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17 avril 2011 7 17 /04 /avril /2011 08:26
Kadhafi est il en train de reprendre la main ?
par Jean-Patrick Grumberg

L'OTAN n'a plus de bombes de précision, moins d'un mois après le début de l'offensive contre la Libye.

Il semble bien, d'après les déclarations de plusieurs responsables de l'OTAN et d'officiels américains, publiées vendredi dans le Washington Post, que la France et la Grande Bretagne n'avaient pas, et ce dès le premier jour des opérations, l'armement suffisant pour soutenir "ne serait-ce qu'une action militaire relativement petite".
 
Par ailleurs, plusieurs officiels américains déplorent que les européens manquent d'avions de combat, et doutent qu'ils pourront encore longtemps se passer des Etats Unis, si le conflit devait encore traîner en longueur, ce qui semble être le cas.
 
Tandis que Kadhafi utilise des bombes à fragmentation, le porte parole du "Conseil civil de Misurata" demande à l'OTAN d'envoyer des troupes au sol pour sécuriser le port de Misurata, le seul lien avec l'aide humanitaire. 
 
Les rebelles ont supplié les alliés, la semaine dernière, de renforcer leurs frappes aériennes. Lors de la dernière réunion à Berlin des six pays engagés dans le conflit, la France et la Grande Bretagne n'ont pas réussi à convaincre d'autres pays de rejoindre l'alliance. L'OTAN réclamait dix avions supplémentaires.
 
En milieu de semaine dernière, l'OTAN affirmait donc qu'il ne pourrait y avoir de solution militaire, mais seulement politique.
 
L'OTAN dévoile maintenant la raison. Les bombes guidées par laser, la munition la mieux adaptée à la situation libyenne, ont très vite manqué, et bien que les américains en ont une quantité importante, ils ne s'adaptent pas sur les avions français et anglais, les plus utilisés pour ces missions.
 
Rappelons que la France et la Grande Bretagne n'ont pu engager qu'une vingtaine d'avions de combat, que la Belgique, la Norvège, le Danemark et le Canada ont chacun contribué avec six avions, qui sont fabriqués aux Etats Unis, et donc  compatible avec l'armement américain.
 
 
Depuis la fin mars, plus de huit cent attaques aériennes ont été lancées, et seulement trois par les Etats Unis. En revanche, les Etats Unis assurent vingt cinq pour cent des vols de surveillance, de renseignement, et de ravitaillement en vol. 
 
Dans un récent commentaire, John Pike, spécialiste en sécurité, directeur du think tank GlobalSecurity.org, confirme mes craintes et me donne hélas raison (voir mon article "Libye, mieux que le salon aéronautique du Bourget") en expliquant que "la Libye n'est pas une guerre importante. Et si les européens sont déjà à court de munitions pour une si petite opération, on peut se demander quelle genre de guerre ils entendaient livrer". "Peut être avaient-ils seulement l'intention d'utiliser leur force aérienne pour faire de la promotion comme sur un salon aéronautique." 
 
J'aurais préféré avoir tort.
 
D'autant que tout laisse à penser que Kadhafi, qui est peut être fou mais pas con, a lu les mêmes articles que vous et moi, sait que les alliés sont à court, qu'Obama ne veut pas se mouiller, et il va maintenant jouer le pourrissement jusqu'à l'hiver.
 
Si la France, la Grande Bretagne et les pays suiveurs, ne trouvent pas vite une idée lumineuse, et on ne peut pas dire qu'ils en aient eu beaucoup jusqu'à présent, ils risquent soit de préparer une Libye divisée, qui deviendra une vraie passoire à terroristes, déguisés en pauvres civils fuyant vers l'Europe, soit de laisser la victoire à Kadhafi, qui saura remercier ceux qui hier l'accueillaient à l'Elysée et ailleurs avec les honneurs : n'oublions pas qui fourni son pétrole et ses musulmans à la France. 
 
Mais qu'on se rassure, la politique arabe de la France du Quai d'Orsay est au dessus de toute critique. En fait elle est la fierté de la France que tout le monde nous envie, disons le carrément.
 

La France a-t-elle les moyens ?

Pourquoi Alain Juppé, ministre des affaires étrangères, a-t-il critiqué l’Otan, coupable à ses yeux, de ne pas faire assez en Libye  ? Pourquoi a-t-il récemment plaidé, auprès de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, en faveur d’un retour des avions de combats américains ?  Pourquoi Gérard Longuet, ministre de la Défense, a-t-il déploré que la France et le Royaume-Uni doivent assurer l’essentiel des frappes aériennes ?

Tout simplement parce que,  l’opération se prolongeant, ni la France, ni le Royaume-Uni, – pourtant, et de loin, les deux premières armées européennes-, n’ont les moyens de maintenir ce tempo sur la longue durée.

Parce que cela coûte cher et que, comme le révèle  le Washington  Post, les stocks de munitions s’épuisent, en particulier pour les bombes à guidage laser, les plus utilisées par la coalition. « Quand les arsenaux commençent à diminuer, les usines doivent se réorganiser et redémarrer les lignes de production pour renouveller le stock, tout cela peut prendre du temps et de l’argent supplémentaire » commente Elizabeth Quintana, du Royal United Services Institute de Londres, cité par le quotidien américain. Qui plus est, il n’est pas possible de puiser dans les stocks américains car les avions français et britanniques ne sont pas équipés des mêmes munitions.

«  Nous n’avons pas de gros stocks. Dans la durée, on souffrirait  » reconnait un haut-gradé français de l’Otan. « Sans les Américains, on a du mal, on s’essoufle« .  Et cela coûte cher, en période d’austérité budgétaire et de surendettement de l’Etat:  » On a du dépenser pour 20 millions d’euros de bombes. Cette année, le surcoût des opérations extérieures sera très important« .

Dans ces conditions, nos ministres aimeraient bien « partager le fardeau ».

Avec d’autres pays européens et/ou avec les Etats-Unis (seuls quatre autres pays, -la Belgique, la Norvège, le Danemark et le Canada-, participent aux frappes aériennes). L’Italie a décliné, tout comme l’Espagne et la Pologne. Les Pays-Bas, la Suède, la Grèce et la Turquie se contentent de participer à la mise en oeuvre de la zone d’interdiction aérienne. Quant aux Etats-Unis, qui conduisent aujourd’hui environ 25 % des sorties aériennes  (renseignement, brouillage et ravitaillement en vol), ils n’ont, pour l’instant, pas décidé de renvoyer leurs avions AC-130.

Commentaire de deux experts américains sur l’incapacité des Européens à financer leurs armées et leur dépendance à l’égard des Etats-Unis:

- « La Libye n’est pas une grosse guerre » affirme John Pike, directeur de GlobalSecurity.org. « Si les Européens manquent de munitions si tôt dans un conflit aussi peu important, on peut se demander à quel type de guerre ils sont préparés. Peut-être qu’ils réservent leurs avions aux démonstrations aériennes ».  

- « Le problème quand on est un parasite est que si jamais vous décidez que vous devez aller vous-même quelque part , vous réalisez rapidement que vous n’avez plus les moyens de le faire » souligne Andrew Exum, du Center for a New American Security. « Avec un peu de chance, cette intervention en Libye convaincra les leaders européens, soit d’arrêter de jouer les durs avec des interventions militaires, soit de réinvestir dans des capacités militaires véritablement indépendantes ».

 

Lien : http://francois-d-alancon.blogs.la-croix.com/libye-la-france-a-t-elle-les-moyens/2011/04/16/

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