Des foules nombreuses appelant au départ du président Ali Abdallah Saleh ont bravé mercredi la police au Yémen, après des violences qui ont fait 25 tués et provoqué une vive condamnation de Washington.
Alors que les Etats-Unis se disent prêts à poursuivre leur coopération anti-terroriste avec un successeur éventuel, le secrétaire à la Défense Robert Gates a rencontré à Ryad le roi Abdallah d'Arabie saoudite qui s'inquiète de la résurgence d'Al-Qaïda chez son voisin de la péninsule arabique.
Des manifestations massives ont eu lieu à travers le Yémen pour demander le départ de M. Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, et accusé par son principal rival le général Ali Mohsen al Ahmar d'avoir voulu l'assassiner mardi.
Des foules nombreuses ont envahi les rues de Sanaa, Aden (sud) Taëz (sud-est) et Sanaa après des manifestations qui ont fait au moins 25 mort depuis lundi ainsi que des centaines de protestataires indisposés par les gaz lacrymogènes.
La Maison Blanche a "condamné fermement l'usage de la violence par les forces gouvernementales", et souligné que dans le domaine de la lutte anti-terroriste Washington ne se "concentrait pas sur un individu".
A Taëz, les cortèges qui ont convergé vers la "place de la Liberté", l'un des épicentres de la contestation scandaient : "Dégage, Ali", "Le peuple veut la chute du régime".
Le mouvement contre le régime, commencé fin janvier dans ce pays pauvre et instable, ne faiblit pas et les troubles, qui ont fait plus de 100 morts, apparaissent propices à un renforcement des émules d'Oussama ben Laden.
La monarchie saoudienne, cible de la vindicte d'Al-Qaïda, a offert d'accueillir des tractations entre l'opposition et le régime Saleh pour tenter de trouver une solution politique propre à rétablir l'ordre chez son voisin.
Ce dialogue est d'autant plus urgent que, selon la presse américaine, les opérations anti-terroristes menées par l'armée yéménite se sont arrêtées à cause de la mobilisation d'unités loyales à M. Saleh pour sa propre défense.
"Le président Saleh doit trouver une solution à l'impasse politique avec l'opposition pour qu'un changement politique digne puisse se produire à court terme de façon ordonnée et pacifique", a souligné le porte-parole de la Maison Blanche.
M. Saleh maintient qu'il ne peut céder le pouvoir que dans le cadre d'un processus constitutionnel après un retour au calme. Ses opposants disent de leur côté n'être prêts à discuter que de son "départ immédiat".
La tension au sein de l'armée a été illustré par un incident mardi à Sanaa entre des soldats sous le commandement du général Ahmar, rallié à la contestation, et des hommes fidèles au président.
Dans un communiqué, le général Ahmar a affirmé que des émissaires tribaux s'étaient présentés au QG de la 1ère division blindée qu'il commande et demandé à le voir pour une médiation entre lui et M. Saleh. Lorsqu'il s'est présenté à eux, des "individus de la garde du président disséminés parmi ces émissaires ont commencé à tirer en sa direction ainsi que sur les émissaires tribaux".
Le regain de violences au Yémen a suscité de vives réactions dans le monde.
Londres a sommé M. Saleh de "dire clairement qu'il est prêt à s'engager dès à présent dans un processus global de transition politique", alors que Rome a souhaité "l'amorce au plus tôt d'un dialogue constructif avec ceux qui réclament pacifiquement le début d'une nouvelle période de réformes".
L'Union européenne a appelé pour sa part M. Saleh à entamer "sans délai" une transition politique.
Par Hammoud MOUNASSAR SANAA (AFP)