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10 janvier 2013 4 10 /01 /janvier /2013 04:22

http://www.amnesty.fr/sites/default/files/amnesty_logo.pngUne cour d’appel militaire tunisienne a confirmé le jugement rendu contre l’ancien conseiller auprès du président, déclaré coupable de diffamation, et l’a condamné à une peine encore plus lourde, ce qui constitue un nouveau coup porté à la liberté d’expression dans le pays depuis que le président Ben Ali a été chassé du pouvoir.

Il a aussi été privé de certains droits civiques, se voyant notamment interdire de servir dans l’armée, de travailler dans la fonction publique ou d’obtenir des distinctions de la part de l’État.

Ayoub Massoudi a été inculpé après avoir critiqué publiquement l’extradition vers la Libye de l’ex-Premier ministre libyen Al Baghdadi al Mahmoudi en juin 2012.

« Le verdict encore plus sévère prononcé contre cet homme fait clairement savoir que les autorités ont l’intention de réprimer durement les personnes critiques à leur égard, a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

Ce jugement doit être annulé immédiatement, car il vise uniquement à sanctionner une personne qui a exercé son droit fondamental à la liberté d’expression.

Les juridictions militaires ne devraient jamais servir à juger des civils

Le droit à un procès équitable d’Ayoub Massoudi, tout comme son droit à la liberté d’expression, a été bafoué, a expliqué Amnesty International, puisque cet homme a été jugé devant la justice militaire tunisienne.

L’un des deux représentants de l’État qu’il a été accusé de dénigrer, le ministre tunisien de la Défense, préside également le Conseil supérieur de la magistrature militaire, organe chargé de superviser les nominations, avancements, révocations et sanctions disciplinaires des juges militaires. L’autre est le chef d’état-major des forces armées, le général Rachid Ammar. Les fonctions occupées par ces deux hommes permettent de douter sérieusement de la capacité de la justice militaire à traiter l’affaire concernant Ayoub Massoudi de façon équitable et indépendante.

Amnesty International engage également les autorités tunisiennes à annuler l’interdiction de sortie du territoire prononcée contre cet homme avant l’ouverture de son procès.

En juin 2012, Amnesty International avait indiqué que l’extradition de l’ex-Premier ministre libyen était contraire au droit international relatif aux droits humains.

« Le jugement rendu à l’encontre d’Ayoub Massoudi prouve une nouvelle fois que le gouvernement tunisien limite le cadre d’exercice de la liberté d’expression, a dit Hassiba Hadj Sahraoui.

« Les autorités doivent cesser de s’en prendre à la liberté d’expression, qui figure parmi les droits pour lesquels les Tunisiens se sont battus si courageusement lors du soulèvement qui a conduit à l’éviction de l’ancien président Ben Ali en janvier 2011.»  Hassiba Hadj Sahraoui amnesty.fr

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3 décembre 2012 1 03 /12 /décembre /2012 02:38

Qatar : condamnation scandaleuse à la réclusion à perpétuité pour l'auteur du «poème du jasmin»

La condamnation à la réclusion à perpétuité prononcée jeudi 29 novembre à l'encontre d'un poète qatarien est manifestement une violation scandaleuse de la liberté d'expression, a déclaré Amnesty International. 

Mohammed al Ajami, également connu sous le nom de Mohammed Ibn al Dheeb, a été jugé pour « incitation au renversement du régime » et « outrage à l'émir ». 

Il a été arrêté en novembre 2011, après la publication de son « poème du jasmin », où il critiquait globalement les gouvernements de la région du Golfe, déclarant : « Nous sommes tous la Tunisie face à l'élite répressive ». 

« Il est déplorable que le Qatar, qui aime se présenter sur la scène internationale comme un défenseur de la liberté d'expression, se permette de commettre selon toute apparence une violation flagrante de ce droit », a expliqué Philip Luther, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International. 

Dans une copie du jugement qu'Amnesty International s'est procurée, il n'est fait aucune mention des raisons justifiant une peine si sévère, mais l'organisation croit savoir que les infractions dont il a été déclaré coupable reposaient sur le contenu de ses poèmes. 

« Toutes les informations disponibles suggèrent que Mohammed al Ajami est un prisonnier d'opinion, incarcéré uniquement pour ses écrits. De ce fait, il doit être relâché immédiatement et sa condamnation doit être annulée », a expliqué Philip Luther. 

La sentence prononcée contre cet homme a eu l'effet d'une onde de choc parmi les militants du Qatar et des autres pays de la région du Golfe, qui ont indiqué à Amnesty International qu'il la percevait comme une menace pesant sur eux tous. 

L'un d'entre eux a interprété le procès d'al Ajami comme le « procès du Printemps arabe », sonnant comme un avertissement à l'intention de toutes celles et ceux souhaitant le propager dans les pays du Golfe. 

« Nous attendions une tout autre décision de la part du Qatar », a dit un militant, faisant allusion aux propos des représentants de l'État sur les élections législatives et la liberté d'expression. 

Le Qatar accueille le siège du grand média Al Jazira, qui a été salué pour sa couverture des soulèvements qu'a connus la région ces deux dernières années. Cependant, le pays contrôle étroitement la liberté de la presse et la liberté d'expression, n'acceptant aucune critique contre le gouvernement. 

Les observateurs n'ont pas été autorisés à pénétrer dans la salle d'audience, et al Ajami était absent lors du prononcé du jugement. Il devrait interjeter appel. amnesty.org

 

 

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 Amnesty International publie une analyse : La Tunisie au-delà des apparences

Amnesty International publie une analyse : La Tunisie au-delà des apparences

Cette analyse dont ci joint une partie explique qu'en septembre 2011, à l’approche de l’élection de l’Assemblée constituante du 23 octobre, la section tunisienne d’Amnesty présentait un manifeste pour le changement en dix points. Une sorte de programme afin de rompre avec la dictature. Des propositions aussi élémentaires que l’interdiction de la détention au secret, la lutte contre la torture, la réforme de l’appareil sécuritaire, la lutte contre la violence faite aux femmes… A priori, l’aboutissement naturel de l’aspiration à la justice et à la liberté qui, quelques mois plus tôt, avait lancé des dizaines de milliers de Tunisiens dans la rue pour crier « Dégage ! » à Ben Ali et à tout ce qu’il représentait de corrompu, d’humiliant et de liberticide. Sur les quelque 160 partis existant alors, seule une trentaine avait signé ce manifeste. Peu de partis majeurs.

Et ni le Congrès pour la République (CPR) de Moncef Marzouki 1 (ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme, aujourd’hui président de la République) ni Ettakatol (parti de centre gauche membre de l’Internationale socialiste) ni le parti islamiste Ennahdha, pourtant décidés à incarner la rupture avec l’ancien régime, n’avaient signé. En clair, aucun des partis de la coalition parvenue au pouvoir à l’issue des élections n’a voulu s’engager sur ce texte.

Où était le problème ? Est-ce l’abolition de la peine de mort ? Ou bien l’allusion implicite à l’égalité homme/femme dans l’héritage et à la dépénalisation de l’homosexualité sous-entendus dans le refus de toute discrimination ? Ou, de manière moins avouable, la volonté de ménager l’appareil sécuritaire, colonne vertébrale de l’ancien régime, à peine ébranlé par les bouleversements politiques ?

C’était un signe, en tout cas. Le directeur de la section tunisienne d’Amnesty, Lotfi Azzouz, le pressentait d’ailleurs, en avril 2011, quand il déclarait « Il faut s’attendre à voir à nouveau se poser la question de la spécificité culturelle face à l’universalisme ». Le débat n’a, en effet, pas manqué de se produire au sein de la commission chargée de rédiger le Préambule de la Constitution à l’Assemblée. Le projet de texte évoque « les nobles valeurs humaines », périphrase pour éviter l’expression « droits de l’Homme », et le terme « universel » a été jugé trop connoté aux valeurs occidentales.

Une société traumatisée

Les anciens opposants, dont le combat était animé par les références universelles, ont cru que la Révolution était leur victoire et qu’il leur appartenait d’écrire l’avenir. Au lendemain des élections remportées par Ennahdha, nombre d’entre eux devaient admettre qu’ils ne connaissaient pas la société tunisienne. L’élection de la Constituante a, en effet, donné une nette avance aux islamistes : 37 % pour Ennahdha, auxquels s’ajoutent 6,5 % pour les listes de la Pétition populaire – combinaison des réseaux locaux du RCD (l’ancien parti au pouvoir) et de conservatisme religieux – et plus de 8 % au CPR, dont une partie de la base électorale partage les valeurs des islamistes. Avec 125 000 voix, le Pôle démocrate moderniste pesait douze fois moins qu’Ennahdha.

Sans doute a-t-on projeté un peu trop vite nos espoirs sur la Tunisie de l’après Ben Ali sans réaliser que l’événement s’inscrivait dans le prolongement d’une Histoire, dans une société dont, il ne faut pas l’oublier, la propagande et la censure avaient précisément pour objectif de dissimuler la réalité. La fin de la dictature a levé le couvercle. L’image d’une Tunisie ouverte, accordant un statut d’avant-garde aux femmes, modernisée, laïque même, se révélait un trompe-l’oeil. C’était une vitrine, un capital politique destiné à légitimer un pouvoir aux mains de clans qui avaient parasité l’État pour vampiriser l’économie. Les échecs de la modernisation

La société que l’on découvre est le produit des limites du projet d’Habib Bourguiba, le père de l’Indépendance, dont l’héritage moderniste a échoué sur deux points. Le premier est le rendez-vous manqué avec la démocratie. Son accession au pouvoir est marquée en particulier par la répression de l’opposition emmenée par Salah Ben Youssef en 1956, qui a tourné à la guerre civile et installé la torture au cœur du système de gouvernement. Dès 1966, Ahmed Tlili, l’une des grandes figures du mouvement national et syndical adressait une lettre au chef de l’État dans laquelle il plaidait pour la démocratisation et dénonçait déjà toutes les dérives : la dictature policière, la mise au pas de la société civile, l’accaparement de l’économie, la confiscation du pouvoir. La répression impitoyable qui a envoyé à la prison et à la torture 30 000 membres plus ou moins proches d’Ennahdha durant les années Ben Ali, et s’est employée à les briser socialement, a renforcé le traumatisme dans les mémoires familiales et collectives.

Le second échec de la modernisation est la marginalisation des régions intérieures au profit de la côte, seule réelle bénéficiaire, créant un décalage sociologique et culturel croissant.

Ben Ali, en prenant le pouvoir le 7 novembre 1987, a remplacé la symbolique de « l’Indépendance », par celle du « changement » – formule incantatoire rapidement vidée de tout contenu –, tout en se revendiquant de l’héritage modernisateur de Bourguiba ; de son côté, Leïla Trabelsi, son épouse, vantait les vertus du féminisme. Alors que dans la réalité, l’inégalité régionale et la censure enclavaient la majorité de la population dans ses archaïsmes et la médiocrité culturelle.

L’effet le plus pervers de ces décennies de dictature est d’avoir associé la modernisation, le rapprochement avec l’Europe, le féminisme, à la répression et à la corruption morale du régime. Ce n’est pas le terreau le plus propice à l’épanouissement de la culture des droits humains. D’autant que, pour compenser l’épuisement du mythe du « changement », Ben Ali a largement instrumentalisé la religion pour tenter d’en tirer un surcroît de légitimité, et ouvert la porte aux prédicateurs étrangers les plus rétrogrades. En revanche, la censure interdisait l’entrée en Tunisie de la littérature produite par les cadres en exil d’Ennahdha, témoignant de l’évolution de l’islam politique pour intégrer la question de l’État, du pluralisme et des droits dans les références religieuses. Le « rempart contre l’islamisme » a donc plutôt préparé le terrain de la radicalisation.

Si le débat public post-dictature, autour du droit des femmes, de la liberté d’expression, de la place de l’universalisme… donne l’apparence d’une régression, il s’agit plutôt d’un retour du refoulé. D’une résurgence de tout ce que le discours officiel a figé dans la raideur d’un dogme de plus en plus en décalage avec la réalité sociale.

Réformisme musulman

Mais ces questionnements structurent la vie intellectuelle et politique tunisienne depuis la moitié du XIXe siècle, quand l’Empire ottoman, maître de la Tunisie, était confronté à la puissance impériale européenne et cherchait à l’égaler sans renoncer aux références islamiques. Cette préoccupation avait donné naissance au réformisme musulman incarné en Tunisie dans l’entreprise des beys représentant l’autorité de la Sublime Porte : Ahmed Bey au pouvoir de 1837 à 1855 qui a aboli l’esclavage en 1846, ou encore Kheireddine Pacha (1873-1877) dotant la Tunisie d’institutions modernes. Ils se sont heurtés à leur époque aux conservatismes qui refusaient toute ouverture aux idées extérieures.

Bourguiba avait prolongé cette œuvre, en verrouillant le débat. Aujourd’hui, les verrous ont sauté et, dans le chaos d’un bouleversement politique, les Tunisiens ont la possibilité de le reprendre pour réinventer leur propre synthèse.  Thierry Brésillon

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1 novembre 2012 4 01 /11 /novembre /2012 04:59

Le journaliste tunisien Sofiene Chourabi.

Le journaliste tunisien Sofiene Chourabi.

© FETHI BELAID/AFP/Getty Images

 

Les autorités tunisiennes se doivent d'annuler les déclarations de culpabilité des journalistes Sofiene Chourabi et Mehdi Jlassi, condamnés à des peines d'amende pour ivresse sur la voie publique et atteinte à la pudeur. Amnesty International est préoccupée à l'idée qu'ils pourraient avoir été punis en raison de leurs critiques du gouvernement. 

Sofiene Chourabi, Mehdi Jlassi et une amie ont été arrêtés le 5 août pour avoir consommé de l'alcool sur une plage de Kelibia, dans le nord-est du pays, où ils avaient campé. Sofiene Chourabi s'était rendu populaire pour avoir critiqué la politique menée par l'ancien président Zine el Abidine Ben Ali avant la révolte qui l'a chassé du pouvoir en 2011. 

Ce mardi 30 octobre, un tribunal tunisien a déclaré les deux hommes coupables et les a condamnés au versement d'une amende de 104 dinars tunisiens (66 dollars des États-Unis) chacun. 

« Les restrictions des libertés individuelles au nom de l'ordre public ne doivent intervenir que si elles sont nécessaires ; elles doivent être proportionnelles et ne jamais servir de prétexte pour poursuivre en justice des militants politiques ou des personnes qui critiquent le gouvernement », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International. 

« Ces condamnations doivent être annulées et les autorités tunisiennes doivent s'abstenir de poursuivre des personnes qui exercent librement leurs droits fondamentaux, dont leur droit à la liberté d'expression. 

« Il est décevant de constater qu'à un moment où la Tunisie devrait fournir la preuve de son engagement envers les droits humains, ces condamnations donnent à l'opinion une image complètement opposée et rappellent les pratiques utilisées sous Ben Ali. » 

Les autorités tunisiennes ont le devoir de protéger l'ordre public. Elles ne doivent pas restreindre sans raison les droits à la liberté d'expression et de réunion, ni le droit au respect de la vie privée. 

Après le prononcé de la peine, Sofiene Chourabi a dit à Amnesty International qu'il avait l'intention de faire appel. 

« Je n'ai rien fait de mal, c'est là une ingérence dans ma vie privée, a-t-il déclaré. 

« Je n'ai dérangé personne. Nous dormions lorsque la police nous a arrêtés, et nos tentes étaient dans un endroit isolé, personne ne s'est plaint de nous. » 

La veille de son arrestation, Sofiene Chourabi avait appelé à manifester devant le ministère de l’Intérieur contre ce qu’il décrit comme des manœuvres du parti au pouvoir Ennahda – connu pour son programme de conservatisme religieux –, visant à imposer un nombre croissant de restrictions aux libertés publiques. amnesty.org

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29 octobre 2012 1 29 /10 /octobre /2012 18:18

Le renvoi massif de magistrats porte un coup à l’indépendance de la justice

 

La révocation de 75 juges par le ministre de la Justice a constitué un acte injuste et arbitraire. Ces renvois ont établi un précédent inquiétant et accru la subordination de la justice vis-à-vis du pouvoir exécutif. L’Assemblée nationale constituante (ANC) devrait adopter d’urgence une loi pour créer un corps indépendant qui régisse les sanctions disciplinaires et les révocations des juges de façon impartiale et transparente.

Le 28 mai 2012, le ministre de la Justice Noureddine Bhiri a révoqué 82 juges, invoquant la nécessité de mettre un frein à une corruption envahissante. Plus tard, il a rétabli neuf d’entre eux dans leurs fonctions. Human Rights Watch s’est entretenu avec dix des juges révoqués, dont aucun n’a été rétabli dans ses fonctions, au sujet de la façon dont leur dossier a été traité. Tous ont décrit des procédés disciplinaires iniques qui violent les critères internationaux définissant l’indépendance de la justice.

« Les juges ne devraient subir de révocation que pour des fautes professionnelles ou des incompétences graves, et seulement à la suite de procédures justes et impartiales », a déclaré Eric Goldstein, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Ces renvois établissent un précédent inquiétant et intimidant pour le système judiciaire tunisien ».

Le ministre de la Justice agissait en l’absence du Conseil supérieur de la magistrature, suspendu après les élections de l’ANC. Le retard pris pour mettre en place une nouvelle institution qui puisse superviser la justice a créé un vide juridique et institutionnel qui incite aux abus, a déclaré Human Rights Watch.

Les nouvelles autorités tunisiennes n’ont pas encore révisé la loi n°67-29 de juillet 1967, dont le dernier amendement date d’août 2005, qui détermine les règles appliquées pour les nominations, avancements, révocations et sanctions disciplinaires des magistrats. La loi instituait aussi le Conseil supérieur de la magistrature, présidé par le président de la République, qui avait joué un rôle crucial pour asseoir la domination du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire sous le régime du président Zine El Abidine Ben Ali. Parmi ses 19 membres, 13 étaient nommés directement ou indirectement par l’exécutif.  

Après la chute de Ben Ali en janvier 2011, le Conseil supérieur de la magistrature a continué à œuvrer tout au long de l’année 2011, décidant des nominations et des promotions de juges. Suite aux élections d’octobre 2011, l’ANC a décidé de suspendre le conseil et adopté une constitution provisoire, dont l’article 22 demande qu’elle remplace le Conseil supérieur de la magistrature par une autorité judiciaire provisoire.

En août 2012, Bhiri, le ministre de la Justice, a décidé de faire renaître le Conseil supérieur de la magistrature, avec les mêmes membres nommés sous le gouvernement de Ben Ali, en invoquant le besoin de procéder à de nouvelles nominations et de revoir les affectations judiciaires.

Pourtant l’assemblée n’a commencé à examiner l’ébauche de loi sur l’Instance provisoire de la justice que le 27 juillet 2012. Les discussions sont arrivées au point mort suite au refus de certains membres, notamment du parti Ennahda, dominant à l’assemblée, de donner à la nouvelle entité une indépendance financière et administrative.

Les procédures utilisées par le ministre de la Justice pour révoquer les juges n’ont pas respecté les exigences minimales de procédures justes et transparentes et au droit de recours à une instance d’appel indépendante, a déclaré Human Rights Watch.   

Selon l’article 52 de la loi n°67-29, le conseil de discipline du Conseil supérieur de la magistrature pouvait appliquer des sanctions disciplinaires aux juges de l’une des façons suivantes : le blâme avec inscription au dossier ; la mutation disciplinaire ; l’élimination du tableau d’avancement ; l’abaissement d’échelon ; la suspension ; et la révocation. Un magistrat pouvait être convoqué devant le conseil de discipline pour « tout manquement aux devoirs de son état, à l’honneur ou à la dignité ».

S’il est vrai que la loi n°67-29 ne présentait pas de garanties procédurales suffisantes, comme le droit de faire appel devant un corps indépendant, du moins elle établissait les conditions minimales pour que les juges aient le droit d’accéder à leur dossier et l’opportunité de préparer leur défense. En l’absence du Conseil supérieur de la magistrature, le ministre de la Justice s’est servi de l’article 44 de la loi, relatif à la « cessation définitive des fonctions », qui selon lui l’autorise à révoquer des juges et à contourner légalement les protections minimales, plutôt que l’article 52, qui détermine les procédures disciplinaires. Un juge a la possibilité de faire appel de la décision du ministre devant le tribunal administratif, mais cette juridiction peut mettre des années à émettre une décision.

Les dix juges révoqués avec lesquels Human Rights Watch s’est entretenue ont déclaré que leurs supérieurs leur avaient téléphoné le 28 mai pour les informer que leurs noms figuraient sur une liste de juges révoqués. Ils n’avaient pas été contactés au préalable par le ministère de la Justice et ne connaissaient pas les motifs de leur renvoi.

À l’origine, le ministère n’envisageait pas de réviser sa décision. Suite à une grève générale des juges le 29 mai, Bhiri a annoncé qu’il créerait une commission indépendante pour revoir ses décisions et entendre les plaintes des magistrats révoqués. Mais tous les juges interviewés par Human Rights Watch ont déclaré que la commission était formée de cinq inspecteurs du ministère et ont qualifié le processus de révision de sommaire. Ils ont rapporté qu’ils n’avaient pas eu accès à leurs dossiers et qu’ils n’avaient pas eu droit à une audience adéquate.

Les procédures manquaient également de critères clairs pour la décision de révocation. Les juges ont déclaré que même après leur audience, ils ne connaissaient toujours pas les motifs exacts de leur révocation ni les éléments de preuves dont disposait le ministère pour les révoquer.

Par exemple, Moncef Zghab, qui était juge d’instruction auprès de la cour de première instance de la Manouba, a rapporté que lorsqu’il avait comparu devant la commission, les inspecteurs ne lui avaient pas donné accès à son dossier. « L’inspecteur en chef m’a annoncé que j’étais accusé d’avoir reçu des commissions sur des ventes de terrain, mais ils n’avaient aucune preuve », a-t-il déclaré. « Je leur ai rendu compte de mes revenus en détail. Pourtant, ils m’ont laissé sur la liste des juges révoqués ».  

Habib Zammali, qui était conseiller à la chambre criminelle de la cour de première instance de Gabès, a décrit les mêmes procédures de la commission pour revoir la plainte contre lui. Un collègue avait pris une photo de lui en train de boire une bière lors d’un pique-nique entre amis, a-t-il raconté. « J’ai été avisé de ma révocation par un coup de téléphone du procureur adjoint de mon tribunal. L’inspecteur général [de la commission] m’a dit que j’étais accusé de consommer de l’alcool et qu’ils avaient reçu une lettre anonyme avec une photo de moi en train de boire ». Aucune loi tunisienne n’interdit aux juges de boire de l’alcool dans leur vie privée.

Khalfallah El Riahi, qui était vice-président de la cour de première instance de Zaghouane, a déclaré à Human Rights Watch que les inspecteurs s’étaient basés, pour le révoquer, sur un incident de 1999, quand il était juge à Aïn Draham. Un collègue ayant remplacé El Riahi lors d’un procès en 1999, alors qu’il était en congé, et que ce dernier avait été négligent avec des dossiers, a-t-il déclaré.

« Quand j’ai repris le travail, mon supérieur a considéré que c’était moi le responsable », a-t-il déclaré à Human Rights Watch. « En 2005, le conseil de discipline du ministère de la Justice m’a donné un blâme pour manquement à mes devoirs. Depuis, je n’ai jamais eu aucun problème au travail. Quand je me suis rendu à la commission du ministère de la Justice [en 2012], j’ai demandé les motifs de ma révocation. Ils m’ont dit, c’est à cause du litige que vous avez eu en 1999 ».

Nizar Ghozlani, qui officiait comme juge cantonal à Jendouba, a déclaré à Human Rights Watch que la commission de révision lui avait dit qu’il était révoqué à cause de ses dettes envers une société privée. Le 26 avril 2012, le ministère de la Justice lui avait envoyé un avertissement pour qu’il paye ses dettes. « J’ai collecté l’argent auprès de mes parents, voisins et amis, j’ai payé toutes mes dettes, et la société a retiré sa plainte », a-t-il affirmé. « C’est la seule raison qu’ils m’ont donnée pour ma révocation ». La commission a passé seulement 10 minutes avec lui, selon lui, et ne lui a pas donné accès à son dossier ni aux éléments censés prouver sa culpabilité. 

D’après les Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique, adoptés par Commission africaine des droits de l’homme et des peuples en 2005,« les magistrats exposés à des procédures disciplinaires, de suspension ou de destitution ont droit aux garanties qui s’attachent à un procès équitable, notamment au droit d’être représentés par un conseil de leur choix et à un réexamen indépendant des décisions liées à des procédures disciplinaires, de suspension ou de destitution ».

L’observation générale n° 32 du comité des droits de l’homme des Nations Unies, les experts qui émettent l’interprétation définitive du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, énonce que :


Les juges ne peuvent être révoqués que pour des motifs graves, pour faute ou incompétence, conformément à des procédures équitables assurant l’objectivité et l’impartialité, fixées dans la Constitution ou par la loi. La révocation d’un juge par le pouvoir exécutif, par exemple avant l’expiration du mandat qui lui avait été confié, sans qu’il soit informé des motifs précis de cette décision et sans qu’il puisse se prévaloir d’un recours utile pour la contester, est incompatible avec l’indépendance du pouvoir judiciaire.

 

D’après les Principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature des Nations Unies, adoptés par la résolution 40/32 de l’Assemblée générale le 29 novembre 1985, « toute accusation ou plainte portée contre un juge dans l'exercice de ses fonctions judiciaires et professionnelles doit être entendue rapidement et équitablement selon la procédure appropriée. Le juge a le droit de répondre, sa cause doit être entendue équitablement ». En outre, les Principes fondamentaux énoncent que les juges ne peuvent être suspendus ou destitués que pour des motifs d’incapacité ou d’inconduite les rendant inaptes à poursuivre leurs fonctions.

Les autorités tunisiennes devraient s’assurer que le renvoi de juges et de procureurs soit mis en œuvre d’une façon impartiale et transparente par un corps spécialement chargé de cette mission, et conformément aux critères internationaux, a déclaré Human Rights Watch. L’Assemblée nationale constituante devrait amender la loi n°67-29 pour qu’elle établisse une liste des actes pour lesquels les juges peuvent être soumis à des actions disciplinaires, ainsi que les sanctions correspondantes. Elle devrait aussi mettre en place une entité dotée de garanties d’indépendance suffisantes et du pouvoir de revoir la révocation des juges. HRW

 

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15 octobre 2012 1 15 /10 /octobre /2012 19:03

Enquête sur les attaques par des extrémistes religieux


 

hrw«Les autorités tunisiennes devraient enquêter sur une série d’agressions commises par des extrémistes religieux dans les dix derniers mois et traduire les responsables en justice», a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. « L’échec des autorités tunisiennes à enquêter sur ces attaques renforce l’impunité des extrémistes religieux et peut les encourager à être plus violents », a déclaré Joe Stork, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à HRW.


Dans une lettre adressée aux ministres de la Justice et de l’Intérieur le 11 juillet 2012, Human Rights Watch a décrit en détail six incidents au cours desquels des individus ou des groupes apparemment poussés par des motivations religieuses ont attaqué des gens – pour la plupart des artistes, des intellectuels et des militants politiques – à cause de leurs idées ou de leur façon de s’habiller. Human Rights Watch a également reçu des informations sur un autre cas similaire, l’agression en août des organisateurs d’un festival par un groupe religieux radical. 

 

La lettre aux ministres de la Justice et de l’Intérieur détaillait l’échec apparent des autorités à réagir à ces agressions. Human Rights Watch demandait aux ministres si les forces de l’ordre et les autorités judiciaires avaient agi en réponse aux plaintes déposées par les victimes des attaques et si des suspects avaient été inculpés ou traduits en justice. Human Rights Watch n’a reçu aucune réponse à cette lettre.


Les victimes de ces six affaires sont: Rajab Magri, un professeur d’art dramatique et militant de la société civile, attaqué le 14 octobre 2011, et à nouveau le 25 mai 2012, au Kef; son neveu Selim Magri, le 7 mai 2012 au Kef; Jaouhar Ben Mbarek, un militant et coordinateur du réseau social Doustourna, le 21 avril 2012 à Souk Al Ahad; Zeineb Rezgui, une journaliste, le 30 mai 2012 à Tunis; et Mohamed Ben Tabib, un documentariste et professeur de philosophie, le 25 mai 2012 à Bizerte.


Dans les six affaires, les victimes ont déposé plainte auprès des postes de police juste après les attaques, en identifiant les agresseurs dans la plupart des cas. Pour autant que Human Rights Watch ait pu l’établir, la police n’a arrêté aucun des agresseurs ni n’a entamé d’enquête formelle ou de poursuites contre eux.


Selon le droit international, les autorités tunisiennes ont l’obligation d’enquêter sur les personnes qui en agressent d’autres, de les poursuivre et de donner aux victimes des moyens de recours efficaces.  


Dans le cas d’agression le plus récent porté à l’attention de Human Rights Watch, le 16 août, un groupe d’hommes barbus a attaqué un festival marquant le Jour international de Jérusalem, à Bizerte, une ville à 40 km au nord de Tunis, blessant au moins trois militants.


Khaled Boujemaa, un militant des droits humains et organisateur du festival, a déclaré à Human Rights Watch que ce jour-là il avait appelé le chef de la police à plusieurs reprises, d’abord pour l’informer de menaces de la part de personnes qu’il identifiait, par leurs barbes et leur habillement, comme des salafistes. Ces hommes avaient ordonné aux organisateurs d’annuler le festival et les avaient accusés d’être des chiites.


Selon Boujemaa, l’officier l’a assuré que la police prendrait les mesures nécessaires pour leur sécurité, mais aucun policier n’a été envoyé pour protéger le festival, et le chef de la police observait l’attaque de loin sans intervenir. Boujemaa a été gravement blessé et emmené à l’hôpital.


« Les policiers sont venus nous voir à l’hôpital quelques heures après, et le 21 août nous sommes allés à la police identifier certains des agresseurs », a déclaré Boujemaa à Human Rights Watch. « Ensuite j’ai vu les individus que nous avions identifiés sortir du poste de police par la porte de derrière. Depuis nous n’avons pas eu de nouvelles indiquant si le procès aura lieu, et à quelle date ».


Ces agressions ont été commises lors des dix derniers mois, dans différents endroits du pays, par des personnes ayant des vêtements et une apparence semblables, d’après les récits des victimes. Les assaillants avaient un comportement violent, ils utilisaient des armes telles que des épées, des gourdins et des couteaux dans le but d’empêcher des festivals ou des célébrations, et ils ont passé des gens à tabac, apparemment à cause de leurs idées, de leur façon de s’habiller ou de leurs activités.


« L’absence apparente d’enquêtes judiciaires – sans parler de poursuites – ne peut qu’accroître le sentiment de vulnérabilité de ceux qui attirent la haine de ces gangs » hrw

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7 septembre 2012 5 07 /09 /septembre /2012 02:14

Radhia Nasraoui à la Commission de lutte contre la torture des N.U.: veto de Jebali ?


Décidément, l'alliance au sein de la Troika ne cesse de donner des signes d'incohérence et de mésentente sur quasiment tous les sujets. Le dernier couac à la tête de l’État entre Moncef Marzouki et Hamadi Jebali est inhérent aux informations qui circulent, depuis hier, concernant la nomination de la personne qui devrait représenter la Tunisie au sein de la Commission de lutte contre la torture, organisme qui relève des nations Unis.

 

En effet, pour sa part le Président de la République a proposé le nom de Radhia Nasraoui, présidente de l'Association tunisienne de lutte contre la torture (ALTT). Cette candidature ne semble pas du goût du chef du Gouvernement, Hammadi Jebali, qui, selon toute vraisemblance, s'y oppose préférant octroyer ce poste à Saida Akremi. Celle-ci n'est autre que l'épouse de Noureddine Bhiri, le ministre nahdhaoui de la justice.

 

Contactée, Maître Radhia Nasraoui ne nous a pas démenti l'information tout en exprimant son étonnement quant au veto de Hammadi Jebali.

 

Est-il besoin de rappeler que la présidente de l'Association tunisienne, dont on connaît le militantisme courageux, n' a eu de cesse de dénoncer sous la dictature les violations des droits de l'homme. Radhia Nasraoui a été de toutes luttes et a défendu les islamistes lorsque ces derniers avaient subi les affres de l'oppression exercée par l'ancien régime.

 

Il est à noter que depuis quelques heures, une campagne sur les réseaux sociaux soutient la candidature de Maître Radhia Nasraoui eu égard au passé qui est le sien marqué par son attachement au respect des droits de l'homme. webdo.tn

 

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La Tunisie perd un poste onusien, vu un désaccord entre Jebali et Marzouki

 

Marzouki et Jebali ont du mal à accorder leurs violons. Mondher Cherni, Secrétaire Général de l’organisation tunisienne contre la torture, a déclaré que la Tunisie a perdu une place au sein du sous-comité de lutte contre la torture du fait des tiraillements politiques. Il a ajouté, dans une déclaration à Assabah de ce jeudi, qu’un désaccord a opposé Hamadi Jebali, chef du gouvernement et Moncef Marzouki, président de la République, au sujet de la nomination à ce poste. 

Hamadi Jebali a proposé la candidature de Me Saïda Akremi, (épouse de Noureddine Bhiri, ministre de la Justice),  alors que Moncef Marzouki, a suggéré la candidature de Radhia Nasraoui, présidente de l’organisation tunisienne de lutte contre la torture. 

Ce sous-comité de lutte contre la torture relevant des Nations-Unies est une organisation régie par le protocole complémentaire anti-torture, et est constitué de 25 experts internationaux dans le domaine des droits de l’homme, dont la candidature est promue par les pays ayant ratifié ledit protocole et la convention internationale de lutte contre la torture, a-t-il souligné.

Mondher Cherni a indiqué que "Me Radhia Nasraoui avait de grandes chances d’être admise au sein de cette commission, dans la mesure où elle jouit d’une renommée mondiale dans le domaine de lutte contre la torture, et a travaillé sur ce dossier pendant de longues années". Il aurait fallu mettre le critère de la compétence au dessus de toute autre considération, a-t-il dit, déplorant cette crise politique. 

Les missions de ce sous-comité consistent à effectuer des visites inopinées dans les lieux de détention et de garde à vue dans les pays signataires dudit protocole, d’élaborer un rapport qu’il transmet à l’Etat sans le publier. S’il observe des cas de torture, il attire l’attention du gouvernement, et lui demande de mettre fin à ces pratiques, a-t-il fait savoir.  

S’agissant du comité national de prévention de torture et des pratiques humiliantes, Cherni a indiqué qu’après l’adoption la semaine dernière du projet de loi le régissant en conseil des ministres, il est attendu qu’il fasse l’objet de concertations avec les organisations des droits de l’Homme pour qu’elles expriment leurs opinions dessus. Après quoi, il sera soumis de nouveau au conseil des ministres et puis à l’assemblée nationale constituante. 

Il s’agit, a-t-il expliqué, "d’un comité public indépendant qui regroupe des personnalités compétentes dont la mission est d’effectuer des visites impromptues à tous les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté dont les postes de police, les lieux de garde à vue, les centres des réfugiés illégaux, les prisons, et même les véhicules transportant les personnes en arrestation". 

Ce comité publie un rapport annuel, et peut rendre public des rapports périodiques, sur les cas de torture, et transmettre ces affaires à la justice. gnet

 

 

 

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Nouvelle pomme de discorde entre Marzouki et Jebali

 

 

altLe président de la république et le chef du gouvernement n’arrivent pas à se mettre d’accord sur le nom du Tunisien qui siègera à la Sous-comité des Nations unies pour la prévention de la torture.


 

Notre pays, qui a ratifié le Protocole facultatif à la Convention de lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, est appelé à nommer un représentant (ou une représentante) pour siéger à la Sous-comité des Nations unies pour la prévention de la torture, un instrument important des Nations Unies pour la lutte contre la torture dans le monde.

 

Il y a cependant un problème: le président provisoire de la république Moncef Marzouki a promis ce poste à l’avocate Radhia Nasraoui, militante des droits de l’homme depuis plus de trente ans et qui s’est illustrée particulièrement dans la lutte contre la torture. Elle est aussi la fondatrice, en 2003, de l’Association de lutte contre la torture en Tunisie (Altt), dont elle est présidente. Elle est aussi, si l’on peut dire «accessoirement», l’épouse de Hamma Hammami, célèbre militant de la gauche tunisienne et actuel porte-parole du Parti des travailleurs tunisiens (nouvelle dénomination du Parti communiste des ouvriers tunisiens, Poct).

 

Le chef du gouvernement Hamadi Jebali propose, pour sa part, un autre nom, celui de la militante des droits de l’homme Saïda Akremi, secrétaire générale de l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (Aispp). Elle est aussi, tout aussi «accessoirement», l’épouse du dirigeant du parti Ennahdha et actuel ministre de la JusticeNoureddine Bhiri.

 

Tout en espérant voir les deux têtes de l’exécutif se mettre enfin d’accord – leurs désaccords devenus criards menacent la cohésion de la «troïka», la coalition tripartite au pouvoir –, on eut estime cependant que l’«accessoire» est ici très déterminant: l’indépendance politique des candidats étant un critère important aux yeux des hauts fonctionnaires des Nations unies. Cela donne, en tout cas, plus de crédibilité aux candidatures.kapitalis

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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 03:15

L'Égypte doit mettre fin aux attaques visant la société civile


Les autorités égyptiennes utilisent une loi adoptée sous Hosni Moubarak pour engager des poursuites contre des ONG étrangères.

© FILIPPO MONTEFORTE/AFP/Getty Images

« Les autorités égyptiennes ne doivent pas se servir de cette affaire très médiatisée pour détourner l'attention de la communauté internationale de la situation à laquelle sont confrontées les organisations égyptiennes des droits humains en Égypte.»  

Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International

 

La décision de lever une interdiction de voyager, imposée à sept ressortissants américains poursuivis dans le cadre d'une opération répressive menée contre les organisations non gouvernementales (ONG) en Égypte, est une mesure positive mais elle ne va pas assez loin, a déclaré Amnesty International.

L'organisation a demandé que ces poursuites, ouvertes en vertu d'une loi sévère sur les ONG, soient abandonnées et que les autorités cessent de s'en prendre à la société civile.

Les sept accusés en question font partie d'un groupe de 43 personnes – qui, à l'exception de 14 d'entre elles, sont toutes étrangères – actuellement jugées pour avoir, semble-t-il, porté atteinte à la loi égyptienne sur les associations. 

Une interdiction de voyager continue à peser sur d'autres personnes citées dans l'enquête. Il est à craindre que cette affaire ne soit qu'un prélude à une offensive plus étendue contre les organisations égyptiennes de défense des droits humains. D'autres étrangers seraient également visés par une interdiction de voyager dans le cadre d'une autre affaire.

« Les autorités égyptiennes ne doivent pas se servir de ce cas très médiatisé pour détourner l'attention de la communauté internationale de la situation à laquelle sont confrontées les organisations égyptiennes des droits humains en Égypte », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International. 

« Une fois que la communauté internationale ne s'intéressera plus à cette affaire, les défenseurs des droits humains en Égypte seront frappés de plein fouet, que ce soit devant les tribunaux ou face à la menace d'une loi sur les associations encore plus répressive. »

Lorsqu'il a annoncé que l'interdiction de voyager serait levée, le juge de la cour d'appel a fixé le montant de la caution pour ces ressortissants américains à deux millions de livres égyptiennes (environ 250 000 euros). En réaction aux poursuites engagées contre ces citoyens des États-Unis, les autorités américaines envisageaient de geler les aides militaires annuelles à l'Égypte à hauteur de 1,3 milliard de dollars (environ 976 millions d'euros). 

Outre les sept Américains visés par cette mesure – neuf des 16 Américains concernés par cette affaire avaient quitté l'Égypte avant que l'interdiction de voyager ne soit décrétée – les autres personnes poursuivies incluent des Égyptiens, des Serbes, des Norvégiens et des Allemands. Des Palestiniens et des Jordaniens auraient aussi été inculpés.

Tous travaillent pour des ONG ayant leur siège aux États-Unis ou en Allemagne, qui se proposaient d'observer les élections législatives en Égypte avec le consentement des autorités ou de dispenser des formations sur la participation politique. 

Amnesty International a assisté à la première audience du procès, au tribunal pénal du nord du Caire dimanche 26 février ; seuls les 14 accusés égyptiens comparaissaient. 

Il leur était notamment reproché de travailler pour des organisations qui, contrairement à ce qui est prévu par la draconienne loi égyptienne sur les associations, acceptaient des financements étrangers et travaillaient illégalement dans le pays. Il est avéré qu'au moins trois de ces organisations ont officiellement déposé une demande d'enregistrement auprès des autorités égyptiennes. 

La loi égyptienne sur les associations (loi 84 de 2002) est régulièrement critiquée par les organes de suivi des traités des Nations unies et par les spécialistes des droits humains. 

Mercredi 29 février, après que les magistrats chargés du cas se soient récusés, la suite de ce procès est devenue très floue. La prochaine audience est programmée pour le 26 avril.

On s'attend à ce que les organisations égyptiennes de défense des droits humains soient les prochaines à se trouver dans la ligne de mire. 
Le Conseil suprême des forces armées et d'autres instances égyptiennes ont eu tôt fait de reprocher aux organisations égyptiennes des droits humains d'être à l'origine des troubles, parce qu'elles dénonçaient des violations des droits humains. 

« Les autorités égyptiennes essaient de faire des organisations égyptiennes des droits humains les boucs émissaires des troubles sociaux », a déploré Hassiba Hadj Sahraoui. 

« Elles doivent savoir qu'autoriser ces citoyens américains à quitter le pays ne détournera pas l'attention de la communauté international des poursuites engagées contre les militants égyptiens. »

Le 29 décembre 2011, des bureaux utilisés par des ONG égyptiennes et internationales ont fait l'objet de descentes dans le cadre d'une enquête officielle. 

Parmi les organisations concernées figuraient le Centre arabe pour l'indépendance de la justice et des professions juridiques, et l'Observatoire du budget et des droits humains. Depuis ces raids, des membres de ces deux organisations ont été convoqués et interrogés dans le cadre des investigations menées par les autorités. 

Les résultats d'une enquête ouverte par le gouvernement ont filtré en septembre 2011 ; ils accusent plusieurs organisations de défense des droits humains d'enfreindre les lois sur l'enregistrement et les financements étrangers. Cette année, au moins deux membres d'organisations de défense des droits humains ont dit avoir été interrogés au sujet des activités de leur organisation.

Les autorités égyptiennes essaient par ailleurs de faire adopter une loi qui limiterait encore davantage les activités de la société civile. 

Ce texte accorderait aux autorités des pouvoirs étendus leur permettant de déterminer si les activités d'une organisation sont acceptables, tout en maintenant des règles strictes quant au financement et en renforçant les restrictions relatives à l'enregistrement.

Enfreindre cette loi serait passible d'une peine d'un an de prison et d'amendes d'un montant pouvant atteindre des milliers de livres égyptiennes.

« Les autorités égyptiennes doivent abandonner ce projet de loi qui va au-delà de la loi sur les associations, déjà répressive, et veiller à ce que la législation dans son ensemble respecte le droit à la liberté d'association », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

source amnesty.

 

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 La société civile en danger

Le régime militaire égyptien m’accuse d’être un fugitif. Et moi je dis qu’il est temps que les contribuables américains cessent de financer la répression égyptienne.

Procès des activistes égyptiens et étrangers au Caire le 26 février 2012. Reuters/Mohamed Abd El Ghany

 

Le lundi 6 février, le ministère de la Justice égyptien m’a inculpé, ainsi que 42 autres employés de cinq organisations non-gouvernementales (ONG) différentes travaillant en Égypte, et envoyé nos dossiers à la cour pénale de notre pays. Je suis accusé d’être un «fugitif américano-égyptien» et de «diriger une filiale d’organisation internationale sans autorisation du gouvernement égyptien», ainsi que de «recevoir et d’accepter de l’argent d’organisations internationales par le biais de financements directs pour exercer des activités illégales et violant la souveraineté de l’État.»

Au cours des cinq dernières années, j’ai été employé parFreedom House, pour qui je gérais des programmes visant à donner une voix à de jeunes défenseurs de la démocratie et des droits de l’homme en Égypte et au Moyen-Orient. Je suis né en Égypte et j’ai débuté ma carrière dans les droits de l’homme en travaillant à l’Ibn Khaldun Center for Development Studies, la plus ancienne organisation égyptienne de défense des droits humains, où je dirigeais une coalition nationale d’ONG surveillant les élections de 2005. Je me suis installé aux États-Unis en 2006 pour échapper au harcèlement croissant du président Hosni Moubarak, notamment aux attaques des médias et aux interrogatoires des services de sécurité. Et pourtant, de mes 10 ans de travail en tant qu’activiste des droits de l’homme, époque durant laquelle j’ai été constamment diffamé et accusé à tort, les dernières accusations portées contre moi sont les plus ridicules.

ONG dans la ligne de mire
Les revendications du gouvernement égyptien qui prétend qu’il s’agit de respect de «l’état de droit» ou de la «souveraineté de l’État», comme on peut le lire dans le journal géré par l’État Al-Ahram, sont dangereusement mensongères. Les lois que le gouvernement utilise contre nous sont des vestiges du système politique de Moubarak, conçues pour opprimer, intimider et contrôler la société civile. Elles ont été votées par un parlement fantoche parvenu au pouvoir grâce à des élections truquées. Ces lois violent les fondements de la liberté d’association et vont à l’encontre des obligations de l’Égypte auxquelles l’engage le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont elle est signataire (par exemple, la loi égyptienne de 2002 sur les organisations non gouvernementales exige des ONG d’obtenir une approbation préalable pour tous les financements et donne au gouvernement un contrôle total de la surveillance et de l’approbation de leurs activités). Ce n’est que dans un système démocratique, où le peuple dispose d’un gouvernement représentatif, que l’Etat de droit a vraiment un sens.

Les motivations politiques et la nature vindicative derrière ces accusations sont parfaitement claires. Les accusations contre moi et contre les autres travailleurs des ONG ont été portées par le seul haut fonctionnaire du cabinet de Moubarak resté au pouvoir. L’enquête s’inscrit dans le cadre d’une répression plus vaste de la société civile égyptienne, infligée au cours des six derniers mois. Les accusations actuelles contre les ONG internationales, notamment Freedom House, recouvrent presque cinq ans d’opérations visant à apporter un support technique et à défendre les groupes locaux œuvrant pour la démocratie et les droits de l’homme en Égypte. Une grande partie de cette aide est allée aux ONG locales et aux activistes qui défiaient Moubarak —un homme que le conseil militaire au pouvoir a envoyé devant les tribunaux au nom du peuple égyptien.

 

 

Défense de la société civile égyptienne

Bien qu’il serait plus facile de traiter ces accusations politiques par le mépris du haut de mon confortable bureau de Washington, si le gouvernement égyptien arrête notre personnel local et lance des procédures judiciaires, mon collègue Charles Dunne —l’autre «fugitif» de Freedom House à Washington— et moi avons décidé qu’il nous fallait livrer cette bataille jusqu’au bout, ce qui implique d’aller en Égypte pour défendre non seulement nos personnes mais les droits de tous ceux injustement persécutés. Malgré les risques évidents d’emprisonnement ou pire encore, nous préférons encore comparaître devant un tribunal égyptien que d’être reconnus coupables de faux crimes par contumace. Ce ne serait pas payer trop cher le soutien à l’indépendance de la société civile égyptienne.

En ce moment, les activistes égyptiens intensifient leurs efforts pour faire barrage aux tentatives des contre-révolutionnaires de leur voler leur révolution. Ils descendent dans les rues de tout le pays, volontairement et sans hésitation, où ils le paient de leur sang et, parfois, de leur vie. Ils se battent pour s’assurer que la vieille Égypte, avec son cortège de répression et de corruption, ne reviendra pas. Il ne me sera pas facile de ne pas saisir l’opportunité d’en faire autant, surtout si je suis nommément appelé à faire ce choix. Je ne peux simplement pas me regarder en face ou envisager d’affronter ma famille et mes amis qui ont déjà fait tant de sacrifices si je ne vais pas les aider à empêcher que la révolution ne soit détournée.
«Dialogue stratégique avec la société civile»

Les Égyptiens continueront à rechercher leur liberté, avec ou sans aide étrangère. Freedom House et d’autres organisations leur apportent simplement une aide pour leur permettre d’y parvenir rapidement et pacifiquement. En fournissant des formations, des programmes d’échanges et de petites subventions aux groupes de défense de la démocratie et des droits de l’homme non-partisans, et en partageant les bonnes pratiques d’autres experts, nous avons aidé la société civile égyptienne à remplir son rôle crucial dans la transition démocratique.

Il y a presque un an, le 16 février 2011, j’ai assisté au lancement par la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton de l’initiative «dialogue stratégique avec la société civile», qui vise à assurer que les diplomates américains du monde entier gardent des contacts étroits avec les peuples des pays dans lesquels ils sont présents. J’ai dit directement à Hillary Clinton que l’Égypte pourrait être dirigée par des chefs militaires qui ne comprennent pas le rôle de la société civile.«Nous avons besoin d’entendre clairement de la part du département d’État que…les bénéficiaires de l’aide étrangère», c’est à dire le gouvernement égyptien, «ne doivent pas décider ce que la société civile doit ou peut faire» ai-je souligné. Mon message reste le même aujourd’hui.
La balle est dans le camps des Etats-unis

Après les événements de ces derniers mois, tandis que les organisations et les citoyens américains sont clairement visés malgré les milliards de dollars d’aide militaire et économique destinés à l’État égyptien, la balle est dans le camp de l’Amérique. Il est temps de faire comprendre clairement à l’armée égyptienne que le Congrès et la Maison Blanche arrêteront de subventionner la répression en Égypte avec l’argent des contribuables américains, notamment avec les 1,3 milliard de dollars de financements militaires annuels. L’influence ne sert a à rien si l’on ne choisit pas de s’en servir. Mais surtout, il est temps d’adopter une prise de position morale.

Le conseil militaire pense qu’il peut littéralement s’en sortir impunément tout en continuant avec un beau cynisme de prendre l’argent américain. Je dis qu’il est temps de prendre les généraux au mot. 

Sherif Mansour

source slateafrique


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29 février 2012 3 29 /02 /février /2012 07:12
Les poursuites judiciaires à motivation politique reflètent un mépris flagrant des droits humains

 

« La tenue de procès foncièrement injustes devant des tribunaux militaires et civils est un élément central de la répression du mouvement de protestation pro-démocratie à BahreïnLe gouvernement devrait remédier aux centaines de condamnations injustes prononcées au cours de l'année écoulée, en abandonnant les poursuites contre toutes les personnes condamnées pour des motifs politiques et en adoptant des mesures efficaces pour faire cesser la pratique de la torture pendant la détention. »

Joe Stork, directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch

Des centaines de militants d'opposition et d'autres personnes ont été condamnés pour des motifs purement politiques lors de procès injustes intentés de manière systématique à Bahreïn, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui. Le gouvernement devrait annuler ces condamnations prononcées par des tribunaux militaires et civils bahreïnis, à l'issue de procès qui étaient très loin de répondre aux critères internationaux d'une justice équitable, a ajouté Human Rights Watch.

Ce rapport de 94 pages, intitulé No Justice in Bahrain: Unfair Trials in Military and Civilian Courts (« Pas de justice à Bahreïn: Des procès injustes devant des tribunaux militaires et civils ») décrit de graves violations des garanties de procédure régulière commises lors de procès spectaculaires devant les tribunaux militaires spéciaux bahreïnis en 2011 – dont le procès de 21 militants politiques connus et un autre intenté à 20 médecins et membres des professions de santé – ainsi que lors de procès inspirés par des motifs politiques devant des cours pénales ordinaires depuis 2010. Parmi les graves violations relevées, figurent le déni du droit des accusés de se faire assister d'un avocat et de présenter des arguments de défense, et le refus d'enquêter sur des allégations crédibles de torture et de mauvais traitements des accusés pendant leurs interrogatoires. 

« La tenue de procès foncièrement injustes devant des tribunaux militaires et civils est un élément central de la répression du mouvement de protestation pro-démocratie à Bahreïn » a déclaré Joe Stork, directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch. « Le gouvernement devrait remédier aux centaines de condamnations injustes prononcées au cours de l'année écoulée, en abandonnant les poursuites contre toutes les personnes condamnées pour des motifs politiques et en adoptant des mesures efficaces pour faire cesser la pratique de la torture pendant la détention. »

Les violations flagrantes du droit à un procès équitable dans les affaires politiques ne reflètent pas seulement les mauvaises pratiques auxquelles recourent certains procureurs et magistrats mais aussi les graves lacunes systémiques de la justice criminelle à Bahreïn, a affirmé Human Rights Watch.

Dans un entretien accordé le 13 février 2012 au magazine allemand Der Spiegel, le roi Hamad bin Isa Al Khalifa a déclaré: « Il n'y a pas de prisonniers politiques détenus en tant que tels à Bahreïn. Les gens ne sont pas arrêtés parce qu'ils expriment leurs opinions, nous n'avons que des criminels [dans les prisons]. »

Le rapport de Human Rights Watch est fondé sur plus de 50 entretiens avec des accusés, des avocats de la défense et des observateurs des procès, ainsi que sur un examen minutieux des verdicts disponibles et d'autres documents judiciaires. Human Rights Watch a écrit au procureur général de Bahreïn en novembre 2010 et au ministre de la Justice en décembre 2011 au sujet des procès, mais n'a reçu aucune réponse.

Au moins cinq personnes sont mortes après avoir subi des tortures en détention, à la suite de la répression par le gouvernement des manifestations essentiellement pacifiques qui ont commencé à la mi-mars 2011, selon le rapport publié en novembre de la Commission indépendante d'enquête bahreïnie, organe composé de cinq juristes et experts des droits humains internationaux et créé par le roi Hamad. Human Rights Watch a documenté la pratique continuelle de la torture et des mauvais traitements par les agents de sécurité bahreïnis au cours de ces dernières années.

Parmi les personnes dont les condamnations devraient être invalidées et qui devraient être libérées, se trouvent des dirigeants du mouvement de protestation comme Ibrahim Sharif, Abdul Hadi al-Khawaja, Hassan Mushaima et Abdul Wahab Hussein, a indiqué Human Rights Watch.

Dans l'une de ces affaires, une infirmière a été condamnée pour « incit[ation] … à la haine et mépris du régime au pouvoir » et « de[struction] de propriété mobilière … dans la poursuite d'un objectif terroriste », parce qu'elle avait prétendûment marché sur une photo du Premier ministre.

Human Rights Watch a appelé les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et d'autres pays à suspendre toute vente ou aide militaire ou relative à la sécurité au royaume de Bahreïn, tant que le gouvernement n'aura pas traité le problème posé par les graves violations des droits humains résultant de la répression des manifestations pacifiques et des procès iniques.

Le 15 mars 2011, le roi Hamad a émis un décret proclamant pour trois mois un “état de sûreté nationale,” similaire à un état d'urgence, qui donnait une autorité très étendue au maréchal Khalifa bin Ahmad Al Khalifa, commandant des Forces de défense de Bahreïn, pour promulguer des dispositions nouvelles d'une portée très large règlementant l'ordre public et pour faire appliquer ces mesures ainsi que les lois déjà existantes. Le décret créait également des tribunaux militaires spéciaux, appelés Cours de sûreté nationale, afin de juger des crimes qui avaient “entraîné la proclamation de l'état de sûreté nationale” et “constitué un défi aux dispositions” du décret.

Entre leur création le 4 avril et l'achèvement de leur tâche début octobre, ces tribunaux ont jugé des centaines de Bahreïnis pris dans la nasse de la “sûreté nationale”. Le commandant des forces armées a personnellement nommé les présidents de ces tribunaux, qui étaient toujours des officiers, et deux juges civils, pour conduire les procès, lesquels se tenaient dans un complexe militaire, à al-Riffa.

A la date du 7 octobre, toutes les procédures judiciaires et d'appel concernant les personnes accusées de crimes relatifs à l'agitation politique des mois précédents ont été transmises à des cours pénales civiles.

Toutefois les procédures suivies lors de plusieurs procès relatifs à des questions de sécurité devant des cours pénales civiles avant février 2011, suscitaient déjà des préoccupations similaires, selon les constatations faites par Human Rights Watch: des poursuites judiciaires d'inspiration politique engagées contre des personnes en raison de leurs déclarations ou écrits plutôt que de véritables actes criminels, un déni de leurs droits fondamentaux à un processus équitable tel que le droit de se faire assister d'un avocat et des allégations de torture et de mauvais traitements pendant les interrogatoires.

« Le roi Hamad devrait regarder de plus près les tribunaux militaires spéciaux qu'il a lui-même créés par décret, avant d'affirmer qu'il n'y a pas de prisonniers politiques à Bahreïn », a conclu Joe Stork. « Des gens ont été systématiquement condamnés pour leurs opinions politiques, pour des slogans qu'ils avaient scandés et pour s'être joints à de grandes manifestations pacifiques dont le prince héritier lui-même a affirmé publiquement qu'elles étaient garanties par la constitution du royaume. »

source hrw

 

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27 février 2012 1 27 /02 /février /2012 07:26
« Debout chiens, debout !». « Mange le drapeau ! ». « chien, viens ici ! »
 
Les musulmans rient, les traitent de sales chiens (une injure dans l’islam car le chien est considéré comme impur), les forcent à manger un drapeau aux cris de Allah Akbar.
 

dreuz

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29 janvier 2012 7 29 /01 /janvier /2012 20:04

LETTRE OUVERTE DE REPORTERS SANS FRONTIÈRES AUX AUTORITÉS TUNISIENNES

 

A l’occasion du premier anniversaire de la révolution tunisienne, Reporters sans frontières adresse une lettre aux nouvelles autorités tunisiennes dans laquelle l’organisation fait part de ses inquiétudes.

 

Moncef Marzouki, Président de la République
Hamadi Jebali, Premier ministre
Mustafa Ben Jafar, Président de l’Assemblée constituante
Mesdames et Messieurs, membres élus de l’Assemblée constituante


 

Vous, autorités nouvellement élues par la volonté du peuple, à l’issue du premier scrutin démocratique en Tunisie depuis plus d’un quart de siècle, vous êtes les garants des acquis de la révolution, qui s’est soldée par le départ de Zine el-Abidine Ben Ali le 14 janvier 2011. Nous croyions fondamentalement que la liberté d’expression et la liberté d’information sont au cœur de l’avenir démocratique de toute nation. Si ces principes sont devenus une réalité dans la Tunisie d’après-Ben Ali, iI est de la responsabilité de chacun de les préserver.

Depuis plusieurs mois, grâce à son bureau dans la capitale, Reporters sans frontières suit les évolutions du champ médiatique tunisien, à Tunis, mais également dans les régions, ainsi que les difficultés liées à son renouvellement, notamment dans le domaine de l’audiovisuel. Il est à souligner que les premières élections libres en Tunisie ont été couvertes par des chaînes de télévision qui existaient du temps de l’ancien président, prédateur de la liberté de la presse. Les dispositions législatives adoptées récemment devraient permettre une ouverture du secteur pour davantage de pluralisme.

Consciente de l’importance de la création de cadres juridiques solides pour les médias, Reporters sans frontières a également suivi les travaux de rédaction des projets de lois et rendu un avis consultatif sur le code de la presse à la sous-commission médias dirigée par Ridha Jenayah et émanant de la Haute Instance pour la réforme, la transition démocratique et la préservation des acquis de la révolution. Des remarques formulées par le comité juridique de l’organisation ont été retenues dans le projet de loi, adopté par le gouvernement de Béji Caïd Essebsi, à la veille des élections pour l’Assemblée constituante.

Si certaines avancées ont été réalisées dans le domaine législatif et avec la création de nouveaux médias, Reporters sans frontières s’inquiète du fait que la pression sur les journalistes et les médias se soit accentuée au cours des derniers mois. Le slogan que Reporters sans frontières avait choisi en octobre dernier pour l’inauguration de notre bureau à Tunis : ‘Libres jusqu’à quand ?’ nous semble particulièrement d’actualité. 

Les violences policières qui ont eu lieu le 3 janvier dernier à l’encontre de deux journalistes, ainsi que celles du mois de juillet et de mai 2011 sont extrêmement préoccupantes. Elles ne sont pas sans nous rappeler les méthodes policières et sécuritaires répressives d’une époque que tout un chacun pensait révolue. Le ministère de l’Intérieur doit ouvrir de manière systématique des enquêtes sur les agressions commises par ses agents contre des professionnels de l’information. Leurs conclusions doivent être rendues publiques. Par ailleurs, des sessions de sensibilisation des forces de l’ordre au travail des journalistes (et vice-versa) devraient être organisées en partenariat avec les organisations de défense de la liberté de la presse en Tunisie.

En outre, les récentes nominations à la tête des médias publics, annoncées par le Premier ministre le 7 janvier dernier, en contradiction avec les dispositions prévues par l’article 19 du décret loi n°2011-116 du 2 novembre 2011, constitue une violation flagrante de l’indépendance des médias. Nous attendons que le gouvernement fasse immédiatement marche arrière et annule la nomination des rédacteurs en chef et directeur de l’information. En outre, si le Premier ministère dispose du droit de gérer les nominations administratives, nous regrettons qu’il ne soit pas penché en priorité sur la mise en place de la Haute Autorité indépendante de la communication audiovisuelle, comme l’énonce le décret de novembre dernier. La tentative d’interdiction de la publication, le 10 janvier 2012, d’une enquête de l’hebdomadaire El Oula sur d’éventuels avantages financiers perçus, dans le passé, par le nouveau PDG de l’Etablissement de la télévision tunisienne, sur pression de ce même Adnène Khedr, ne fait que renforcer nos inquiétudes.

 

De même, si l’Agence tunisienne de communication extérieure (la fameuse ATCE) a officiellement gelé ses activités, elle reste néanmoins une structure destinée à interdire la distribution de certains journaux dans le pays... comme du temps de Zine el-Abidine Ben Ali. Ainsi, récemment deux hebdomadaires français (L’Express et Le Nouvel Observateur) n’ont pu être distribués en Tunisie du fait de la reproduction de représentations du Prophète dans ces deux publications. Les autorités doivent apporter des éclaircissements relatifs à la mise en place, ou non, d’un mécanisme de censure préalable. Pratique qui constituerait un retour à des pratiques tristement célèbres.

Reporters sans frontières tient également à exprimer son inquiétude concernant les risques que la montée de l’extrémisme religieux fait courir sur la liberté de la presse en Tunisie. Des mouvements salafistes ont recours à un certain nombre de techniques d’intimidations pour décourager les journalistes qui veulent traiter de sujets relatifs à la religion, n’hésitant pas à faire pression sur des médias. Le procès intenté contre la chaîne Nessma et son principal actionnaire, en octobre dernier, suite à la diffusion du film Persépolis, ainsi l’agression, le 11 janvier 2012, deSoufiène Ben Hamida, journaliste de la chaîne, qui avait déjà vu sa voiture taguée du mot « mécréant », montrent que les journalistes et les médias tunisiens ont plus que jamais besoin que les autorités se placent en faveur de la liberté d’expression et du droit pour les journalistes à pouvoir faire leur travail sans être inquiétés.

Il est plus que jamais temps que les nouvelles autorités prennent leurs responsabilités face à l’ensemble de ces problèmes. Elles doivent envoyer un signal fort à tous ceux qui bafouent la liberté d’expression et la liberté des journalistes à pouvoir informer en toute indépendance. Au-delà des polémiques, des questions politiques et des convictions religieuses individuelles, la liberté d’expression, en tant que premier acquis de la révolution, doit faire l’objet d’un consensus et être protégée par tous. Elle est l’affaire de tous. Le point d’entrée vers la liberté. Le point de retour vers la dictature.

Reporters sans frontières reste à vos côtés pour faire de ces défis d’aujourd’hui des réalités de demain. Restants à votre disposition pour discuter de manière précise et détaillée des points soulevés dans ce courrier, nous vous prions d’agréer, Mesdames, Messieurs, nos plus sincères salutations démocratiques,

 

Jean-François Julliard
Secrétariat général de Reporters sans frontières

Tunis, le 12 janvier 2012

source rsf.


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