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17 février 2011 4 17 /02 /février /2011 19:07

 

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(De Tunis) Hamadi Ben Abdelmalek a été arrêté en janvier 1992. Condamné à vingt-cinq ans de prison, il a été remis en liberté le 5 novembre 2006. Il a été accusé de préparer des attaques contre l'Etat. Aucune preuve n'a jamais été produite. Son seul crime, m'a-t-il dit, a été d'avoir des amis membres du parti Ennahda, alors interdit par le pouvoir.

J'ai rencontré Hamadi Ben Abdelmalek chez lui. Durant plusieurs heures, il m'a raconté ses années de torture et de détention. Son témoignage nous plonge dans l'horreur et l'absurdité du système paranoïaque des années Ben Ali. Plusieurs personnes m'ont confirmé les faits qu'il relate.

Rue89 a choisi de ne pas révéler les noms des personnes mentionnées par Hamadi Ben Abdelmalek sauf ceux, déjà connus, de certains responsables politiques dont Ezzedine Jenayah, déjà mis en cause par d'autres victimes de la torture.

Il a 49 ans, on est en janvier 1992. Le téléphone sonne. C'est un ami d'Algérie : « J'ai un copain, Ali, de passage à Tunis, il a besoin d'argent. Donne lui 150 dinars. » Il retrouve Ali près du café de la Lyre, rue de Rome, et lui remet l'argent. Hamadi Ben Abdelmalek ne sait pas alors que ce coup de fil va lui coûter sa liberté.

Le 25 janvier 1992, à 23h30, on sonne chez lui. Walid, son fils, ouvre la porte. Ils sont neuf, des policiers en civil. Dehors, un minibus attend. Hamadi Ben Abdelmalek est embarqué.

Qui est Abdellatif Tlili ? C'est leur première question. Abdellatif Tlili est l'ami d'Algérie. Un jeune Tunisien qui avait travaillé à la Steg, la compagnie d'électricité. Une sorte de fils pour Hamadi qui jure l'avoir rencontré parce que dans son quartier, le courant sautait sans arrêt et que Tlili savait y faire avec les réseaux 110 volts.

Surtout, Tlili faisait partie d'Ennahda, la « renaissance », un parti politique interdit et combattu férocement par Bourguiba puis par Ben Ali.

« Je n'étais pas d'Ennahda, je ne faisais pas de politique », dit-il. C'était il y a vingt ans. Depuis, il n'a plus jamais touché un téléphone. Dans son salon, il y en a bien un mais Hamadi craint toujours qu'un mot de trop, mal compris par les mouchards du régime, ne le renvoie en prison.

« Moi, j'avais la tête par terre et les pieds en l'air »

Ce 25 janvier, un autre homme, Hbib S., est interrogé dans les locaux du ministère. Il conduit les policiers à l'hôtel de l'Algérien, celui à qui ont été remis les 150 dinars. Une confrontation est alors organisée. Les coups pleuvent sur Hamadi. Les insultes aussi. « Tu es un metteur en scène toi ! Tu prétends que tu ne le connais pas ? Tu l'as vu au café ! Avoue ! » J'ai reconnu Ali mais j'ai répété que je ne le connaissais pas plus que ça. « Tais toi ! Tais toi ! » Ils m'ont frappé. »

Qui est Ali ? Quels sont ses liens avec Tlili ? Pourquoi lui, agriculteur, fréquente-t-il Tlili ? Après 48 heures d'interrogatoire, un homme important débarque dans le bureau. C'est le directeur de la sûreté de l'Etat, Ezzedine Jenayah. Il s'installe. Hamadi se souvient de son regard, plein de mépris. Ce jour-là, il se contente de lui poser des questions.

Le lendemain, Hamadi commence à faiblir et les policiers à s'impatienter, les coups ne suffisent plus. « Ils m'ont déshabillé puis ils m'ont ligoté les pieds. J'avais les mains attachées derrières les genoux. J'étais gros, c'était difficile de me mettre dans la position du “poulet rôti”. » Ou de « l'hélicoptère ».

Cette sinistre technique de torture de la police tunisienne consiste à immobiliser la victime en coinçant un bâton derrière ses genoux. Les chevilles et les poignets sont liés.

« Ils m'ont coincé entre deux bureaux. Je les ai vus apporter une barre de fer. On m'a frappé, frappé toute la journée. De temps en temps, Jeniyah entrait, le cigare à la bouche, et demandait : “Il a pondu ? Non ? Bon, il va pondre.” Moi, j'avais la tête par terre et les pieds en l'air. »

 

Lire la suite ici : http://www.rue89.com/2011/02/14/quinze-annees-dans-les-geoles-de-ben-ali-la-torture-12-190550

 

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