En Tunisie, la révocation de 81 magistrats rappelle les vieilles méthodes
Le nouveau ministre de la Justice, Noureddine Bhiri, applaudit lors de la présentation du nouveau gouvernement à l'Assemblée constituante, jeudi 22 décembre. REUTERS/Zoubeir Souissi
Le ministère de la Justice a annoncé la révocation de 81 juges, soupçonnés de corruption et de s’être « compromis » avec l’ancien régime de Ben Ali. Le syndicat des magistrats tunisiens dénonce une mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire. De son côté, l’avocate et militante des droits de l’homme, Radia Nasraoui, met en garde contre l’emploi des mêmes méthodes de l’ancien régime de Ben Ali.
Les 81 magistrats, dont l’identité n’est toujours pas précisée, ont été démis de leurs fonctions suite à une décision du ministre de la Justice, selon un communiqué du ministère publié samedi 26 mai. La décision devra être entérinée par le Premier ministre.
Les magistrats sont accusés d’avoir « obéi à des ordres et trempé dans des malversations, en prononçant des jugements en violation de la loi, pour protéger des intérêts personnels », a précisé le ministre de la Justice Nourredin Bhiri. Il a également ajouté que les juges visés représentaient une « minorité » et que la majorité des quelque 2 000 magistrats du pays étaient « intègres ».
Le communiqué précise que ces révocations font suite à une « enquête approfondie » et que certains dossiers seront, « si nécessaire », transmis à la justice.
Une ingérence du gouvernement dans l’indépendance de la justice
Le syndicat des magistrats tunisiens, créé il y a deux mois, s’est déclaré « étonné » et « surpris » par cette décision et, selon sa présidente, Raouda Laabidi, il s’agit d’une « nouvelle mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire ».
Jointe par RFI, Raouda Laabidi précise que la révocation est une procédure qui ne permet pas à ceux qui ont été révoqués de se défendre, ni d’être sanctionnés s’il s’avère qu’ils sont coupables. C’est une procédure qui ne peut pas garantir aux révoqués un procès équitable : « c’est une aberration », s’insurge-t-elle, « nous avons exigé que ces personnes aient des garanties d’un procès équitable et qu’elles payent pour ce qu’elles ont fait en fonction des faits prouvés », a-t-elle précisé.
De son côté, Radia Nasraoui, avocate et militante des droits de l’homme, précise qu’il y a certes urgence à assainir l'administration et la justice mais elle estime aussi qu’il ne faut pas employer les mêmes méthodes de l'ancien régime Ben Ali.
Par Ursula Soares; rfi.fr
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Raoudha Laabidi met en garde contre l’apprivoisement de la magistrature
Raoudha Laabidi, présidente du Syndicat des Magistrats Tunisiens (SMT) a affirmé lundi 28 mai 2012 sur les ondes de la radio Shems.fm que « les juges tunisiens sont prêts à mourir plutôt que de se soumettre encore… quitte à ce que les choses partent en vrille dans le pays! ».
Raoudha Laabidi a assuré que les juges exigent l’arrêt des tentatives de mainmise du pouvoir exécutif sur la magistrature, pour que celle-ci demeure indépendante, dans un État de droit et de démocratie.
Selon la présidente du SMT, l’exécutif essaierait de « domestiquer » la magistrature « comme jamais auparavant » en révoquant des magistrats. Raoudha Laabidi a précisé que ce sont les magistrats qui ont demandé les premiers à ce que les dossiers de corruption dans leur secteur soient examinés, « dans le cadre de la loi et non par la révocation (…) Toutes les possibilités sont envisageables désormais pour contrer de telles décisions ». tunisienumerique
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Un quasi débat de sourds avec le conseiller du ministre de la Justice
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