, qu’idéologiquement.


Fort différente était la situation libyenne. Sur le plan social, tout d’abord : le pays était, de très loin, le plus avancé d’Afrique selon le critère de l’Indice de développement humain (IDH). Il est à cet égard saisissant de compulser les statistiques fournies par le PNUD [3], que cela concerne l’espérance de vie (74,5 ans – avant la guerre, s’entend), l’éradication de l’analphabétisme, la place des femmes, l’accès à la santé, à l’éducation. Les subventions au niveau de vie et à la protection sociale étaient très substantielles. Point n’est besoin de faire partie du fan-club de Mouammar Kadhafi pour rappeler cela.


Par ailleurs, de par son histoire, ce dernier peut difficilement être assimilé à ses deux anciens voisins. Certes, Ignacio Ramonet note avec raison que, depuis le tournant des années 2000, il impulsa un rapprochement progressif avec les Occidentaux. Dans la dernière période, ceux-ci lui déroulèrent le tapis rouge, business oblige. Ils ne l’ont cependant jamais considéré comme « faisant partie de la famille » : trop imprévisible, et surtout n’ayant pas abandonné un discours de tonalité « tiers-mondiste », en particulier au sein de l’Union africaine au sein de laquelle il jouait un rôle tout particulier.


Pour autant, les privatisations et libéralisations mises en route ces dernières années n’ont pas été sans conséquences en termes de classe : une certaine catégorie de la population s’est enrichie, parfois considérablement, en même temps qu’elle intégrait l’idéologie libérale. Une partie de ceux-là même à qui le « Guide » avait confié la « modernisation » du pays, et les contacts privilégiés avec la haute finance mondiale (et son arrière-plan universitaire, notamment aux Etats-Unis) en sont venus à estimer que, dans ce contexte, le dirigeant historique était plus un obstacle qu’un atout pour l’achèvement du processus. Une partie des classes moyennes et de la jeunesse aisée, particulièrement à Benghazi pour des raisons historiques, a donc constitué une base sociale à la rébellion – une rébellion qui fut, dès le début, armée, et non pas constituée de foules pacifiques.


Les innombrables reportages et entretiens avec la jeunesse « anti-Kadhafi » étaient à cet égard édifiants. Le Monde [4] citait ainsi ces jeunes femmes aisées qui criaient « pas de lait pour nos enfants, mais des armes pour nos frères ». Un slogan qui eût probablement stupéfié les manifestants égyptiens. Et qui illustre en tout cas l’absurdité d’une analyse globalisante.


Bref, une absence de revendications sociales, voire une exigence de « plus de liberté économique » ; des appels – pas systématiques, mais fréquents cependant, et qui se confirment aujourd’hui – à une application plus stricte de la « loi islamique » ; des chefs du CNT étroitement liés au monde des affaires occidental, voire formés par lui ; et un mouvement qui n’a pu l’emporter que par la grâce des bombardements otaniens – tout cela ne s’appelle pas précisément une révolution. Symboliquement, le « nouveau » drapeau libyen est l’ancien oriflamme de l’ex-roi Idris Ier, renversé en 1969. Dès lors, le terme qui vient à l’esprit serait plutôt une contre-révolution.


Si on retient cette hypothèse – ne serait-ce qu’au titre du débat – alors l’optique change quelque peu. Cela ne signifie certes pas que les insurgés décidés à liquider Mouammar Kadhafi soient tous des agents occidentaux : beaucoup sont certainement sincères. Mais nombres de Chouans aussi l’étaient, lors des guerres de Vendée. Nombre d’entre eux furent cependant massacrés – parfois aveuglément, mais à bon droit si l’on voulait sauver la jeune Révolution.


En matière de « massacres », du reste, il ne semble pas que les protégés des puissances alliées aient beaucoup à apprendre, c’est le moins qu’on puisse dire. Cela vaut en particulier pour les véritables pogroms qui se sont déroulés – et se déroulent peut-être toujours – à l’encontre des civils à peau noire. Présentés comme des « bavures » par les médias occidentaux faute d’avoir pu être totalement passés sous silence, il semble bien que leur ampleur dépasse très largement ce qui nous fut montré. Surtout, ils témoignent d’un racisme de classe, puisque, Libyens ou immigrés, les Noirs formaient les gros bataillons de ce qu’on pourrait appeler, au sens large, la classe ouvrière, peu en odeur de sainteté parmi les insurgés, en Cyrénaïque particulièrement.


Pour autant, la « protection des civils » n’est pas seulement un sommet d’hypocrisie de la part des dirigeants occidentaux. Elle constitue surtout le chausse-pied de l’ingérence, en absolue contradiction avec le principe fondateur de la Charte des Nations unies : la souveraineté et l’égalité en droit de chaque Etat.


C’est ce principe éminemment progressiste que défendent à bon droit les dirigeants cubains, vénézuéliens et bien d’autres latino-américains, au grand dam de l’auteur. Ce dernier dénonce ainsi l’« énorme erreur historique » qu’aurait constitué leur refus de prendre parti en faveur des rebelles. En adoptant cette attitude, ils apportent au contraire la plus grande contribution qui se puisse imaginer à l’émancipation sociale et politique des peuples. Il est vrai qu’en matière d’ingérence, l’historique sollicitude des Yankee à l’égard de leurs voisins du sud les a vaccinés.


Caracas, La Havane, et d’autres sont accusés par Ramonet de pratiquer une « Realpolitik » selon laquelle les Etats agissent en fonction de leurs intérêts. Heureusement qu’il en est ainsi ! Car l’intérêt d’Etat du Venezuela, de Cuba, et des pays latino-américains (et tout particulièrement des progressistes) est bien de se défendre contre la « légalisation » de l’ingérence qui n’a d’autre objet que de justifier l’immixtion des puissances impériales dans les affaires des autres.


Ignacio Ramonet loue donc la résolution onusienne 1793 autorisant l’emploi de la force contre Tripoli. Il voit dans l’aval préalable de la Ligue arabe un surcroît de légitimité à ce texte. Singulière approche : cette organisation, dont l’inféodation étroite aux Occidentaux n’est pas un secret, ne s’était pas jusqu’à présent illustrée par son engagement concret en faveur de la liberté des peuples (et du peuple palestinien en particulier). Dominée par des poids lourds aussi progressistes que l’Arabie saoudite, elle est un référent incontestable dès lors qu’il s’agit de promouvoir la démocratie…


L’auteur ajoute que « des puissances musulmanes au départ réticentes, comme la Turquie, ont fini par participer à l’opération ». Faut-il comprendre qu’une puissance musulmane a une légitimité toute particulière pour bénir le vol des Rafale et autres Mirage ? Voilà, en tout cas, qui fera plaisir aux Kurdes.


Enfin, pour achever de fustiger Chavez, Castro ou Correa, Ramonet rappelle que « de nombreux dirigeants latino-américains (avaient) dénoncé, à juste titre, la passivité ou la complicité de grandes démocraties occidentales devant les violations commises contre la population civile, entre 1970 et 1990, par les dictatures militaires au Chili, Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay ».


Rappelons à cet égard ce que l’auteur sait mieux que quiconque : en fait de « passivité » ou de « complicité » des « démocraties occidentales », c’est en réalité à l’instigation directe de celles-ci, et avec leur concours actif, que les coups d’Etat sanglants ont été menés à bien. Pour autant, l’on ne sache pas qu’à l’époque, les démocrates de ces pays aient sollicité des raids aériens sur Santiago, ou l’envoi de commandos à Buenos-Aires. C’est par eux-mêmes – et jamais de l’extérieur – que les peuples se libèrent.


Au-delà du cas libyen, c’est bien ce point, le plus essentiel, qui mérite débat entre tous ceux qui se reconnaissent dans le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes – ce qu’on appelait jadis l’anti-impérialisme. Jadis ? En fait jusqu’à ce que la chute de l’URSS et du pacte de Varsovie ouvre la voie à la reconquête de la totalité de la planète par le capitalisme, ses dominations et ses rivalités impériales. Et ne laisse d’autres choix aux pays que de s’aligner sur les canons (au sens religieux) des droits de l’homme, de l’Etat de droit et de l’économie de marché – trois termes devenus synonymes ; ou de se placer sous le feu des canons (au sens militaire) des gendarmes planétaires autoproclamés toute honte bue « communauté internationale ».


A cet égard, on peut évoquer une scène qui se déroula à Bruxelles, lors du sommet européen des 24 et 25 mars dernier. Il est près d’une heure du matin. Le président français déboule dans la salle de presse. Interrogé sur les bombardements engagés cinq jours plus tôt, il jubile : « C’est un moment historique. (…) ce qui se passe en Libye crée de la jurisprudence (…) c’est un tournant majeur de la politique étrangère de la France, de l’Europe et du monde ».


Nicolas Sarkozy dévoilait là en réalité ce qui est probablement l’objectif le moins visible, mais le plus lourd, de la guerre engagée. Le matin même, le conseiller spécial du secrétaire général de l’ONU qualifiait également d’« historique » la résolution mettant en œuvre la « responsabilité de protéger », pour la première fois depuis l’adoption de ce redoutable principe en 2005. Edward Luck poursuivait : « Peut-être notre attaque contre Kadhafi (sic !) est-elle un avertissement à d’autres régimes » [5].


Certes, en matière d’ingérence armée contre un Etat souverain, ladite « communauté internationale » (à géométrie variable) n’en est pas à son coup d’essai. Mais c’est la première fois que le Conseil de sécurité de l’ONU donne son feu vert explicite, et que le secrétaire général de celle-ci, Ban Ki-moon, joue un rôle actif dans le déclenchement des hostilités. Il faut bien mesurer la portée d’une telle situation : la mise en cause brutale de la souveraineté des Etats légalisée – à défaut d’être légitime. Les oligarchies planétaires dominantes, qui ont pour horizon ultime une « gouvernance mondiale » sans frontière ont ainsi marqué un point considérable : l’interventionnisme (« préventif », précise même M. Luck) peut être désormais la règle.


Cette conception, qui contredit explicitement la Charte des Nations unies, constitue une bombe à retardement : elle sape le fondement même sur lequel celle-ci avait été écrite et pourrait signifier un véritable retour à la barbarie dans l’ordre des relations internationale.


Car la défense sans compromis du principe de non-ingérence ne relève en rien d’un culte intégriste, archaïque et obtus, mais d’abord d’une raison de principe : c’est à chaque peuple, et à lui seul, de déterminer les choix qui conditionnent son avenir, faute de quoi c’est la notion même de politique qui est vidée de son sens – et ce, quels que soient les chemins dramatiques que celle-ci doit parfois affronter.


Il en va de l’ingérence exactement comme de la torture : en principe, les gens civilisés sont contre l’emploi de cette dernière – mais il se trouve toujours quelqu’un pour affirmer qu’« en des cas extrêmes », on doit pouvoir faire une exception (« pour éviter des attentats meurtriers » disait-on lors des « événements » d’Algérie ; pour « éviter le massacre de civils », justifie-t-on aujourd’hui à l’Elysée et ailleurs). Or tout le prouve : dès lors qu’on admet une exception, on en admet dix, puis cent, car on a accepté le débat sordide qui met en balance les souffrances infligées à un supplicié et les gains qu’on en attend, toujours présentés sous un jour humaniste. Il en va de même avec le respect de la souveraineté : une seule exception mène à l’éradication de la règle.


Il n’y a aucune – aucune ! – circonstance qui justifie l’ingérence. Quand bien même Nicolas Sarkozy mènerait une politique totalement contraire aux intérêts de son pays et de son peuple (hypothèse absurde, bien sûr), cela ne justifierait en rien que les avions libyens – ou bengalais, ou ghanéens – ne descendent en piqué sur les Champs-Élysées.


A cet égard, on reste perplexe devant l’affirmation selon laquelle « l’Union européenne a une responsabilité spécifique. Pas seulement militaire. Elle doit penser à la prochaine étape de consolidation des nouvelles démocraties qui surgissent dans cette région si proche ». Force est de constater que Ramonet reprend mot pour mot les ambitions affichées par Bruxelles. Passons sur le « pas seulement militaire » qui signifie, si les mots ont un sens, que l’UE serait fondée à intervenir aussi militairement. Mais cette « responsabilité spécifique » dont ne cessent de se réclamer les dirigeants européens, qui donc leur aurait confiée ? La « bienveillance » qui échoirait naturellement au voisinage et à la puissance ? Voilà précisément la caractérisation même d’un empire – fût-il ici en gestation.


On ne peut s’empêcher de penser au discours que tint à Strasbourg l’actuel président de la République – c’était en janvier 2007, il était en campagne et entendait confirmer son engagement d’« Européen convaincu ». Il exaltait alors « le rêve brisé de Charlemagne et celui du Saint Empire, les Croisades, le grand schisme entre l’Orient et l’Occident, la gloire déchue de Louis XIV et celle de Napoléon (…) » ; dès lors, poursuivait Nicolas Sarkozy, « l’Europe est aujourd’hui la seule force capable (…) de porter un projet de civilisation ». Et de conclure : « je veux être le président d’une France qui engagera la Méditerranée sur la voie de sa réunification(sic !) après douze siècles de division et de déchirements (…). L’Amérique et la Chine ont déjà commencé la conquête de l’Afrique. Jusqu’à quand l’Europe attendra-t-elle pour construire l’Afrique de demain ? Pendant que l’Europe hésite, les autres avancent ».


Ne voulant pas être en reste, Dominique Strauss-Kahn appelait de ses vœux, à peu près à la même époque, une Europe « allant des glaces de l’Arctique au nord jusqu’aux sables du Sahara au sud (…) et cette Europe, si elle continue d’exister, aura, je crois, reconstitué la Méditerranée comme mer intérieure, et aura reconquis l’espace que les Romains, ou Napoléon plus récemment, ont tenté de constituer  ». Du reste, la plus haute distinction que décerne l’UE a été baptisée « prix Charlemagne » – indice de ce que fut l’intégration européenne dès son origine, et n’a jamais cessé d’être : un projet nécessairement d’essence impériale et ultralibérale.


Le débat ne porte donc pas sur le point de savoir si le colonel Kadhafi est un enfant de chœur exclusivement préoccupé du bonheur des peuples, mais bien sur ce qui pourrait caractériser le monde de demain : le libre choix de chaque peuple de déterminer son avenir, ou la banalisation et la normalisation de l’ingérence, fût-ce sous les oripeaux des « droits de l’Homme » ?


Car il faut rappeler une évidence : l’ingérence n’a jamais été, et ne sera jamais, que l’ingérence des forts chez les faibles. Le respect de la souveraineté est aux relations internationales ce que l’égalité devant le scrutin – un homme, une voix – est à la citoyenneté : certes pas une garantie absolue, loin s’en faut, mais bien un atout substantiel contre la loi de la jungle. Celle-là même qui pourrait bien s’instaurer demain sur la scène mondiale.


Et si tout cela parait trop abstrait, l’on peut revenir à l’histoire récente de la Libye. Après avoir été pendant des années soumis à l’embargo et traité en paria, le colonel Kadhafi a opéré le rapprochement évoqué ci-dessus avec l’Ouest, ce qui s’est notamment concrétisé, en décembre 2003, par le renoncement officiel à tout programme d’armement nucléaire en échange de garanties de non-agression promises notamment par Washington. Force est de mesurer, huit ans plus tard, ce que valait cet engagement : il a été tenu jusqu’au jour où l’on a estimé qu’on avait des raisons de le piétiner. Du coup, aux quatre coins du globe, chacun est à même de mesurer ce que vaut la parole des puissants, et quel prix ils accordent au respect des engagements souscrits.


Les dirigeants de la RPDC (Corée du Nord) se sont ainsi félicités publiquement de ne pas avoir cédé aux pressions visant à leur faire abandonner leur programme nucléaire. Ils ont eu raison. Il serait logique qu’à Téhéran, à Caracas, à Minsk et dans bien d’autres capitales encore, on tire également les conséquences qui s’imposent. Ce serait même parfaitement légitime.


A peine quelques mois avant la Libye, il y eut la Côte d’Ivoire – autre fierté sarkozienne : déjà le Conseil de sécurité de l’ONU y avait béni la politique de la canonnière, au seul prétexte de l’irrégularité alléguée d’une élection – une première !


Et déjà les Occidentaux briquent leurs armes (militaires et idéologiques) pour de prochaines aventures. Ainsi « Paddy » Ashdown – qui fut notamment Haut Représentant de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine pendant quatre ans… – vient-il de confier au Times [6] qu’il convenait désormais d’adopter et de s’habituer au « modèle libyen » d’intervention, par opposition au « modèle irakien » d’invasion massive, qui a montré ses insuffisances.


Pour sa part, le secrétaire général de l’OTAN, plaidait, le 5 septembre, pour que les Européens intègrent mieux leurs moyens militaires en cette période de restrictions budgétaires. Car, pour Anders Fogh Rasmussen, « comme l’a prouvé la Libye, on ne peut pas savoir où arrivera la prochaine crise, mais elle arrivera ». Voilà qui a au moins le mérite de la clarté.


A cette lumière, est-il bien raisonnable d’analyser la crise syrienne comme le soulèvement d’un peuple contre le « tyranneau » Bachar El-Assad ? Il n’est pas interdit de penser au contraire que ce dernier est en réalité « le suivant » sur la liste des chancelleries occidentales. Dès lors, n’y a-t-il rien de plus urgent, au regard même de la cause de l’émancipation des peuples, que de s’aligner, fut-ce involontairement, sur ces dernières ?


Eu égard aux engagements d’Ignacio Ramonet, on ne lui fera pas l’injure de l’assimiler à la « gauche », qui a depuis longtemps renoncé à la mémoire des luttes. Mais force est de constater qu’il se situe en l’espèce dans la foulée de cette dernière qui a sans hésiter choisi son camp dans l’affaire libyenne. Ce qui illustre une nouvelle fois ce triste paradoxe de notre époque : les forces du capital mondialisé et de l’impérialisme revigoré trouvent désormais l’essentiel de leurs munitions idéologiques à « gauche » – des « droits de l’Homme » à l’immigration, de l’écologie au mondialisme (qui est l’exact contraire de l’internationalisme). Mais cela est un autre débat.


Quoique.



Notes :

[1Le Monde, 09/04/11

[2Libération, 01/09/11

[3Bastille-République-Nation du 27/04/11

[4Le Monde, 14/04/11

[5] Interview publiée par le Frankfurter Allgemeine Zeitung, 24/03/11

[6 The Times, 26/08/1

 

Source : medelu.org


Réponse d’Ignacio Ramonet : Massacrer à bon droit ?


Cinq mois après avoir écrit "Libye, le juste et l’injuste", je ne vois pas une virgule à y changer. Et ce ne sont certainement pas les arguments avancés par Pierre Lévy qui m’inciteraient à le faire.


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Car quand j’affirme que "les Etats progressistes d’Amérique latine" – contrairement à ce que semble croire obstinément Pierre Lévy, je ne vise pas tel ou tel pays en particulier mais tous, aussi bien ceux membres de l’ALBA que l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay - auraient dû exprimer sans attendre leur solidarité avec les peuples arabes révoltés contre les dictatures, je ne suis nullement en train de dire que j’approuve l’intervention militaire des forces de l’OTAN en Libye.


Et ce n’est pas parce que celle-ci est condamnable et criminelle, ou que la naissance du mouvement populaire en Libye a rapidement laissé place à une insurrection militarisée dans le cadre d’une guerre civile, que le silence et la non solidarité des progressistes latino-américains sont justifiés. Chacun voit bien qu’il s’agit de réalités différentes.


La vérité, je le répète, est que la diplomatie latino-américaine a commis une erreur stratégique majeure, dont elle supportera les conséquences longtemps. Et que la jonction historique - possible, virtuelle - entre les principales forces progressistes du monde, celles d’Amérique latine, et les forces populaires émergentes dans le Monde arabe a été ratée.


Il va de soi que nul ne réclamait des Etats progressistes latino-américains une quelconque (et absurde) intervention militaire en faveur des révolutions populaires arabes. Mais tout simplement une déclaration de solidarité avec ceux qui, en Tunisie et en Egypte, ainsi qu’en Lybie ou en Syrie, se sont levés contre des régimes tyranniques. Elle ne vint jamais.


Recourir à des schémas figés pour justifier cette erreur est ridicule. L’histoire concrète suit toujours des chemins sinueux qui défient le confort des raisonnements idéologiques. Ici encore, raisonner en termes manichéens produit des monstres.


J’insiste sur ceci : en matière de droit international, il faut avancer vers un monde plus juste, plus humain, plus civilisé. On ne peut plus accepter, au nom de la raison d’Etat (définie en 1648 par le Traité de Westphalie qui mit fin, en Europe, à la guerre de Trente ans), qu’un pouvoir non légitime (c’est-à-dire non élu) exerce un droit de vie, de mort et de terreur sur ses propres citoyens.


Enfin, je réprouve radicalement cet étrange raisonnement de Pierre Lévy selon lequel, en certaines circonstances, des Etats seraient autorisés à "massacrer à bon droit". L’expérience historique a définitivement démontré que nulle construction politique de progrès ne peut être édifiée sur la base d’une si exécrable pensée.

source : http://www.michelcollon.info/Controverse-sur-la-Libye-Pierre.html

 

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28 septembre 2011 3 28 /09 /septembre /2011 07:43
par Chems Eddine Chitour



«Si un événement arrive par hasard, vous pouvez être sûr qu'il a été programmé pour se dérouler ainsi.»  

Franklin Delanoë  Roosevelt (ancien président des Etats-Unis d'Amérique)

 

 

Cette boutade d'un ancien président des Etats-Unis est d'une brûlante actualité. Elle peut à elle seule expliquer la boulimie de mimétisme qui nous prend d'organiser des colloques, congrès, conférences sur ce que la doxa occidentale appelle le «Printemps arabe». On le voit, une révolution, une révolte, une jacquerie qui appartient aux Arabes reçoit son nom de baptême d'un Occident qui, plus que jamais, dicte la norme comme l'a pointé du doigt Sophie Bessis dans un ouvrage remarquable et prémonitoire: «L'Occident et les autres: histoire d'une suprématie» parue aux éditions La Découverte. Nous allons donner notre sentiment sur ces colloques en prenant l'exemple de celui organisé par le journal El Watan avec d'éminents spécialistes.

 

 Nous lisons sous la plume de Mustapha Benfodil: «Un colloque sur les révolutions arabes se tient du 23 au 25 septembre et se propose de disséquer cette formidable lame de fond qui soulève comme un seul homme le Monde arabe, de Casa à Damas et de Tunis à Sanaa. Une lame de fond qui a pour étincelle l'auto-immolation de Mohamed Bouazizi, un diplômé au chômage improvisé camelot, un certain 17 décembre 2010 dans la province de Sidi Bouzid, en Tunisie(1).

Ce qui est en cause, c'est d'abord le choix du thème: le Printemps arabe de l'Atlantique au Golfe. Le thème sur le Printemps arabe est, dès le départ, une allégeance et une soumission intellectuelle à la doxa occidentale qui, la première, a décidé d'appeler ainsi ces mouvements. Pour Mohammed Hachemaoui, enseignant à l'université d'Alger et qui a soutenu une thèse le 17 décembre 2004 à l'Institut d'études politiques sur la corruption en Algérie, l'histoire commence, pourrait-on dire à «Sumer» (Sidi Bouzid) quelque part dans une petite ville de Tunisie. « Depuis l'immolation par le feu de Mohamed Bouazizi le 17 décembre 2010, une nouvelle page de l'histoire est en train de s'écrire dans le Monde arabe», constate-t-il. «Une vague irrépressible de soulèvements populaires emportant tour à tour Ben Ali et Moubarak, (...) deux amis et alliés protégés par l'Empire. Il s'agit bel et bien d'un événement.»(1)



Le début des révoltes

 

Monsieur Hachemaoui va jusqu'à épouser la thèse occidentale comme celle de Gilles Kepel, et tant d'autres qui n'ont pas vu semble-t-il «venir» les événements- qu'ils ont commandités- mais qui se félicitent que ces révoltes ne soient pas connotés par l'Islam. Pour eux, le soubassement de ces révoltes parfumées n'a pas les fondements classiques imputables à un hypothétique choc des civilisations. Tout ceci est bien beau, mais il est quand même étonnant pour l'auteur de fixer le début des révoltes du Printemps arabe à une immolation qui aurait pu passer inaperçue n'étaient les médias occidentaux qui en ont décidé autrement. Cela me rappelle ce que nous écrivions pour répondre aux mêmes propos d'une universitaire tunisienne qui voyait dans la révolte des jeunes en Tunisie une analogie totale avec la prise de la Bastille, la fuite du roi (Ben Ali), l'arrestation à Varennes (à l'aéroport) avec Marie-Antoinette (Leïla Trabelsi). Mimétisme quand tu nous tiens! Comme si 1789 était un horizon indépassable!(2) 

 

La réalité est malheureusement tout autre. Si nous n'inscrivons pas toutes ces indignations de la jeunesse arabe dans un «agenda occidental» nous n'avons rien compris au mouvement du monde. Nous aurions souhaité que lors de ce colloque, au lieu d'asséner des lapalissades de salon qui n'ont aucune portée, ces augustes personnes rétablissent l'Histoire, des révoltes récentes. Pour l'histoire. Le ras-le-bol arabe n'a pas commencé en décembre 2010 mais en octobre 1988 en Algérie. Le tribut fut très lourd. La jeunesse algérienne a été la première -triste privilège- à mourir pour s'être battue pour la démocratie, la liberté. Sauf que ça n'intéressait personne. L'Algérie a payé le prix de la démocratie avec une décennie rouge et dit-on 200.000 morts, 10.000 disparus et 30 milliards de dollars de dégâts sans compter les traumatismes que nous allons encore trainer pendant longtemps. Il a fallu attendre l'après-11 septembre 2001 pour que la voix de l'Algérie soit audible concernant le terrorisme. N'est-ce pas là un sujet concernant la révolte arabe?

 

Nous aurions espéré aussi que cet aéropage de compétences nous dise leur sentiment de ce qui se passe en Palestine, en Syrie et en Libye où, comme le relève Djamel Labidi, il y a maldonne, l'Otan bombarde des personnes qu'il était censé protéger. Ecoutons-le: «Conformément à la résolution 1973, ou du moins l'interprétation qu'ils en ont faite, l'Otan ne devrait-elle pas à présent bombarder... les positions du CNT? En effet, c'est celui-ci qui est désormais le pouvoir et ce sont les autres, les «gueddafistes» qui sont à présent «les rebelles». C'est donc le nouveau pouvoir, le CNT, qui, aujourd'hui, «bombarde son propre peuple», à Syrte et ailleurs, et qui tombe sous le coup de la résolution 1973 de l'ONU. Je plaisante? A peine. Car on voit ainsi à quoi a été réduit le droit international. C'est le cas aussi de la reconnaissance de l'Etat palestinien. Le gouvernement français s'était empressé de reconnaître le CNT libyen alors que rien ne prouvait sa légitimité. C'est de l'étranger que le CNT a tiré d'abord sa légitimité. Mais le gouvernement français ne veut pas reconnaître l'Etat palestinien qui, lui, est légitime depuis 60 ans... Depuis toujours. (...). Les révolutions arabes continuent de charrier le meilleur et le pire. Je lisais dans un journal français (le Nouvel Observateur. 13 septembre 2011) un reportage sur une jeune Libyenne de 24 ans qui s'enorgueillait d'avoir fourni des renseignements à l'Otan, par le relais d'Al Jazeera, sur les cibles libyennes à attaquer, quand l'intervention militaire se préparait».(3)

Ahmed Halfaoui abonde dans le même sens: « On parle toujours de « rebelle s» en Libye, pourtant il y a un Etat, avec un drapeau tout neuf, qui y a été installé par l'Otan. La remarque vient du fait que ce n'est pas pour désigner la résistance populaire qui, depuis sept mois, fait toujours front dans le pays, mais les troupes du pouvoir «élu» d'abord dans les salons des grandes puissances et confirmé par l'ONU. (...). Les rebelles ne peuvent être que les Libyens qui défendent leur terre et leurs maisons à Syrte, Beni Walid, Ras Lanouf, Zaouiah, Tarhouna, Sebha, Brega et là où ils tiennent des positions, et qui font le coup de feu à Tripoli et dans tous le pays. Rien ne justifie le vocabulaire qui règne dans les médias.(4)



La réalité du «Printemps arabe»

 

Comme par hasard, les monarchies arabes dociles aux Etats-Unis et à Israël ont survécu à la ««tempête du Printemps arabe»». Cependant, à Bahreïn au Yémen, silence on tue, mais là l'Empire ne bouge pas donc, les vassaux européens regardent ailleurs. Nous aurions voulu que lors de cette réunion savante on démonte la mécanique de ces révoltes pour y voir une manipulation de grande ampleur et la «spontanéité» des révoltes est un paramètre qui a été mis en équation pour susciter le chaos pour le plus grand bien de l'Empire et de ses vassaux. Tout le monde se souvient des bloggeurs qui ont catalysé les révoltes en Egypte, en Syrie...On le voit, ce qui a perdu les potentats arabes, c'est le lâchage de l'Occident mis en musique par l'Internet et un projet mûrement réfléchi qui a travaillé sur un terreau favorable, une masse arabe toujours prête à l'émeute constamment en posture pré-insurrectionnelle au vu de la hogra, le déni de justice, les passe-droits la corruption institutionnalisée, bref ce que décrit admirablement justement Mohammed Hachemaoui dans sa thèse soutenue en 2004 sur la corruption. Le chaos en Irak, en Afghanistan, ne gêne pas la curée sur les matières premières et le pétrole. Les Afghans, les Irakiens et de plus en plus les Libyens peuvent se démolir à qui mieux mieux au besoin aidés par les bavures des drones, cela ne gênera pas l'écoulement du pétrole qui, aux dernières nouvelles, commence à être exploité par Total..



Le droit d'ingérence  puis le devoir d’ingérence

 

Ce colloque me donne la pénible impression, outre le fait qu'il n'apporte rien de nouveau, de s'apparenter au discours main stream occidentale. Nous lisons dans ce cadre un morceau d'anthologie sous la plume de Jean Daniel: «...Il était inévitable, avec la progression des ondes de choc venues de Tunis et du Caire,que l'émergence du Printemps arabe suscite des polémiques et des affrontements. (...) Nous n'avions qu'à applaudir, qu'à nous solidariser et à décider de faire l'impossible pour que personne ne confisque aux peuples qui s'étaient libérés, leur révolution. (...) C'est alors que s'est posé le problème du devoir d'assistance et du droit d'ingérence. (...) En Libye, le Conseil de sécurité, la Ligue arabe et l'Otan représentée par la France et la Grande-Bretagne ont décidé de faire un choix qui impliquait un viol de souveraineté.Kadhafi menaçait d'écraser une partie de son pays et de son peuple, et menaçait d'ailleurs le monde entier. La communauté internationale s'est octroyée un «droit d'ingérence exceptionnel». (...) A quoi sert de dire que l'on ne s'est pas opposé à l'intervention israélienne à Ghaza, si les membres du Conseil de sécurité ne sont pas d'accord entre eux pour le faire? La justice, en géopolitique,n'est pas abstraite. Elle dépend des circonstances et de ceux qui ont en charge de la définir et de l'appliquer. Il y a toujours eu «deux poids, deux mesures». (....) A la réflexion, et tout compte fait, j'ai décidé de préférer le comportement ostentatoire d'un BHL à l'indifférence dédaigneuse et frileuse de ses rivaux. BHL (...) d'autre part, à force de vouloir être Malraux, il va peut-être finir un jour par lui ressembler». (5)

 

Tout est dit, le devoir d'ingérence, Kadhafi qui assassine et sous entendu qui doit être  pourchassé, « le deux poids, deux mesures » s'agissant d'Israël et la préférence pour  BHL, le Malraux qui s'ignore !  On attribue à Machiavel la sentence suivante : « Le meilleur moyen de contrer une révolution c’est de la faire soi-même » Ceci s’applique le croyons nous comme un gant, à ce qui se déroule sous nos yeux. En un mot comme en mille tout est programmé pour se déroulé ainsi. Il « suffit de lire  » -mais le veut-on ?-  l'ouvrage de Gene Sharp qui décrit par le menu comment faire une révolution non violente et la réussir... Nous y trouverons tous les symptômes constatées dans les révoltes légitimes tunisiennes et égyptiennes, libyennes et qui, rapidement, ont été « prises en charge ».

 

Ahmed Bensaâda nous présente l'ouvrage: «De la dictature à la démocratie», livre de chevet depuis près de deux décennies de tous les activistes du monde non occidental rêvant de renverser des régimes jugés autocratiques. (...) Dans cet ouvrage, Gene Sharp décrit les 198 méthodes d'actions non violentes susceptibles d'être utilisées dans les conflits en vue de renverser les régimes en place. Parmi elles, notons la fraternisation avec les forces de l'ordre, les défilés, les funérailles massives en signe de protestation, les messages électroniques de masse, les supports audiovisuels, les actes de prière et les cérémonies religieuses, l'implication dans le nettoyage des places publiques et des endroits qui ont été la scène de manifestations, l'utilisation de slogans forts (comme le «Dégage» ou «Irhal»), des logos (comme le poing fermé), des posters avec les photographies des personnes décédées lors des manifestations et une certaine maîtrise de l'organisation logistique»»(6)

 

  « (...) Cette brillante application des théories de Gene Sharp fut suivie par d'autres succès retentissants: Géorgie (2003), Ukraine (2004) et Kirghizistan (2005). Voici ce que dit, en 2010, Pierre Piccinin, professeur d'histoire et de sciences politiques: «Les "révolutions colorées" [...] ont toutes mis en oeuvre la même recette: un groupuscule organisateur est financé par l'étranger et soutenu logistiquement (ordinateurs, abonnements à Internet, téléphones portables...). Formé par des professionnels de la révolution, sous le couvert d'ONG censées promouvoir la démocratie, telle la célèbre Freedom House, il arbore une couleur et un slogan simple. Le but: se débarrasser d'un gouvernement hostile et le remplacer par des leaders amis».(6) Ahmed Bensaâda met dans le même paquet la manipulation concernant l'Iran où l'on se souvient de la jeune dame «tuée» dont l'image a fait le tour du monde. Les évènements qui ont secoué la rue iranienne pendant l'été 2009 ont été riches en enseignements. (...) L'éclatant succès des révoltes populaires en Tunisie et en Égypte est certainement dû à une application pragmatique des méthodes d'actions non violentes de Gene Sharp. Les jeunes activistes de ces deux pays (ainsi que ceux de plusieurs autres pays arabes) ont été formés aux nouvelles technologies par les organismes américains d'«exportation de la démocratie». Ils ont participé à de nombreuses rencontres dont celles organisées par l' «Alliance of Youth Movements» (AYM) en 2008, 2009 et 2010. (...) Il va sans dire que les révoltes populaires dans ces deux pays se sont largement inspirées des expériences des révolutions colorées et de la révolte de la rue iranienne. (....) ».(6)

 

Ce colloque, qui aurait pu proposer quelques pistes de réflexion quant à une sortie de crise, se termine comme les autres, tous les autres, selon un scénario lisse qui ne perturbe pas «l'ordre établi» par une prise de position claire, nette, précise. Adoube-t-il l'ignominie qui se déroule sous nos yeux? Après le carnage à huis clos de la Libye voici venir le tour de la Syrie. Certes Al Assad doit partir mais au bout d'un processus que l'Occident ne veut pas. Je ne peux m'empêcher de donner la parole à soeur Agnès -Mariam de Chrétiens d'Orient mère supérieure d’une instutution religieuse à Damas qui , lucidement, s'explique longuement sur les enjeux de la déstabilisation de la Syrie. Nous reproduisons quelques extraits : «(...) Aussi, c'est avec soulagement et gratitude que les chrétiens non gagnés aux thèses fallacieuses des maîtres du monde, accueillent les courageuses et franches assertions du Patriarche concernant la situation dramatique liée au «Printemps arabe». «Que se passera-t-il en Syrie? Y aura-t-il une guerre sunnito-alaouite dans ce pays? Ce serait, non pas une démocratie, mais un génocide (...) Présentées comme étant des quêtes démocratiques populaires, les manifestations sont le trompe-l'oeil tout trouvé pour faire exploser la situation en Syrie et justifier, au cas où le besoin se présente, une intervention militaire comme en Libye».(7)

 

Le monde est en pleine mutation. Allons-nous vers la « Bellum omnium contra omnes », «la guerre de tous contre tous» prévue par Thomas Hobbes? Le monde ancien est en train de s'écrouler. Le drame des peuples arabes est que l'alternance à la pointe des canons de l'Otan est suspecte, il est hors de doute que les futurs dirigeants adoubés par l'Empire vont continuer comme leurs prédécesseurs à tétaniser leur peuple. Pendant ce temps-là l'Occident regardera ailleurs pourvu que les sources de rapines de matières premières et d'énergie soient garanties. Ainsi va le monde. Seule une révolution endogène de la taille de l'immense révolution algérienne, véritable lame de fond, permettra aux peuples de prendre en main leur destin.


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1. Mostefa Benfodil monde-arabe-une-nouvelle-page qui s'écrit El Watan 24-09-2011

 

2. C.E.Chitour http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=25328

 

3. DjamelLabidi http://www.legrandsoir.info/guerre-contre-la-libye-le-meilleur-et-le-pire.html

 

4. Ahmed Halfaoui http://www.lesdebats.com/editions/250911/les%20debats.htm

 

5. Jean Daniel: Deux poids, deux mesures Blog NouvelObs. 26.04.2011

 

6. Ahmed Bensaada - Les limites de la théorie de la non-violence Le Grand soir 21.09.2011

 

7. Agnès-Mariam: http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=26742


source : http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=26814



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