La représentante la plus médiatique du parti islamiste, Souad Abderrahim, a tenu sur une radio arabophone des propos très durs contre les mères célibataires.
Rencontrée récemment par Le Parisien, elle expliquait que «la Tunisie pratique un islam modéré, et [que Ennahda] est un parti politique civil et modéré, respectueux des libertés» ajoutant que «non, la polygamie ne sera pas instaurée, non, on ne va pas imposer le voile».
Sauf que la nouvelle élue, candidate à la présidence de l'Assemblée constituante, semble adapter son discours selon les médias. Pour un quotidien français, une position d'ouverture, pour la radio arabophone française Monte Carlo Doualiya, des propos beaucoup plus rétrogrades.
Lors d'un débat sur les inquiétudes des femmes tunisiennes face à la montée d'Ennahda, elle s'est attaquée ainsi violemment aux mères célibataires. Selon elle, ces dernières ne «devraient pas aspirer à un cadre légal qui protège leurs droits» et sont «une infamie», traduit notamment Slate Afrique. Un peu plus loin, elle ajoute qu'«éthiquement, elles n'ont pas le droit d'exister».
Le site Tuniscope précise que «Souad Abderrahim a ajouté qu'en tant que Tunisiens, nous devrions préserver nos mœurs et se battre pour une liberté conforme aux normes d'une société arabo-musulmane, conforme aux coutumes et aux traditions.» «Il n'y a pas de place pour une liberté intégrale ou absolue», juge la membre d'Ennahda. Pour le professeur en islamologie à Toulouse 2 Mathieu Guidère, «ces propos sont inadmissibles d'un point de vue humaniste et démocratique, mais ils démontrent qu'il existe en Tunisie même des tendances féminines conservatrices, voire régressives, à côté de la mouvance féminine progressiste et libérale».
Karima Brini est présidente de l'Association des femmes citoyennes du Kef, ville à l'ouest du pays. Elle n'a «pas du tout été surprise». Souad Abderrahim «n'est pas spécialiste de la chose, elle ne connaît pas les problèmes sur le terrain, elle joue la carte de l'argument morale sans prendre en compte la la réalité», juge-t-elle. Son association travaille avec des mères célibataires et veut développer la prévention. «Ce ne sont pas des femmes modernes ou libérées sexuellement, ce sont la plupart du temps des jeunes de zone rural qui n'ont pas accès à la contraception et qui ne connaissent pas leurs corps». Pour elle, les déclarations de l'élue d'Ennahda vise surtout à stigmatiser les plus pauvres.
Sur Internet, cela fait réagir. Sur son blog, Mohamed Ali Charmi, professeur à l'Ensi Tunis (une école d'informatique), adresse ainsi une lettre ouverte à Souad Abderrahim: «Vous oubliez madame, que quand vous marginalisez ces femmes, vous lésez des bébés, des enfants qui n'ont pas choisi de venir dans ce monde cruel. Vous oubliez que si vous livrez ces femmes à leur sort vous les laissez proie facile à la drogue et la prostitution et vous détruisez l'avenir de leurs enfants», écrit-il.
De manière générale, Ennahda n'hésite pas depuis les élections à durcir son discours sur les questions de la famille. Mais peut-être est-ce pour plaire le plus possible à ses électeurs. Mathieu Guidère juge ainsi que «ces propos s'adressent prioritairement aux femmes qui ont voté pour la parti Ennahda et non pas à l'ensemble des femmes tunisiennes.» Karima Brini regrette elle, que, sur le terrain, «on est en train de se rendre compte que le peuple tunisien est très conservateur, peut-être même plus conservateur que le discours des partis».
source http://www.liberation.fr/monde/01012370788-tunisie-les-meres-celibataires-sont-une
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Souad Abderrahim, du parti conservateur Ennahdha, vient d'annoncer sa candidature à la présidence de l'Assemblée constituante tunisienne.
Seule femme non voilée à la tête d'une liste du parti islamo-conservateur Ennahdha, Souad Abderrahim vient d'annoncer sa candidature à la présidence de l'Assemblée constituante tunisienne. L'initiative vise sans doute à rassurer ceux qui s'inquiètent de voir les "acquis de la femme" remis en question par les islamistes. Le 2 novembre plusieurs centaines de femmes manifestaient dans le centre de Tunis afin d'obtenir des garanties sur leurs droits.
source : http://www.lexpress.fr/actualite/indiscrets/tunisie-une-femme-au-perchoir_1049672.html
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Madame Souad Abderrahim, le diamant de la Tunisie
Durant 23 ans le régime dictatorial de Ben Ali n’a fait qu’occulter la réalité. Une situation que certains arriveront à supporter pendant que d’autres préfèreront jouer à l’autruche et ne voudront pas la voir.
Aujourd’hui, il nous est donné un nouvel exemple de cette politique de l’autruche où la majorité se complait. Souad Abderrahim qui siègera bientôt dans l’une des 89 places accordées au parti Ennahdha pour écrire la Constitution de la Tunisie post-révolutionnaire illustre cet état d’autisme collectif dans lequel les Tunisiens semblent enfermés. Dans son interview donnée sur les ondes de radio Monte Carlo, madame Souad pointe d’un doigt accusateur et incendiaire les mères célibataires et les enfants nés hors mariage. Nous ne disposons pas, à ce jour, de statistiques sur le nombre exact d’enfants abandonnés en Tunisie mais on l’estime à plus de 1000 / an.
Il n’existe pas non plus de statistiques sur le nombre de rapports sexuels non protégés consentant qui engendreront une grossesse, mais sachez qu’ils existent même si certains préfèrent l’ignorer. Les 1000 enfants nés hors mariage ne naissent pas dans les choux et ne sont pas tous le fruit d’un viol.
Beaucoup d’étudiantes venues faire leurs études dans la capitale se voient offrir de l’argent facile, dont elles ont besoin pour survivre, en échange de faveurs sexuelles. D’autres tombent amoureuses, avec ou sans fausses promesses de mariage et veulent matérialiser cet amour.
Enfin, et parce qu’une personne est libre de son corps, elle peut choisir d’avoir du plaisir en ayant des relations sexuelles avant le mariage Ces cas existent dans tous les pays car ils sont inhérents à l’espèce humaine.
Vu l’absence totale d’éducation sexuelle en Tunisie et la focalisation de la plupart des associations et des structures sanitaires de l’état (ONFP) sur la lutte contre les IST et le SIDA, on oublie l’essentiel : l’éducation sexuelle. Le message n’arrive pas au public cible. Résultat : de très jeunes femmes ignorent le fonctionnement de leur corps et les moyens de contraception sujet tabou par excellence Jugez-en à travers cette anecdote véridique lors d’une discussion entre une psychologue et une mère célibataire :
-Tu ne savais pas que tu pouvais tomber enceinte ? Tu n’as pas vu ça dans les cours de sciences en 9ème année de base ?
-Si je l’ai vu mais je pensais que ça concernait uniquement les poules et les coqs.
Ces femmes qui tombent enceintes à cause du tabou social et surtout du manque d’informations ne pensent pas à avorter à temps. De peur de la réaction de leurs proches, elles restent à Tunis jusqu’à l’accouchement. Elles ont alors le choix de le garder ou de remettre le bébé à l’INPE.
Sachant que rien ne peut remplacer la chaleur d’une mère et que l’adoption est de plus en plus difficile, ces enfants passeront toute leur enfance dans des centres. A l’adolescence ils seront transférés dans un centre intégré. Cette succession de centres fera de l’enfant, dans la plupart des cas, un paria et un handicapé social.
Plusieurs associations, dont AMAL, BAYTI et les amis de l’INPE, font un travail de titans pour aider ces mères à trouver un emploi, à s’installer et à garder leur enfant dans de bonnes conditions.
Le but final étant de sauver cette enfance et de donner une seconde chance à ses filles considérées comme « perdues » Souad Abderrahim pose le problème de ces femmes comme une honte contrastant avec l’image de la femme tunisienne qui devrait être à ses yeux semblable à un « diamant ». (Sic!) Quid de ces femmes qui souffrent déjà assez de la pression sociale et des lois discriminatoires à leurs égards. Ces femmes se verront être en plus accusées et condamnées par les institutions de leur pays. Souad Abderrahim dit qu’elle « ne veut pas avoir honte devant les autres pays arabes » !!! Madame Souad ignore-t-elle que le combat des femmes est aussi de protéger et de mettre à l’abri les plus fragilisées ? Madame Souad dit que l’état ne les aidera pas ni elles ni leurs enfants parce que « ces femmes l’ont bien cherché. ». Quelle musulmane est donc cette femme ?
Comme toutes les sociétés humaines, la Tunisie est multiple. Est-ce que quelqu’un dénigrerait ses yeux et refuserait de mettre des lunettes parce qu’il est myope ?
Nous avons enterré la peur et le silence, déterrons nos préjugés et nos problèmes et faisons leur face.
Nous avons « dégagé » un dictateur pour avancer, pour prendre par la main les personnes les plus démunies, les laissés-pour-compte, pour rétablir la dignité de chacun. Ennahdha cible à travers madame Souad Abderrahim (futur ministre de la vertu ?) un problème statistiquement marginal, mais combien significatif du projet de société qui nous sera proposé.
source : http://nawaat.org/portail/2011/11/10/madame-souad-abderrahim-le-diamant-de-la-tunisie/